Autodétermination : les discours à géométrie variable du Tavini huiraatira

Indépendance et autonomie, "tiamara'a" dans les deux cas en reo tahiti, la question statutaire divise la scène politique locale depuis 40 ans.
Indépendance et autonomie, la question statutaire divise la scène politique locale depuis 40 ans. (Photo archives La Dépêche)
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Le vote en faveur du Tavini huiraatira progresse de manière régulière depuis 40 ans, marqué par une “apothéose” lors des dernières élections législatives, avec trois candidats indépendantistes élus chacun dans sa circonscription. Sans vraie surprise, le parti bleu ciel a également viré en tête au soir du premier tour des élections territoriales, obtenant la majorité des suffrages dans des bastions Tapura comme Mahina, Punaauia, Moorea ou encore Teva i Uta.

Depuis 2013 et la réinscription de la Polynésie française sur la liste des territoires “non-autonomes” de l’Organisation des Nations Unies (ONU), Oscar Temaru n’a eu de cesse de réclamer un référendum d’autodétermination, sur le principe de la “liberté des peuples à disposer d’eux-mêmes”.

Mais à la mi-décembre 2022, le tavana de Faa’a changeait radicalement de discours et annonçait qu’une victoire du camp bleu clair aux Territoriales “aurait valeur de référendum d’autodétermination”. Autrement dit, plus besoin d’organiser un vrai référendum selon les conditions de l’ONU. Ce qui suppose de passer par la définition complexe du corps électoral.

Un raisonnement proche finalement de celui d’Edouard Fritch qui expliquait, devant le “comité de décolonisation” de l’ONU à New York, qu’un référendum d’autodétermination ne se justifie pas puisque les électeurs polynésiens ont jusqu’alors donné leur préférence à des formations autonomistes. Jusqu’alors…

Oscar Temaru a déclaré clairement, lors d’une conférence de presse à la permanence de Faa’a, que le Tavini était prêt à s’affranchir du protocole onusien. “Ca n’est pas obligé” expliquait alors le leader indépendantiste, “d’autres pays comme Vanuatu sont devenus souverains sans référendum”.

Depuis, le leader indépendantiste semble avoir adouci cette perspective. Il a expliqué que la légitimité des indépendantistes serait acquise si la moitié des inscrits se prononçait pour le parti bleu ciel, ce qui n’est pas le cas en raison du fort taux d’abstention.

Sur cette question de l’autodétermination, le discours finit par être à géométrie variable, selon que l’on écoute le tavana de Paea Antony Géros, les députés Moetai Brotherson, Steve Chailloux ou Tematai Legayic, plutôt “rassurants” en évoquant une démarche partenariale avec Paris. Reste que si le second tour a vocation à lui servir de référendum d’autodétermination, le Tavini serait bien inspiré d’afficher une position d’absolue clarté sur le sujet.

En attendant, le Tapura a beau jeu de crier à l’inconscience du parti indépendantiste et au risque de “jeter la Polynésie dans la misère”. Et le Amuitahiraa, l’ex-Tahoeraa de Gaston Flosse, autrefois grand défenseur de l’autonomie (après l’avoir combattue…) développe un discours beaucoup plus ambigü concernant le lien à maintenir, ou pas, avec la France. La question statutaire, qu’on le veuille ou non, reste le principal marqueur de différenciation politique à Tahiti et dans les îles. Les électeurs doivent savoir ce qu’il en est des réelles intentions de ceux qui sont potentiellement en mesure de diriger les affaires du Pays.

D.G