
Alors qu’elle est conseillère à la mairie de Pirae et représentante à l’assemblée de Polynésie française depuis 2013, Virginie Bruant rejoint le gouvernement Fritch en février 2022 et devient ministre du Travail, des Solidarités et de la Formation, en charge de la condition féminine, de la famille et des personnes non autonomes. Son mandat a récemment pris fin après la victoire du Tavini aux dernières élections territoriales. La Dépêche de Tahiti est allée à la rencontre de l’ex-ministre qui a accepté de revenir sur son court mandat.
“Intense !”. C’est ainsi que l’ex-ministre qualifie son année et demi passée au gouvernement, à la tête de ses différents portefeuilles. En effet, la durée d’exercice entre sa nomination et les élections territoriales de 2023 était courte.
Malgré tout, face à ce manque de temps alloué entre sa prise de fonction et les dossiers importants à rapidement gérer, sans oublier l’échéance électorale, son passé d’élue à Tarahoi l’aide : “Arrivant de l’assemblée, je connaissais les rouages de l’administration, des textes, de la politique. Ca m’a aidé a être opérationnelle rapidement.”
Virginie Bruant défend son bilan : “on est satisfait du travail accompli en si peu de temps.” Concernant la gestion de ses différents portefeuilles, l’ex-ministre se dit satisfaite de la mise en application de la loi sur la protection de l’emploi local, de la réforme menée sur l’apprentissage ou bien encore de la dématérialisation des chèques services aux particuliers via l’application Titeti Ohipa, qui sert notamment à lutter contre le travail illégal.

Condition animale : enfin une prise de conscience du Pays ?
La création du portefeuille de la condition animale est également une réussite pour l’ex-ministre. Il semble d’ailleurs que ce portefeuille perdurera avec le nouveau gouvernement. Lors de la passation des dossiers entre Virginie Bruant et Eliane Tevahitua ce lundi 22 mai, la nouvelle ministre Tavini a souligné l’importance que le Tavini entendait accorder à la condition animale.
Mais il y a aussi un “sentiment d’inachevé ” que concède l’ex-représentante à l’assemblée. Notamment sur les mesures d’aide à l’emploi. “On voulait revoir l’ensemble des mesures d’aide à l’emploi qui ont vraiment besoin d’être modernisées, d’être revues en profondeur” indique-t-elle. “De ne pas avoir fait cela est une déception. Mais le temps nous était compté.”
Autres dossiers au goût d’inachevé : le projet d’ouverture d’une nouvelle école des métiers médico-sociaux dans l’institut Mathilde Frébault ou encore le travail entamé par ses équipes sur le passage à la semaine de quatre jours. La modernisation et la simplification du code du travail étaient également des gros projets en cours pour l’ex-ministre et ses équipes.
“La TVA sociale était une vraie nécessité“
Lorsqu’il lui est demandé d’expliquer les raisons de la défaite du Tapura aux dernières territoriales, la réponse de Virginie Bruant est claire : “La défaite est due à un ensemble d’éléments. Sur le terrain, trois points remontaient : le mariage à Teva I Uta, l’obligation vaccinale et la TVA sociale. Ces points revenaient à tous les niveaux de la société, dans toutes les classes sociales. Il y avait aussi une envie de changement de la part de la population.”
Hormis ces points, selon Virginie Bruant, le bilan du Tapura est bon et les résultats aux élections auraient pu être différents. “Objectivement, le bilan du Tapura au pouvoir est bon. Dans les chiffres en 2013, il y avait 0 franc de réserve. Le Tapura laisse le Pays avec 21 milliards de francs de réserves” explique l’ex-membre du gouvernement Fritch. “On a réussi à reconstituer les réserves du pays. On pouvait commencer à voir l’avenir de façon sereine.(…) Notre campagne a été honnête sur les chiffres.“
Point particulièrement sensible : la TVA sociale. Virginie Bruant estime que cette mesure impopulaire est peut-être arrivée à un mauvais moment, mais elle assure qu’elle était néanmoins indispensable. “La TVA sociale était une vraie nécessité. Il y a eu un amalgame avec l’inflation mondiale, des éléments exogènes, plus cette TVA sociale, qui n’est peut être pas arrivée au bon moment” déplore-t-elle. “Le raccourci était de dire que les prix ont augmenté à cause de la TVA sociale. On sait que l’augmentation des prix n’est pas due qu’à la TVA sociale. Si on veut pouvoir continuer à payer les retraites et les prestations familiales, il faut bien trouver des moyens.”
Prendre du temps en famille
Concernant ses projets futurs, Virginie Bruant déclare qu’elle souhaite désormais prendre du temps pour elle et sa famille. Elle reste militante Tapura et conseillère municipale de la commune de Pirae jusqu’en 2026. Elle indique, avec une pointe d’humour, avoir remis son Curriculum Vitae à jour mais précise que pour le moment, rien n’est prédéfini et qu’elle se laisse le temps de la réflexion.
Enfin, interpellée sur le travail qui attend le nouveau gouvernement, Virginie Bruant l’invite prendre ses responsabilités sans tarder : “Je pense que les attentes de la population sont pressantes. Les gens attendent beaucoup sur le coût de la vie, l’inflation. Le gouvernement ne pourra pas attendre un an et demi avant d’agir.“
• Lors du second tour des territoriales, et suite à l’alliance Tapura/Amuitahiraa, le nom de l’ex-ministre disparait de la troisième position sur la section une des îles du Vent au profit de la compagne de Gaston Flosse, Pascale Haiti, qui est de fait aujourd’hui représentante à l’assemblée. Comment a-t-elle vécu cette éviction ? Virginie Bruant corrige : “au nom de l’autonomie, j’ai proposé de laisser ma place. J’estimais qu’à un moment donné, tu dois prendre tes responsabilités pour mettre tout en œuvre pour faire gagner ton parti.“
• Questionnée sur l’alliance “in extremis” entre le Tapura d’Edouard Fritch et le Amuitahiraa de Gaston Flosse à l’entre deux-tours des territoriales, Virginie Bruant estime qu’elle était nécessaire pour permettre aux autonomistes de contrer les indépendantistes. Pourquoi, selon elle, les partis A Here Ia Porinetia de Nicole Sanquer et Nuihau Laurey, ainsi que le Ia Ora te Nuna’a de Nicole Bouteau et Teva Rohfritsch n’ont-ils pas rejoint la plateforme autonomiste pour faire bloc face au danger séparatiste ? “Il faut leur demander…” tranche Virginie Bruant.