Justice – Un papy de 70 ans, addict à la bière, condamné à 6 mois de prison ferme

Le prévenu a expliqué qu'il essayaiet d'arrêter de boire, mais "sans succès". (Photo arch. Damien Grivois)
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Un retraité de 70 ans, était jugé en comparution immédiate le 11 mai 2023 par le Tribunal de 1re instance de Papeete. Il avait été contrôlé positif à l’éthylotest deux jours plus tôt par les forces de l’ordre alors qu’il circulait en scooter. Déjà condamné six fois par la justice, à chaque fois pour ivresse au volant, il a été condamné à douze mois de prison, dont six mois avec sursis, et maintenu en détention.

Il est de ces audiences qui font de la peine tant les divers avertissements, sanctions, ou suivis médicaux prononcés par la justice, parfois à répétition, semblent inefficaces face aux addictions des prévenus. C’est le cas avec ce fragile retraité, cheveux et barbe grise, un coton dans l’oreille gauche, son audition est partielle.

Il comparaît après 48 heures de détention provisoire pour avoir, à nouveau, circulé ivre sur son scooter. À propos de sa consommation d’alcool, il déclare : “j’essaye d’arrêter, mais je n’y arrive pas.” Lorsque la présidente du tribunal lui demande ce qu’il faut faire pour l’aider, il réclame un traitement. Mais il n’y a pas de médicament, lui répond la présidente : “Y’a pas de solution magique, monsieur”.

Les contrôles, il connaît. Coup du sort, la petite maison qu’il habite seul sur un terrain qu’il partage avec sa sœur, est juste au-dessus d’un commissariat. Le président du tribunal rappelle son parcours alcoolisé. Condamné pour la première fois en 2011 pour une alcoolémie positive au volant d’une voiture, la même année son permis est annulé pour les mêmes raisons, puis c’est, de fait, pour conduite sans permis qu’il est une troisième fois condamné en 2012.

Ayant opté pour le deux-roues, les condamnations quasi-annuelles s’enchaînent, jusqu’à le conduire en prison en 2021. Il est retraité depuis une dizaine d’années, après une période d’invalidité suite à un accident lorsqu’il travaillait, autre coup du sort, à la Brasserie de Tahiti. Lors du dernier contrôle, fidèle à sa marque, ce sont bien des obus qui sont retrouvés dans le coffre de son scooter.

Lors des différents contrôles, les gendarmes décrivent un homme à la conduite hasardeuse qui sent fortement l’alcool. Une autre fois, ils parlent de l’élocution difficile d’un homme à la bouche pâteuse. Il roule parfois sans casque, car dit-il, “je viens de tout près, pas besoin de m’arrêter“. En voiture, en scooter, avec ou sans permis, les taux confirmés oscillent toujours entre 0,8 et 1,2 gramme d’alcool dans le sang.

“Son cas est totalement désespéré”

Pour la procureure, “les faits sont simples et décourageants”. “On lui a tendu la perche sept fois” dit-elle, entre deux soupirs d’exaspération. Le ministère public rappelle qu’une peine de prison ferme a déjà été effectuée, mais aussi que l’homme ne respecte pas ses obligations dans le cadre du sursis probatoire précédemment prononcé.

Le Service de probation et d’insertion professionnelle (SPIP) indique que l’homme ne vient pas à ses rendez-vous, notamment ceux au service d’addictologie pour traiter ses problèmes avec la bière. Face à tous ces manquements, la procureure ne semble pas touchée par l’âge et l’aspect fragile du prévenu, elle propose “une longue peine de prison qui pourrait faciliter le sevrage”, 30 mois ferme, car si le paka ou l’ice réussissent parfois à se retrouver derrière les barreaux, le pack de six, c’est plus ardu.

Son avocate veut tout faire pour éviter la cellule au petit papy. Elle rappelle que jamais il n’y eut d’accident, qu’à chaque contrôle, il est seul, “C’est à mettre à son crédit”. Elle propose d’autres solutions comme le placement sous bracelet électronique avec des horaires de sortie stricts ou la saisie de son scooter, mais le renvoyer en prison pour deux ans à son âge, comme le souhaite la procureure, c’est “prendre le risque qu’il n’en sorte jamais” conclut-elle.

Le tribunal le condamne à un an de prison, dont six avec sursis et maintien en détention. La peine de six mois de sursis prononcée en 2021 est révoquée, il part donc pour un an à Nuutania.