Ruby Moonlight, édité par “Au vent des îles”, salué par “Le Monde”

Écrit en vers et composé de 80 poèmes, le roman est un témoignage de l’histoire des communautés aborigènes.
Écrit en vers et composé de 80 poèmes, le roman est un témoignage de l’histoire des communautés aborigènes. (Photo DG)
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Dans Ruby Moonlight, publié par la maison d’édition polynésienne Au Vent des îles, Ali Cobby Eckermann revient sur l’impact de la colonisation en Australie dans les années 1880. Écrit en vers et composé de 80 poèmes, le roman est un témoignage de l’histoire des communautés aborigènes, stigmatisées par le gouvernement australien de l’époque. Ce roman “phénomène” d’Océanie a reçu de multiples récompenses ainsi qu’une critique littéraire écrite par Gladys Marivat dans le journal Le Monde.

Australie, 1869. Le gouvernement australien vient d’adopter l’Aboriginal Protection Act dans la colonie de Victoria, en Australie. C’est la première loi mise en place à l’encontre des communautés aborigènes. En effet, elle rend légal le retrait des enfants aborigènes à leurs parents autochtones. À partir de cette date, plus de 100 000 enfants métis seront placés de force dans des orphelinats, des internats, ou bien confiés à des missions chrétiennes ou à des familles d’accueil blanches. Ils sont appelés les “générations volées” d’Australie.

Cette iniquité sociale, c’est l’intrigue sur laquelle repose le roman en vers de Ali Cobby Eckermann, Ruby Moonlight. Originellement publié en 2012, il est aujourd’hui traduit en français par Mireille Vignol et édité par la maison d’édition polynésienne Au Vent des Îles. Saluée par la critique anglophone comme “un récit en vers libres au minimalisme envoûtant, convaincant et déchirant”, l’œuvre raconte le parcours de Ruby, une jeune aborigène, unique survivante du massacre de son clan, qui tente de survivre au sein d’une société qui stigmatise ses origines.

Ali Cobby Eckermann fait elle-même partie des “générations volées” d’Australie. Poétesse aborigène issue des peuples Yankunytjatjara et Kokatha, elle a mis plus de 30 ans à retrouver sa famille biologique. Son art littéraire s’inspire des mémoires déchues de ses confrères aborigènes, mais également de sa propre expérience personnelle. Femme de lettres qui œuvre pour les siens, elle fonde la première résidence d’écriture réservée à des auteurs aborigènes.

Au fil des 80 poèmes qui composent ce livre, le lecteur est plongé dans le bush de l’Australie du sud, au sein des traditions aborigènes, à une époque où le racisme contre ces communautés autochtones était en plein essor. Par les mots, l’autrice tente de guérir les traumatismes subis par les autochtones du pays pendants plusieurs décennies. Par la forme, elle s’inspire de la structure des contes aborigènes, racontés en plusieurs chapitres.

“Le vieil homme et sa femme parlementent avec les pies flûtistes”

le vieil homme et sa femme
parlementent avec les pies flûtistes

dans ce cercle de réunion
l’angoisse éraille les conciliabules

le reste de la tribu
attend dans l’ombre

leur foi dans le code tribal
absolue

ils observent en silence
prêts à fuir

la réunion vole en éclats
dans un tonnerre d’oiseaux

animaux étranges et hommes pâles
surgissent de la rivière

Ali Cobby Eckermann, Alerte, Ruby Moonlight.