Daniel Pifao a toujours vécu à Tautira, face à la plage de Tatatua, entre mer, rivière et montagne. Retraité de l’hôtellerie-restauration, il a exercé en zone urbaine, mais aussi à l’hôtel Puunui de Toahotu. À 64 ans, il rend hommage à sa lignée de conteurs avec le livret Légendes de Tautira, édité par la Direction de la Culture et du Patrimoine et publié en mars dernier. “Toutes ces légendes m’ont été transmises par mon grand-père paternel, Hitore Pifao, qui était orateur, diacre et maître accoucheur dans le village. Après le dîner, il aimait bien nous regrouper, les enfants, pour nous raconter une légende différente chaque soir, en tahitien. On était déjà dans le bain petits : Tautira est chargé d’histoires et de légendes !“, se souvient-il au sujet de cet héritage familal.
Dix légendes avec croquis
Sans surprise, son héros favori est le célèbre Hono’ura. “Il est allé partout, à Papara, à Anaa et jusqu’à Honolulu. Il a accompli plein d’exploits. Sa grotte est juste derrière la montagne de Tahuareva. À l’époque, le chef du village, Ta’ihia, a fait construire une grande pirogue. Il a appelé la population pour la transférer de la vallée Ata’aroa vers la mer, mais ça n’a pas suffi, donc c’est Hono’ura, en tant que géant, qui l’a déplacée”, raconte Daniel Pifao.
Sur les dix légendes de l’ouvrage, trois sont consacrées à Hono’ura. On retrouve également Turi, descendant du dieu Ta’aroa et du chef ‘Oro, et d’autres légendes en lien avec des sites emblématiques de Tautira. “Ça n’a pas été facile de choisir. Ce qui était important pour moi, c’était de commencer par présenter mon village avec la signification de Tautira, puis de parler de mon ‘aito et d’autres légendes vers le Fenua ‘Aihere. Ce n’est pas fini : il y en a d’autres ! J’ai déjà mis par écrit dix autres légendes à la campagne, et je pourrais faire pareil concernant la vallée”, explique l’inépuisable conteur, qui signe aussi les croquis intérieurs. “J’écris et en même temps je dessine à main levée de façon instinctive. C’était important pour moi de retranscrire tout ce que j’avais en mémoire”.
Immortaliser et partager
Passer de l’oral à l’écrit est une façon d’immortaliser l’héritage ancestral. “Avant, tout était gardé dans la famille, surtout les écrits anciens. L’édition papier du livre est destinée aux enfants dans les écoles. J’ai fait en sorte que la lecture soit accessible au plus grand nombre, avec des textes par trop longs“, précise Daniel Pifao. Dans cette optique de partage, chaque légende est proposée en tahitien et en français, traduction pour laquelle l’auteur a notamment été aidé par son fils, Ariihoarai Pifao. “C’est une joie et un privilège d’avoir pu faire ce livre. Je remercie l’ancien ministre Heremoana Maamaatuaiahutapu et le service du patrimoine. C’est une première pour Tautira aussi !”, conclut-il, le cœur léger. Des remerciements et une reconnaissance qu’on peut retourner à Daniel Pifao pour ce cadeau offert à son village et à toute la Polynésie.
La version numérique de l’ouvrage est aussi accessible sur le site de la Direction de la Culture et du Patrimoine.