Préavis de l’intersyndicale : la grève a débuté, petite manifestation à Papeete

Plusieurs centaines de manifestants ont occupé ce mardi l'avenue Pouvana'a a Oopa à Papeete, alors que les leaders syndicaux étaient successivement reçus par les autorités de l'Etat.
Plusieurs centaines de manifestants ont occupé ce mardi l'avenue Pouvana'a a Oopa à Papeete, alors que les leaders syndicaux étaient successivement reçus par les autorités de l'Etat. (Photo Damien Grivois)
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La grève générale et illimitée a commencé ce mardi 7 mars. Suivie dans le privé (port, aéroport…) comme dans le public, elle n’a toutefois pas déplacé les foules.

“Sans aucun point de tension, le dialogue entre les ministres et les organisations syndicales s’est bien
passé”
déclarait vendredi dernier un communiqué de la présidence, assurant que la prochaine rencontre prévue le lundi 6 mars à 16h était destinée à “signer un protocole d’accord.”

Loin de l’optimisme affiché alors par le ministre de l’Economie et des Finances, Yvonnick Raffin, et son homologue du Travail, Virginie Bruant, les représentants des organisations syndicales, CSTP-FO, A Tia I Mua, CSIP, Otahi, et O Oe To Oe Rima se montraient plus prudentes, même si elles reconnaissaient que les débats s’étaient plutôt déroulés dans un climat constructif. En tout cas, rien n’était signé vendredi et pas davantage le lundi après-midi comme annoncé.

La CSTP/FO bientôt reçue par les services de l’Etat. (Photo : Damien Grivois)

Le gouvernement avait décidé de rencontrer l’intersyndicale suite au préavis de grève un peu “fourre-tout” déposé le 1er mars, dans lequel on retrouvait notamment des revendications déjà formulées en 2021, reconnaissait Cyril Le Gayic de la CSIP. Au-delà de la négociation salariale annuelle dans certains secteurs d’activité, du déplafonnement de la prime d’ancienneté, des conditions pour prétendre à la pension de retraite, de l’opposition à la retraite à 64 ans, l’intersyndicale en a également profité pour mettre sur la table d’autres questions.

Et on reparle de la “caisse chômage”…

Par exemple les procédures disciplinaires pour la sanction ou le licenciement, la protection effective de l’emploi local dans l’ensemble des secteurs d’activité, le budget et les crédits du comité d’entreprise, le “fonds spécial de soutien aux salarié ayant perdu involontairement leur emploi”, le harcèlement, la lutte contre le travail illégal, la “stratégie française pour l’indopacifique” et enfin le non-respect des dispositions du protocole d’accord de novembre 2021.

Des syndiqués CSTP/FO filtrent les marchandises en zone sous douane à Motu Uta. (Photo : Damien Grivois)

Au passage, les signataires voulaient également réviser le système d’attribution des subventions aux organisations syndicales, ou encore la mise à disposition à leur profit d’un local syndical “à l’instar de la Maison des syndicats”. Les discussions avec l’exécutif ont échoué sur trois points : le montant minimum pour la prime pouvoir d’achat, les conditions de départ à la retraite et l’augmentation des subventions accordées aux centrales syndicales.

Plusieurs centaines de manifestants ont occupé ce mardi l’avenue Pouvana’a a Oopa à Papeete, alors que les leaders syndicaux étaient successivement reçus par les autorités de l’Etat. Selon le Pays, pour la première journée de cette grève “générale et illimitée », le taux de gréviste s’établit à 45,80 % sur l’ensemble des établissements (2nd degré) et circonscriptions (1er degré). Dans le premier degré le taux de grévistes va jusqu’à atteindre 61,03%, contre 32,75% sur l’ensemble des établissements du second degré. Au port autonome, les sociétés d’acconiers on t décidé de filtrer les marchandises : seules peuvent sortir de Motu Uta les denrée alimentaires périssables et les médicaments.

La rencontre initiée vendredi dernier par Yvonnick Raffin et Virginie Bruant n’a pas permis de conclure un accord. (Photo : Présidence)

Diana Yieng Kow, secrétaire générale du syndicat STIP AEP UNSA

“Nous exigeons 75% de notre salaire indexé”

Diana Yieng Kow : faisons preuve de solidarité”. (Photo : Damien Grivois)

“Nous avons été reçus par Cécile Zaplana, la secrétaire générale adjointe du haut-commissaire, accompagné de Christophe Deletang, le directeur des moyens de l’Etat. Nous avons confirmé notre position sur la loi de réforme des retraites, dont nous demandons le retrait.

Cette loi nous obligerait à partir à 64 ans. Il faut qu’au niveau local, mais aussi au niveau des outremers, nous parlions tous d’une même voix. Lorsque j’apprends qu’en métropole ils se basent sur des chiffres de 2015 concernant le coût de la vie, nous disons “non” et voulons travailler sur les chiffres de 2022. (…) L’idée est de travailler en intersyndicale, avec tous les mêmes données, les mêmes informations. Nos cinq parlementaires (…) nous ont également délivré ce même message : la Polynésie doit parler d’une même voix. (…) Chaque organisation syndicale va saisir sa centrale pour dire ce que l’on veut. Nous voulons, nous exigeons au moment de notre retraite, 75% de notre salaire indexé. (…) Ceux qui sont déjà à la retraite sont impactés par la baisse de l’ITR, cela n’est pas acceptable. Ca aussi, c’est un combat de solidarité.”

Patrick Galenon, secrétaire général de la CSTP/FO

“Réviser à la hausse les grilles salariales, c’est ça le plus important”

Patrick Galenon : “la prime de pouvoir d’achat était un leurre”. (Photo : Damien Grivois)

“Je suis content de la mobilisation, il y a un nombre important de personnes aujourd’hui. En France, ça a l’air d’avoir bien marché aussi. Maintenant, on espère que la réforme des retraites va tomber. J’espère que les négociations vont permettre de réviser à la hausse les grilles salariales, c’est bien ça le plus important.

Car sinon, tous les salariés migrent doucement vers la pauvreté. Un couple de salariés aujourd’hui ne peut plus s’acheter un terrain, même si l’un des deux est fonctionnaire ! Sur l’alimentation, on est à +15 ou + 20% d’augmentation des prix ! Il faut essayer au maximum de compenser les effets de l’inflation.

Ce qui nous a un peu déboussolés, c’est que l’on avait parlé de cette prime de pouvoir d’achat contre l’inflation, alors qu’en fait c’était un piège, un leurre. On n’a pas eu de grilles revalorisées, ou si peu. Comme il n’y avait pas de minima, les patrons ont donné ce qu’ils voulaient et ils n’ont pas donné grand chose. Alors que les indicateurs économiques n’ont jamais été aussi bons depuis 5 ou 6 ans. Malheureusement, le drame c’est que ça n’a pas été redistribué à ceux qui travaillent.

C’est là la différence d’approche avec le gouvernement. Le Pays a une approche comptable et non pas sociale. La difficulté de cette opération, c’est d’attirer l’attention du gouvernement central à Paris. (…) Il est vrai qu’il y a eu une revendication du point d’indice de l’administration de 3%, mais cela reste en-dessous de l’inflation. Et dans le privé, on est loin des 3%… (…) C’est le Pays qui fait la loi avec le code du travail.

Par exemple, la retraite où le Pays a déterminé le fameux “Et et Ou”. Avec le “Et, vous vous coltinez 38 ans de cotisations et 60 ans d’âge de départ à la retraite. Si c’était “ou”, on aurait peut-être 5500 personnes – c’est énorme – qui ne seraient pas, aujourd’hui, dans la difficulté.”