Réforme des retraites – “Tant que l’arbitre n’a pas sifflé la fin du match, rien n’est perdu”

Thierry Barrere, secrétaire général de l'UNSA Education.
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Les syndicats UNSA Education, FSU et FO se sont rassemblés ce mardi matin devant le Monument aux morts à Papeete pour manifester contre la réforme des retraites. Il y avait plus de drapeaux et de banderoles que de participants pour cette 14e mobilisation. 

Cela fait 5 mois que les opposants manifestent en métropole et en Polynésie mais rien ne semble pouvoir infléchir le gouvernement central. La réforme a été adoptée en avril après l’utilisation de l’article 49.3 et est désormais promulguée pour être appliquée à compter du 1er septembre 2023. 

Par ailleurs, le camp présidentiel entend continuer à avancer, comme en témoigne la publication dimanche au Journal officiel des deux premiers décrets d’application, dont celui portant progressivement l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans.

La proposition de loi du groupe Liot (Libertés, Indépendants, Outre-mer, Territoires) abrogeant la principale disposition de la réforme des retraites doit en principe être débattue jeudi dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale. Mais sa présidente Yaël Braun-Pivet devrait chercher à empêcher un vote, en s’appuyant sur l’article 40 de la Constitution qui stipule que toute proposition de loi parlementaire ne doit pas créer de charge financière nouvelle pour l’Etat.

Thierry Barrere, secrétaire général de l’UNSA Education

Thierry Barrere, secrétaire général de l’UNSA
Education.

La loi devrait être appliquée au 1er septembre. A quoi sert cette 14e manifestation ?

“C’est comme au football : tant que l’arbitre n’a pas sifflé la fin du match, rien n’est perdu. On motive les troupes. Nous sommes là contre cette réforme des retraites et pour le retour de la retraite à 62 ans. Cela malgré la promulgation des décrets d’application la semaine dernière qui est une provocation envers les organisations syndicales et les représentants du personnel. Nous représentons le peuple, c’est quand même les deux tiers de la population qui est contre cette réforme. Nous sommes contre cette réforme et nous l’exprimons aujourd’hui.”

Qu’attendez-vous concrètement ? 

“Jeudi, la proposition de loi du groupe Liot (Libertés, Indépendants, Outre-mer, Territoires) repasse à l’Assemblée nationale. Les députés ont retiré en commission l’article sur les 62 ans. Cette loi peut être à nouveau amendée ; on espère que l’assemblée puisse réintroduire l’article sur les 62 ans. C’est la voie légale mais en tous cas, la rue dit non. Il faut se lever. L’âge de la retraite, c’est un projet de société.” 

La mobilisation est-elle assez forte en Polynésie ? 

“C’est un point qui me surprend, le privé ne se sent pas du tout concerné. Ici en Polynésie, on ne va pas pouvoir demeurer une exception à la République pendant longtemps même si le Pays est compétent pour fixer l’âge de la retraite. Si on se souvient bien, on avait dit non aux 62 ans mais ils sont arrivés quelques temps après. Aujourd’hui, il ne faut pas se voiler la face, un jour on arrivera aux 64 ans, on ne peut pas rester une exception à la République. Il faut peut-être que les autres collègues du privé et de la Fonction publique territoriale se mobilisent. Demain, ils seront concernés. D’autant que l’espérance de vie est moindre en Polynésie.”

Y aura-t-il d’autres mobilisations ? Certains parents d’élèves se lassent de devoir trouver des solutions lors des jours de grève… 

“On ne fait d’omelette sans casser des œufs. La grève est un droit constitutionnel. Nous prenons ce droit et on s’en excuse auprès des parents. Aujourd’hui, c’est nous qui luttons mais demain, ce sera peut-être eux.”

France : faible mobilisation pour les retraites en mode fin du match

Le sursaut n’a pas eu lieu pour ce qui pourrait être la dernière journée d’action à l’initiative de l’intersyndicale. Le ministère de l’Intérieur a compté 281 000 manifestants en France, et la CGT “plus de 900 000”, soit les chiffres les plus faibles depuis le début du mouvement le 19 janvier.

“Le match est en train de se terminer, qu’on le veuille ou non, avec cette inconnue de ce qui se passera jeudi à l’Assemblée”, a reconnu mardi Laurent Berger. Le numéro un de la CFDT a appelé les syndicats à “peser dans le rapport de force à venir” sur d’autres sujets comme les salaires ou les conditions de travail.

“Nous voulons de vraies négociations”, a prévenu à ses côtés la numéro un de la CGT, Sophie Binet. Soulignant que “les retraites resteront toujours un combat”, elle a mis en avant l’objectif de “gagner des avancées concrètes”. “L’intersyndicale va rester unie”, a-t-elle ajouté, jugeant “probable qu’il y ait d’autres manifestations au vu de la colère dans le pays”.

Une colère que “ce mouvement a permis d’exprimer”, confirmait à Lille Michel Moulbach, ouvrier en bâtiment de 60 ans. Mais “il faut être réaliste”, ajoutait ce militant cégétiste, à l’approche des vacances “ça va être difficile de ne pas faire une pause”.

En dehors de quelques actions coup de poing – intrusion au siège du comité d’organisation des JO-2024, coupure d’électricité en banlieue parisienne – les perturbations sont restées limitées, notamment dans l’éducation avec à peine plus de 5% de profs grévistes, selon le ministère.

Dans les transports, la SNCF a fait circuler neuf trains sur dix en moyenne, tandis qu’un tiers des vols ont été annulés à l’aéroport d’Orly.

AFP