Procès en appel de radio Tefana : cette fois-ci, c’est la bonne !

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Les indépendantistes sont venus apporter leur soutien à leur leader. (Photo YP)

Les premiers militants sont là dès cinq heures du matin, il faut installer les banderoles du parti. Parmi celles-ci, une citation du Président Emmanuel Macron : “la colonisation est un crime contre l’humanité” ou encore “la France aux Français, Ma’ohi Nui au ma’ohi”.

L’orchestre et les drapeaux sont en place. Ils sont environ 150 devant le palais de justice de Papeete à soutenir leur leader. “La justice de la France veut couler Oscar” lance un militant au passage d’une voiture de police. L’ambiance est toutefois bon enfant, mais pour le camp bleu clair le procès est politique, il n’y a aucun doute.

A huit heures, la salle d’audience est bondée. Tout ce que le Tavini compte de cadres est rassemblé. Toutes les personnalités du parti sont là. Nos trois députés et bien sûr les mis en cause : Oscar Temaru, le maire de Faa’a ainsi que Vito Maamaatuaiahutapu et Heinui Le Caill, anciens directeurs de Te Reo o Tefana.

Toute la famille du Tavini est présente au palais de justice. (Photo YP)

Ils comparaissent pour prise illégale d’intérêts. Après déjà cinq renvois, et à quelques semaines des élections territoriales, une question se pose. La défense va-t-elle à nouveau demander un délai ? Avant de poser la question à la défense, le Président de la cour d’appel est affirmatif, “la justice ne veut pas interférer dans ces élections”. Il interroge Oscar Temaru qui répond sans détour : “Nous sommes là pour que cette affaire soit jugée aujourd’hui même”.

Pendant plus de 30 minutes  le président de la cour d’appel détaille ce qu’on reproche au maire de Faa’a et aux deux dirigeants successifs de la radio. En résumé, une prise illégale d’intérêt, c’est-à-dire avoir mis à disposition du matériel, un local, du personnel de la commune et surtout avoir octroyé de nombreuses subventions municipales à la radio. “Un outil de propagande certain pour les intérêts politiques de monsieur Temaru” déclare le président du tribunal.

“On est chez les fous !”

Propagande ou pas, l’outil coûte cher : presque 200 millions de francs de subventions communales entre 2010 et 2017. Plus de 250 millions si l’on y ajoute le salaire de certains animateurs payés directement par la mairie. Vient ensuite l’appel des témoins cités par la défense.

Unutea Hirshon, Antony Géros, Minarii Galenon, Moetai Brotherson, Eliane Tevahitua ou encore Richard Tuheiava. Ils ne peuvent pas assister au débat avant d’avoir témoigné. Leurs interventions sont prévues ce mardi 28 février au matin à partir de 9 heures. En attendant, le juge les invite à quitter la salle.

Les débats de lundi s’articulent sur l’étude des demandes de nullité présentées par les différents avocats. Ils mettent en avant des problèmes avec la procédure, des abus, des oublis, des pièces manquantes. L’objectif est de faire annuler la garde à vue d’Oscar Temaru en particulier. Mais aussi faire annuler le procès en général. Maître Koubi et Maître Dubois sont les plus éloquents, fustigeant la manière dont le dossier a été traité, l’enquête menée et la procédure, disent-ils, téléguidée. Ils présentent sans pincette le procureur Hervé Leroy comme fautif et responsable. “Je n’ai jamais vu un tel foutoir (…) Ca a été fait avec les pieds” dit Maître Koubi. Le procès doit durer toute la semaine.

Compte-rendu d’audience YP

Trois questions à Steve Chailloux, député Tavini

Est-ce que ce procès lance la campagne des territoriales pour le Tāvini huira’atira ?

“Certains de mes collègues vous diront peut-être oui. Moi je suis plus mitigé, car la campagne doit avant répondre aux préoccupations de la vie quotidienne de la population. Le pouvoir d’achat, trouver du travail… Radio Tefana ne sera pas le cœur de la campagne du Tavini.”


Pourquoi est-ce un procès politique selon vous ?

“Ça a toujours été un procès politique à cause de la chronologie des faits. Il faut rappeler que dès que le Tavini a déposé plainte pour crime contre l’humanité contre la France, deux semaines plus tard, Oscar Temaru a été déclaré inéligible. Puis, quelques jours plus tard seulement, il y a eu l’affaire radio Tefana. Jusqu’à aujourd’hui, avec ce procès à un mois des territoriales, le calendrier judiciaire démontre qu’il ne s’agit ni plus ni moins que d’une entreprise pour casser de l’indépendantiste, casser le leader indépendantiste Oscar Temaru.”

Si Oscar Temaru gagne, c’est bon pour la campagne du Tavini. Si il perd, on imagine que ce sera aussi un argument de campagne pour l’indépendance, c’est gagnant/gagnant finalement ce procès non ?

“(rire..) On verra à ce moment-là. Pour l’instant, on est concentrés sur la campagne et on va déjà voir si le procès va avoir lieu. On ne peut pas se projeter pour l’instant.”