SEMINAIRE – Transition énergétique : le Medef Polynésie milite pour la sobriété

Les territoires ultramarins "concentrent tous les défis des transitions contemporaines" explique la Fédération.
Les territoires ultramarins "concentrent tous les défis des transitions contemporaines" explique la Fédération. (Photo : Medef)
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La Fédération des entreprises des Outre-mer (Fedom) a organisé, ce mardi 21 février en partenariat avec la chambre de commerce, un séminaire sur “Les entreprises au cœur de la transition énergétique” dans l’auditorium de la CCISM à Papeete. Le président du Medef Polynésie, Frédéric Dock, explique à quel point la sobriété énergétique est capable de générer de très importantes économies.

Les territoires ultramarins “concentrent tous les défis des transitions contemporaines” explique la Fédération : éloignement des sources d’approvisionnement, insularité, exposition accrue au changement climatique, préservation et valorisation d’une biodiversité exceptionnelle, et une économie fortement carbonée. Un cumul de défis qui implique qu’une réflexion profonde soit engagée par les premiers acteurs du changement que sont les entreprises. L’objectif de ce séminaire était d’identifier les différents points de blocages et d’œuvrer à l’élaboration de réponses collectives pour les lever. Les conclusions de ces travaux seront présentées au gouvernement central au mois de juin à Paris, et constitueront la feuille de route de la Fedom “pour inscrire les entreprises au cœur de la transition énergétique.”

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Cinq questions à… Frédéric Dock, président du Medef-Polynésie

“Des pistes d’accélération pour la transition énergétique”

Quelles sont les pistes suivies par les entreprises dans le cadre de la transition énergétique ?

Les entreprises savent qu’elles sont au coeur de la transition énergétique, il s’agissait d’aller explorer les actions opérationnelles qui nous permettent de réaliser cette transition, en d’autres termes de décarboner notre économie. Hervé Mariton, ancien ministre de l’Outre-mer, est le président de la Fedom dans laquelle on retrouve les Medef des outre-mer, les chambres de commerce, les grandes entreprises. J’intervenais moi-même en tant que président de la commission “transition énergétique” de la Fédération, et président du Medef en Polynésie française. Le premier aspect de la transition, c’est la sobriété énergétique, c’est donc consommer moins, une démarche qui relève des comportements. C’est décider d’éteindre les lumières inutiles, d’opter pour le vélo plutôt que la voiture, etc. Le second aspect c’est l’efficacité énergétique, c’est à dire changer les systèmes par d’autres systèmes moins consommateurs d’énergie.

L’optimisation énergétique représente-t-elle un fort potentiel ?

Oui, c’est un potentiel extrêmement important, mais la démarche existe peu en Polynésie française, à l’exception de quelques industriels. Elle n’est pas naturelle car il n’existe pas de dispositif qui le prévoit. En métropole, il existe des contrats d’efficacité énergétique (CEE) qui apportent soutien et financements aux actions. Dans les outre-mer, il y a des cadres de compensation qui permettent, là encore, de bénéficier de subventions. C’est utile parce que les systèmes plus efficaces, ceux qui réduisent la carbonation, sont également plus chers. Ces dispositifs permettent aux entreprises d’amortir plus rapidement leurs investissements.

Les sociétés polynésiennes sont-elles incitées à mieux gérer leurs énergies ?

La Polynésie française n’est pas éligible à ces dispositifs, mais nous en avons parlé aux autorités du Pays qui travaillent à leur mise en place. Cette action en cours est particulièrement importante puisqu’elle peut représenter 15% de la consommation des entreprises et des particuliers, c’est énorme. Le troisième axe, c’est la production d’énergies renouvelables à place d’énergies carbonées. Lorsque le Pays lance un appel à projets pour 30 Mégawatts solaires, il s’inscrit dans une réduction de 7% de la production thermique, pour une dépense 7 milliards de francs. Nous, nous disons que pour à peu près le même montant, nous pouvons atteindre 15% de réduction !

Y a-t-il, dans les outremer, un “mauvais élève” de la transition énergétique ?

Tout dépend des paramètres que l’on retient. La Polynésie française, en rapport de son Produit intérieur brut (PIB), n’est pas une bonne élève, comparée à la Nouvelle-Calédonie, la Guyane ou à La Réunion par exemple. La Polynésie française, c’est cinq archipels répartis sur une immense surface océanique, il s’agit là d’un handicap structurel majeur. Nous avons au fenua une émission moyenne de gaz à effet de serre par habitant qui est à peu près la même que dans l’Hexagone. Ca montre bien qu’il y a potentiellement beaucoup de gains à envisager (…), sur le recours aux renouvelables, sur l’électrification des transports, etc. Nous livrerons officiellement au gouvernement des pistes d’accélération pour la transition énergétique. Au gouvernement polynésien, puis au gouvernement central en juin par la Fedom qui évoquera l’ensemble des collectivités. Le soutien aux investissement fera partie de discussions.Notre mauvais bilan carbone vient d’abord des importations. Les produits ont été fabriqués loin par des entreprises pas forcément soucieuses de leur bilan carbone, et puis il y a aussi le transport international, puis le transport vers les îles.

Avez-vous le sentiment d’une bonne écoute des pouvoirs publics ?

Il est indispensable que les entreprises s’expriment et qu’elles soient écoutées, ce qui a été le cas lors du séminaire. Nous avons apporté des solutions opérationnelles aux objectifs extrêmement ambitieux du Pays en matière de transition (75% d’énergies renouvelables à l’horizon 2030, NDLR). Concernant le “Fonds Macron”, le texte va passer à l’assemblée ce jeudi 23 février et ça devrait être signé entre le Pays et l’Etat le 27 février. Il répond aux objectifs de décarbonation et d’économies. Cela correspond à la feuille de route fixée avec le président Macron en juillet 2021. Il faut maintenant que ce fonds devienne rapidement opérationnel, ne pas perdre de temps pour mettre en musique les projets et les financements qui vont avec.

Propos recueillis par Damien Grivois