
“La décision (…) du 12 mai 2022 par laquelle le ministre du Logement et de l’Aménagement a accordé un permis de construire à la Sarl “Fish and blue” est annulée”.
Tel est le jugement du tribunal administratif de Papeete rendu public ce mardi 28 mars. Rappel des faits. Par une requête et des mémoires enregistrés en 2022, Mme V. B.-C., représentée par Me Dumas, demande en effet au tribunal d’annuler la décision par laquelle le ministre du logement et de l’aménagement a accordé un permis de construire à cette société pour la “régularisation et la transformation d’une maison d’habitation en boutique et en Beach restaurant” sur des parcelles de la Terre Tairineneva situées à Tevaitoa, commune de Tumaraa sur l’île de Raiatea.
La partie demanderesse demande également à la justice “d’enjoindre à l’administration de faire cesser l’empiètement tant sur le domaine public que sur la parcelle (…) dont elle est propriétaire.”
Selon elle, il “résulte clairement de certains courriels échangés au stade de l’instruction du dossier que le permis de construire en litige a été accordé sur demande expresse de l’autorité ministérielle à titre “dérogatoire” malgré les irrégularités frappant la demande pourtant connues des services de l’urbanisme”.
“Fort risque de submersion marine” selon le haut-commissariat
Mais les reproches ne s’arrêtent pas là. Le code de l’aménagement n’aurait pas été respecté “en ce qu’aucun avis du bureau de prévention de l’urbanisme ou de la commission de sécurité n’a été rendu préalablement à la délivrance de l’autorisation en litige de travaux immobiliers.” Par ailleurs, le projet autorisé “ne satisfait pas au risque cyclonique”, il “empiète illégalement” sur le domaine public et sur une parcelle voisine. Enfin, la société bénéficiaire du permis de construire a ouvert son commerce “sans aucune autorisation administrative, ce qui a donné lieu à un procès-verbal en date du 20 avril 2020 qui aurait dû inciter le contrevenant à régulariser la situation.”
De son côté, la Sarl Fish and Blue a fait valoir qu’elle avait signé un bail commercial au mois de juillet 2018, prenant la suite de l’hôtel Raiatea Lodge. En conséquence, “toutes les constructions étaient existantes” avant la signature du bail. Même si ces constructions ont “toutefois été édifiées sans autorisation” et si un permis de construire a été sollicité en octobre 2020 afin de régulariser la situation illégale, ce n’était “pas de son fait”.
Par un déféré et un mémoire, le haut-commissaire demande lui aussi au tribunal d’annuler le permis de construire accordé à Fish and Blue, pour la “régularisation et la transformation d’une maison d’habitation en boutique et en Beach restaurant” . Pour le représentant de l’Etat, l’ensemble du projet est localisé sur un remblai maritime et situé en zone de fort risque de submersion marine, et de plus “il méconnaît tant la réglementation imposée en matière d’installations sanitaires (…) que celles applicables en matière d’hygiène”.
En décembre 2022, Fish and Blue conclut au rejet du déféré du haut-commissaire. Elle fait valoir que l’entreprise concernée emploie six salariés en contrat à durée indéterminée et qu’elle fait vivre une dizaine de familles polynésiennes sur l’île de Raiatea où les emplois se font rares .
“Aucune concertation avec le service de l’urbanisme de Raiatea, l’acharnement à vouloir détruire une petite entreprise est incompréhensible” s’indignent les propriétaires du restaurant. “Concernant le classement en zone cyclonique, il est évident qu’en cas d’alerte, l’établissement sera totalement fermé, personne ne réside d’ailleurs sur les lieux.”