Le Parlement français valide la relance du nucléaire

Technique, le projet de loi simplifie les démarches afin de concrétiser l'ambition de bâtir six nouveaux réacteurs EPR et de lancer des études pour huit autres. Il est limité aux nouvelles installations situées en France dans des sites nucléaires existants ou à proximité.
Technique, le projet de loi simplifie les démarches afin de concrétiser l'ambition de bâtir six nouveaux réacteurs EPR et de lancer des études pour huit autres. Il est limité aux nouvelles installations situées en France dans des sites nucléaires existants ou à proximité. (Photo AFP)
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Le Parlement français a adopté définitivement, mardi 16 mai, le projet de loi de relance du nucléaire afin de concrétiser l’ambition du président Emmanuel Macron de bâtir six nouveaux réacteurs EPR à l’horizon 2035.

Pour cette adoption définitive, il manquait un ultime vote de l’Assemblée nationale: une semaine après un large soutien du Sénat, les députés ont voté le texte par 399 voix contre 100, la droite, l’extrême droite et les communistes votant pour. Les écologistes et la gauche radicale se sont prononcés contre et les socialistes se sont abstenus.

Technique, le projet de loi simplifie les démarches afin de concrétiser l’ambition de bâtir six nouveaux réacteurs EPR et de lancer des études pour huit autres. Il est limité aux nouvelles installations situées en France dans des sites nucléaires existants ou à proximité.

Dans le sillage du Sénat, les parlementaires ont levé un “verrou” introduit en 2015 sous le président socialiste François Hollande.

Le texte supprime ainsi l’objectif d’une réduction à 50% de la part de l’énergie nucléaire dans le mix électrique français d’ici à 2035, ainsi que le plafond de 63,2 gigawatts de capacité totale de production nucléaire autorisée.

Sanctions durcies

Il durcit parallèlement les sanctions en cas d’intrusion dans les centrales, avec une peine portée d’un à deux ans de prison et de 15.000 à 30.000 euros d’amende.

Après les craintes de coupures de courant cet hiver sur fond de guerre en Ukraine, la ministre français de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher loue un texte “majeur pour bâtir l’indépendance énergétique de notre pays”, qui permettra “de produire une énergie abondante, compétitive et décarbonée”.

Dans la matinée, elle avait réuni à Paris une quinzaine de représentants de pays européens pro-nucléaires, afin de peser dans la “stratégie énergétique” de l’Union européenne.

Le Réseau “Sortir du nucléaire” et l’ONG Greenpeace France ont “dénoncé le passage en force du gouvernement (français) sur un projet de relance du nucléaire hors-sol face aux impératifs climatiques auxquels il prétend répondre”.

A l’Assemblée, écologistes et députés de la gauche radicale ont ferraillé contre le projet de loi, en insistant sur la “dangerosité” du nucléaire et ses “tonnes de déchets”.

Ils sont les seuls à militer pour une sortie de l’atome et le passage à 100% d’énergies renouvelables à partir de 2045.

La députée écologiste Julie Laernoes a dénoncé le “matraquage effréné pour faire oublier à la population les dangers du nucléaire et ses déboires technologiques et financiers”.

Mais douze ans après la catastrophe nucléaire de Fukushima au Japon, les écologistes français reconnaissent avoir perdu du terrain dans leur “bataille culturelle” contre l’atome, à l’image des sondages qui montrent une adhésion grandissante au nucléaire.

Arrêt en Allemagne

La droite soutient, elle, le texte tout en critiquant “le tête-à-queue spectaculaire” d’Emmanuel Macron sur la question.

La crise énergétique déclenchée par la guerre en Ukraine a relancé le nucléaire, comme alternative aux énergies fossiles, dont le gaz russe.

La relance du nucléaire en France survient alors que l’Allemagne a, elle, mis à l’arrêt ses trois derniers réacteurs mi-avril.

La construction des EPR en Finlande, entré en service en avril, et à Flamanville (France) ont connu des années de retard et des énormes surcoûts qui ont été l’une des principales cause du démantèlement industriel d’Areva, plombé par des pertes de plusieurs milliards d’euros.

Le monde est passé de 441 réacteurs en fonctionnement en 2002, son maximum, à 422 à fin 2022, selon l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), qui anticipe jusqu’à plus du doublement de la puissance nucléaire mondiale installée d’ici à 2050.

Les Etats-Unis restent la première puissance nucléaire civile, avec 92 réacteurs. Leur âge moyen croît et seuls deux sont en construction. Mais le président américain Joe Biden y croit pour atteindre en 2035 100% d’électricité “propre” et le gouvernement compte soutenir la filière.

La France, avec 56 réacteurs, reste le pays le plus nucléarisé par habitant.

AFP