Le pape appelle à prier pour Benoît XVI, “gravement malade”

La dernière vidéo de Benoît XVI, diffusée par le Vatican en août, montre un homme amaigri, muni d'un appareil auditif, ne pouvant plus parler mais au regard toujours vif. (Photo : AFP)
Temps de lecture : 3 min.

Le pape François a annoncé mercredi que son prédécesseur Benoît XVI, âgé de 95 ans, était “gravement malade” et qu’il priait pour celui dont la renonciation en 2013 pour raisons de santé avait pris le monde entier par surprise.

“Sa santé s’est dégradée il y a environ trois jours. Ce sont ses fonctions vitales qui lâchent, y compris le cœur”, a précisé à l’AFP une source vaticane, ajoutant qu’aucune hospitalisation n’était prévue, la résidence de Benoît XVI disposant du matériel médical nécessaire.

Devant les fidèles réunis au Vatican, le pape François a appelé à une “prière spéciale” pour son prédécesseur. “Pour entretenir sa mémoire, car il est gravement malade, pour demander au Seigneur de le consoler et de le soutenir jusqu’au bout dans ce témoignage d’amour à l’Eglise”, a-t-il ajouté.

En fin de matinée, le Saint-Siège a confirmé l’“aggravation au cours des dernières heures” de l’état de santé du théologien allemand en raison de son “âge avancé”, précisant qu’il restait sous surveillance médicale permanente.

Le pape François a lui-même rendu visite mercredi à Benoît XVI au monastère Mater Ecclesiae, situé au cœur des jardins du Vatican, où le pape émérite Joseph Ratzinger vit une retraite discrète depuis qu’il a renoncé à sa charge en 2013 en raison d’une santé défaillante.

“Moment d’épreuve”

Après huit ans d’un pontificat marqué par de multiples crises, Benoît XVI fut rattrapé début 2022 par le drame de la pédocriminalité dans l’Eglise.

Mis en cause par un rapport en Allemagne sur sa gestion des violences sexuelles lorsqu’il était archevêque de Munich, il était sorti de son silence pour demander “pardon”, mais avait assuré ne jamais avoir couvert de pédocriminel.

Sa renonciation, annoncée en latin le 11 février 2013, fut une décision personnelle liée à ses forces déclinantes et non à la pression de scandales, avait assuré l’ancien pape, peu à l’aise avec les bains de foule, dans un livre de confidences paru en 2016.

Par ce geste, inédit en 700 ans, le premier pape allemand de l’Histoire moderne a ouvert la voie à ses successeurs dont les forces viendraient à décliner. François, 86 ans et souffrant de douleurs au genou, a lui-même laissé “ouverte” cette possibilité.

Le gouvernement allemand a indiqué “surveiller” la situation, “tout comme le chancelier (Olaf Scholz) qui souhaite au pape émérite un bon rétablissement et lui adresse ses pensées”.

Le président de la Confédération épiscopale allemande Georg Bätzing a de son côté appelé sur Twitter “les fidèles en Allemagne à prier pour Benoît XVI”, tout comme son homologue de la conférence épiscopale italienne, le cardinal Matteo Zuppi.

“Dans ce moment de souffrance et d’épreuve, nous serrons les rangs autour du pape émérite”, a affirmé Mgr Zuppi dans un communiqué.

Courage

Benoit XVI est apparu de plus en plus fragile ces derniers mois, se déplaçant en chaise roulante, mais il continuait de recevoir des visiteurs. Les photos de sa dernière visite reçue, datant du 1er décembre, montraient un homme frêle et visiblement affaibli.

Né en 1927, Joseph Ratzinger a enseigné la théologie durant 25 ans en Allemagne avant d’être nommé archevêque de Munich.

Il est ensuite devenu le strict gardien du dogme de l’Eglise durant un autre quart de siècle à Rome à la tête de la congrégation pour la doctrine de la foi, puis pape pendant huit ans (2005-2013), succédant à Jean Paul II.

En tant que chef de l’Eglise catholique, il a défendu une ligne conservatrice, notamment sur l’avortement, l’homosexualité ou l’euthanasie.

Ses déclarations ont parfois choqué, comme sur l’islam, l’utilisation du préservatif contre le VIH ou encore l’excommunication de quatre évêques intégristes en 2009.

Son pontificat fut également marqué en 2012 par la fuite de documents confidentiels (“Vatileaks”) orchestrée par son majordome. Le scandale avait mis en évidence une Curie romaine (gouvernement du Vatican) minée par les intrigues et dénuée de rigueur financière.

Pour Eleonora Matsechek, une fidèle italienne de 19 ans originaire de Modène présente mercredi place Saint-Pierre, Benoît XVI “a été un bon pape, il a fait preuve de courage en démissionnant”.

A Regensburg en Bavière dans le sud de l’Allemagne, où Ratzinger a travaillé à l’université, Erich Wagner, 62 ans, s’est dit “très surpris”: “Rien ne suggérait qu’il était si mal en point, mais alors je pense à la reine d’Angleterre, qui deux jours avant sa mort a rencontré la nouvelle Première ministre et est morte soudainement”, a-t-il dit mercredi à l’AFP.

La dernière vidéo de Benoît XVI, diffusée par le Vatican en août, montre un homme amaigri, muni d’un appareil auditif, ne pouvant plus parler mais au regard toujours vif.