Washington signe un pacte de sécurité avec la Papouasie-Nouvelle Guinée

Le Premier ministre de Papouasie Nouvelle-Guinée James Marape (deuxième à droite), le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken (au centre) et les leaders des îles du Pacifique ou les représentants de Nouvelle-Zélande et de l'Australieposent à l'occasion de l'ouverture du sommet USA/Iles du Pacifique à Port Moresby.
Le Premier ministre de Papouasie Nouvelle-Guinée James Marape (premier rang à droite), le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken (au centre) et les leaders des îles du Pacifique ou les représentants de Nouvelle-Zélande et de l'Australie posent à l'occasion de l'ouverture du sommet USA/Iles du Pacifique à Port Moresby. (Photo AFP)
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La Papouasie-Nouvelle Guinée a signé ce lundi 22 mai un pacte de sécurité avec Washington donnant aux forces américaines l’accès aux ports et aéroports de ce pays du Pacifique, où les Etats-Unis cherchent à contrer l’influence de la Chine. Washington a réussi un autre coup diplomatique en signant également le renouvellement de son pacte stratégique avec l’île de Palau.

“Nous passons d’une relation générique… à une relation spécifique avec les Etats-Unis. Un accord de coopération en matière de défense a été conclu”, a annoncé le Premier ministre de Papouasie-Nouvelle Guinée, James Marape, aux côtés du secrétaire d’Etat américain Antony Blinken, avant un sommet des îles du Pacifique.

L’accord a été signé avant l’ouverture de la réunion du Forum Etats-Unis-Iles du Pacifique réunissant les dirigeants de 14 Etats insulaires du Pacifique Sud à Port Moresby.

Parlant d’un accord “totalement transparent”, M. Blinken a précisé que les deux pays pourraient monter à bord des navires l’un de l’autre, partager leur expertise et “mieux patrouiller” ensemble en mer.

Cela n’a “rien à voir avec un autre pays. Il s’agit de notre relation avec les îles du Pacifique et de la vision que nous partageons pour cette région”, a-t-il ajouté, alors que sans être nommée, la Chine est au cœur des préoccupations stratégiques américaines.

Washington a d’ailleurs réussi un autre coup diplomatique en signant lundi le renouvellement de son pacte stratégique avec l’île de Palau.

Signe des rivalités grandissantes dans le Pacifique Sud, M. Blinken n’était pas le seul représentant d’une grande puissance à Port Moresby, placé sous haute sécurité.

Il a été précédé quelques heures auparavant du Premier ministre indien Narendra Modi, premier chef de gouvernement indien, à se rendre en Papouasie-Nouvelle Guinée.

“Nous soutenons une région Indo-Pacifique libre, ouverte et inclusive. Nous respectons la souveraineté et l’intégrité de tous les pays”, a lancé M. Modi aux leaders de la région.

“Jeux géopolitiques” dans le Pacifique

L’accord américain signé avec la Papouasie-Nouvelle Guinée étend la capacité des Etats-Unis à se déployer militairement dans la région. Il leur donne un point d’appui le long des routes maritimes vers l’Australie et le Japon.

La Chine a signé en 2022 un pacte secret avec les îles Salomon voisines qui autorise Pékin à déployer des troupes dans ce pays.

Les Etats-Unis redoutent qu’avec un point d’ancrage militaire chinois dans le Pacifique Sud, la Chine ne déborde sa base navale de Guam, et ne complique la défense de Taïwan en cas d’invasion chinoise.

“Port Moresby n’est plus l’avant-poste diplomatique endormi qu’il a pu être”, analyse Gordon Peake au centre pour l’Asie de l’Institut des Etats-Unis pour la paix (Usip). “Même si la Chine n’est mentionnée nulle part dans le document, elle est en filigrane de cet approfondissement des relations entre les Etats-Unis et la Papouasie-Nouvelle Guinée”, dit-il.

M. Marape a toutefois précisé que cet accord ne l’empêcherait pas de conclure des alliances similaires avec d’autres pays, y compris la Chine.

Il avait aussi indiqué jeudi dernier que la Papouasie-Nouvelle Guinée pourrait en échange mieux combattre les activités illégales en haute mer grâce à un accès aux satellites américains de surveillance.

La porte-parole du ministère chinois des affaires étrangères Mao Ning, a réagi lundi à l’accord, en disant que Pékin ne s’opposait pas à des “échanges normaux” entre les nations, invitant à se méfier de l’utilisation de la coopération “comme prétexte à des jeux géopolitiques” dans le Pacifique.

L’accord américano-papouasien a provoqué des manifestations d’étudiants dans plusieurs universités, selon le Post Courier, le plus grand journal de Papouasie-Nouvelle-Guinée.

L’accord alimente la crainte que le pays ne donne trop de libertés aux forces américaines à certains points d’accès clés du pays.

A Port Moresby, des dizaines d’étudiants se sont rassemblés à l’université de Papouasie-Nouvelle-Guinée dans la soirée, certains mettant le feu à des pneus. Des véhicules ont été caillassés, selon un agent de sécurité privé de l’université.

En plus de cet accord, les Etats-Unis ont promis à la Papouasie un financement de 45 millions de dollars pour lutter contre le crime organisé, le changement climatique, le virus du sida et des équipements de protection pour son armée, selon le département d’État américain.

Joe Biden, dont l’oncle est mort en Papouasie-Nouvelle Guinée au cours de la deuxième guerre mondiale, devait initialement devenir lundi le premier président américain à se rendre dans ce pays du Pacifique-Sud.

Il a dû annuler son voyage en raison des négociations sur la dette publique des Etats-Unis et s’est fait remplacer par M. Blinken.

AFP