Des plantes et des insectes au service des agriculteurs

Atelier DAG PROTEGE agriculture Papara
Une dizaine d’agriculteurs a participé à une première journée de formation au pôle de recherche de la Direction de l’agriculture, à Papara, dans le cadre du programme PROTEGE (Photos : ACL/LDT).
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Le fruit de quatre ans de recherches

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Théorie dans les locaux du centre de recherche Agropol de Papara.

Mercredi 26 avril 2023, une dizaine d’agriculteurs a répondu à l’appel lancé par la Direction de l’agriculture (DAG), qui proposait une première session d’information et de formation sur le thème des engrais verts et des auxiliaires de culture au centre de recherche, d’innovation et de valorisation Agropol, à Papara. Cette initiative s’inscrit dans le cadre du programme PROTEGE, financé par l’Union européenne via le 11ème Fonds européen de développement régional, visant à soutenir les territoires en faveur d’un développement durable et résilient face au changement climatique. L’agriculture fait partie des quatre thématiques inscrites au programme lancé en 2019, lequel touche à son terme. “On entame une année de capitalisation des résultats et de diffusion au plus grand nombre. On transmet les résultats de toutes les expérimentations faites depuis quatre ans sur l’utilisation des plantes de service pour accompagner les agriculteurs dans leur transition agroécologique“, résume Aurélie Thomassin, coordinatrice du programme PROTEGE pour la Communauté du Pacifique (CPS) en Polynésie française.

Les plantes de service

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Place à la pratique dans les jardins du site.

Après une heure de théorie, c’est sur le terrain des essais en cours que les échanges se sont poursuivis autour des plantes de service. “Ce sont des plantes utiles aux agriculteurs pour limiter les intrants et les herbicides, tout en renforçant la fertilité des sols et la biodiversité“, explique Julie Grandgirard, entomologiste à la DAG. “Nous avons principalement présenté des légumineuses, qui ont comme propriété de fixer l’azote atmosphérique pour le restituer dans le sol. Peu de ces graines étant autorisées à l’importation, on a cherché des espèces déjà présentes localement pour pouvoir étudier leurs caractéristiques et déterminer lesquelles sont les plus judicieuses à diffuser gratuitement auprès des agriculteurs”. À l’issue de la formation, les participants sont effectivement repartis avec des graines pour expérimenter cette méthode à leur tour.  

Des insectes comme alliés

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Outre les pollinisateurs, les prédateurs des insectes
ravageurs constituent une aide précieuse.

Impossible d’aborder cette thématique sans s’intéresser aux insectes, avec lesquels il est nécessaire d’apprendre à composer. “Il faut savoir que la plupart des ravageurs ont des prédateurs naturellement présents en Polynésie. Si on ne fait pas attention, on peut les tuer avec des traitements insecticides, alors qu’ils peuvent nous aider à lutter contre les ravageurs, si on les favorise. Ça permet de limiter l’usage d’insecticide et d’avoir moins de dégâts dans les cultures”, souligne Julie Grandgirard. L’objectif recherché est bien sûr de mieux produire, mais aussi plus sainement. “Le but, c’est d’être moins dépendant des importations pour produire des fruits et légumes de qualité en Polynésie française, en utilisant nos propres ressources et en réduisant l’utilisation de produits chimiques, qui coûtent chers et qui sont dangereux pour l’environnement, tout en appauvrissant les sols. Certes, ça demande du temps aux agriculteurs lors de l’aménagement des parcelles, en réservant des espaces de jachère ou avec des fleurs dans le cycle de rotation, mais ça vaut le coup. La tendance d’importation des pesticides est à la baisse. Il y a clairement une volonté des agriculteurs de changer les pratiques : certains arrivent dans une impasse avec des insectes qui deviennent résistants aux produits”, analyse la spécialiste.

Prochains rendez-vous

Que les agriculteurs intéressés se rassurent : d’autres sessions de formation similaires seront proposées entre juin et septembre, associées à la diffusion papier et web d’un livret détaillant toutes les données utiles à ce sujet. Les sept fermes de démonstration de Tahiti, Raiatea, des Tuamotu et des Marquises, accompagnées techniquement par PROTEGE, devraient également ouvrir leurs portes aux professionnels et aux scolaires des filières agricoles.  

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Alexandre Ynam, agriculteur à Faratea 

“Être autonome vis-à-vis des intrants

“Ça fait bientôt un an que j’exerce en tant que professionnel. Je fais du maraîchage sur sol vivant. Cet atelier m’intéressait tout particulièrement parce que j’ai déjà cette approche d’engrais verts. J’essaie de faire en sorte d’être autonome vis-à-vis des intrants. Ne plus utiliser de produits, c’est bénéfique pour les pollinisateurs et sur la structure du sol. Pour l’instant, j’en suis au stade de laisser la végétation spontanée que je coupe à ras et que je bâche avant de replanter, mais j’aimerais bien choisir des plantes utiles, comme on l’a vu. Mes productions poussent plus ou moins bien selon les parcelles, car avec cette technique, plus elles prennent de l’âge, mieux ça pousse, contrairement à l’agriculture conventionnelle, grâce à la décomposition naturelle des végétaux et à la participation des insectes”.

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Marcel Amaru, agriculteur à Taravao et Mataiea 

“Je pense à l’avenir
et à la santé des gens

“Au départ, c’est ma sœur qui m’avait convaincu de passer une formation de quatre mois sur l’agriculture bio, financée par PROTEGE, en partenariat avec la commune de Teva I Uta. J’ai commencé en tant que salarié sur une exploitation conventionnelle et je ne croyais pas au bio : la solution facile, ce sont les produits. Je passais mon temps à traiter contre les insectes. Ça a fini par me dégoûter. Je pense à l’avenir et la santé des gens : j’ai un petit garçon et je n’ai pas envie qu’il mange ça. La base, c’est d’avoir confiance en soi. Quand je me suis lancé à mon compte dans la production de taro avec le soutien de l’agriculteur Nelson Van Kam, j’ai appris qu’on pouvait déjà faire beaucoup juste avec une pelle, ce qui est pratique quand tu es limité dans tes investissements”.

Plus d’informations dans cette vidéo.