Tribune – “Economie : la nouvelle divinité” par Simone Grand

(Photo DG)
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La divinité préférée des candidats à nous gouverner est la déesse Economie aux attributs nommés : pouvoir d’achat et emploi à coups de bâtiments destructeurs de rivières et promesses d’embouteillages polluants, usants, coûteux encore plus nombreux à Tahiti.

Le culte à Ta’aroa dieu suprême et à Atea divinité de l’espace à la majesté terrifiante valurent à nos îles l’appellation “Nouvelle Cythère”. Nos ancêtres coincés entre l’étroitesse îlienne et l’immensité océane les avaient créées à bon escient. Les effets sur l’humeur bonne ou mauvaise de cette prégnante réalité varient selon la manière de l’habiter, la répartir et parcourir au rythme des  saisons. Le seuil optimal de densité démographique insulaire est à évaluer. 

Les continentaux voyageurs émerveillés n’ont pas saisi cette adaptation à l’âpre géographie. Leurs séjours furent des désastres sanitaires. Leur installation détruisit le fragile équilibre humain. Leurs divinités judéo-chrétiennes et leur Economie déracinèrent les îliens sur place.

Deux siècles après, les migrants dépenaillés d’Europe et d’Asie sont devenus de fastueux maîtres faisant la charité aux autochtones : “petits”, ri’iri’i, assistés entassés piégés en des quartiers déshérités où la violence intrafamiliale s’exacerbe.

Politique signifie gestion de la Cité: de la population là où elle est.

“Le CEP a instauré une politique cadeaux papa Noël”

Le CEP a instauré une politique cadeaux papa Noël, distribuant : postes dans l’administration,  subventions, parpaings, ciment, etc… Aujourd’hui encore, nos politiciens de tous bords semblent ignorer qu’abandonner aux seuls juristes le soin de penser les règles du jeu social, c’est démissionner de leur rôle d’élus, le trahir.

Ecrivez donc au président ou à un ministre pour poser un problème. Il vous renvoie au service qui oriente vers le ou la juriste popa’a ou local(e), au cerveau formaté continental et souvent fier(e) de n’avoir jamais fait de terrain. Pour disqualifier les Insulaires dans leur île et favoriser les Continentaux qui débarquent, y a pas mieux ! Ainsi, sur une île ou un atoll à 6 ou 30km de route, ça exige du prestataire un véhicule interdit à tout usage personnel et astreint au même rythme de révisions  techniques que sur un continent !…

Pareil pour le foncier dont la situation angoisse. Aussi, bien que ni indépendantistes ni xénophobes ni racistes, de plus en plus nombreux sont les électeurs disant  : “Si les Caldoches débarquent et achètent chez nous, c’est par peur de l’indépendance Kanak. Si les Popa’a  achètent nos terres, c’est que les indépendantistes sont minoritaires chez nous. Votons indépendantistes et ils rentreront chez eux.” 

L’insularité ne se gère pas comme la continentalité. Souvenons-nous des mutinés et de leurs passagers leurrés piégés sur la Bounty puis sur Pitcairn. 5km2 de superficie dont 30 ha cultivables pour 28 adultes n’ont pas suffi pour faire société. Ça n’y suffit toujours pas. Ces mêmes superficies sur un continent permettraient à une société de naître, imparfaite certes, mais viable.

À l’heure où l’ONU constate la crise imminente de l’eau de qualité, nul ne dit combien de rivières seront asséchées pour les différents projets immobiliers y compris ceux de la Caisse de Prévoyance Sociale… Nul ne propose une réduction des coûteux déchets importés. Les véhicules à essence n’existeront bientôt plus. Les électriques atteindront des prix exorbitants. Tout appelle à changer notre mode de vie. Qu’en disent les candidats à nous gouverner?

Ia maita’i

Simone Ta’ema Grand