
L’homme de 29 ans qui comparaissait pour le viol de sa demi-sœur de 15 ans, sous la menace d’un couteau de cuisine, a été reconnu coupable par la cour d’assises et son jury populaire, le 16 juin 2023, à 15 années de réclusion criminelle. Lors de la deuxième journée de son procès, il s’est de nouveau borné à nier les faits, avant de menacer de se pendre s’il était condamné.
Après les tentatives infructueuses et grossières de la mère de l’accusé de nier ou minimiser les faits reprochés à son fils la veille, cette deuxième journée s’ouvre avec le témoignage du gendarme qui a dirigé l’enquête et entendu la mère et la victime lors de sa première plainte.
Il a confirmé avoir eu les détails de la nuit des faits par la mère, qui hier peinait sciemment à les confirmer. Il indique par ailleurs savoir que les enfants ont été “baignés dans un milieu très alcoolique”, et que selon l’enquête, “l’accusé faisait peur à tout le monde”.
La mère est ensuite rappelée à la barre par la Présidente de la cour, qui lui demande sans fioriture : “Vous avez retrouvé la mémoire ?” La réponse est oui. Son fils lui a bien fait comprendre qu’il avait eu un rapport sexuel avec sa petite sœur, une petite sœur qui lui a bien avoué son viol.
Il n’y a plus à présent que l’accusé qui se borne à nier les faits, même le rapport consenti qu’il a reconnu ou évoqué à chaque étape de la procédure. Finalement, il n’y a que lors de ces deux journées de procès qu’il aura nié.
Il va maintenant jusqu’à dire que c’est sa mère qui ment “pour couvrir sa petite sœur” car elle est mineure. La mère, qui avait hier été sommée par une grande sœur “de dire la vérité”, est maintenant celle qui, à plusieurs reprises, supplie son fils de faire de même en s’adressant directement à lui. “Dis la vérité ! Rappelle-toi, tu m’as réveillée pour me dire”.
La Présidente de la cour, qui tout au long du procès a su garder un sang-froid délicat et une certaine bienveillance à l’égard d’un prévenu pourtant excessif, tente alors de le relancer subtilement pour qu’il admette les faits, sans succès. Pourtant désormais face à lui les gendarmes, la victime, la grande sœur, un psychologue et sa propre mère confirment d’un côté le récit de la jeune fille sur le drame, de l’autre la manière dont l’accusé a, avant son procès, toujours reconnu avoir couché avec sa sœur, consentante selon lui.
L’expert psychiatre qui développe son analyse, explique qu’elle a rencontré un homme qui estime être la seule victime dans l’affaire. Il ne manifeste pas, selon elle, de remords ni de regrets. Le jeune âge de la victime ou encore leurs liens familiaux n’ont aucune importance pour lui.
L’expert précise que malgré des défaillances certaines à appréhender le monde qui l’entoure, l’homme n’a pas de maladie mentale ni de trouble psychique qui peuvent le faire sortir de l’emprise de la loi. Selon les tests effectués, elle rapporte également un risque de récidive très élevé.
“Elle n’est pas née sous une bonne étoile”
Après la synthèse de l’horreur quasi-permanente que la victime a subi durant son enfance, l’avocat de la jeune fille demande à la cour, particulièrement aux jurés, d’oublier les lumières de la salle d’audience. Il veut qu’ils s’imaginent dans la noirceur de cette chambre, à 1h30 du matin, face au long couteau qu’un homme que l’on sait potentiellement dangereux tient dans la main. Il estime que l’accusé, en répétant qu’il n’a rien fait, s’accable, avant d’inviter la cour “à balayer les dénégations de Monsieur, qui est coupable”.
L’avocate générale salue avant tout le courage de la jeune fille de 18 ans aujourd’hui, qui a “tenu bon” et toujours dit la vérité, selon elle, malgré la confusion que l’accusé à essayer de répandre. “Un homme qui a tourné autour de la vérité sans oser la dire”.
Elle aussi s’adresse aux jurés, et leur demande de conclure à l’évidence qu’il y a bien eu un rapport sexuel non consenti ce soir-là, une lame tranchante posée sur le ventre. Pour l’avocate générale : “Remettre en cause le consentement n’a aucun sens”. Elle requiert douze ans de réclusion.
L’avocat de la défense admet d’emblée être dans une position délicate face à des faits non reconnus par son client. À propos de l’enfance de la victime, mais aussi de l’accusé, il déclare : “J’ai rarement vu des histoires aussi épouvantables que celle-là”.
Si la grande majorité des acteurs qui ont pris part au débat ont regretté l’attitude de l’accusé pendant deux jours, son avocat préfère pointer du doigt quelques incohérences de la victime durant certaines auditions. Il parle notamment d’autres viols évoqués par la jeune fille, qu’elle avait finalement démentis.
Lui croit la vérité de son client, l’accusé n’a pas touché sa sœur. Il plaide la relaxe. Pour ses derniers mots, l’accusé impatient de rentrer à Nuutania répète : “Que des mensonges…”
L’homme déjà lourdement scarifié, car il ne supporte pas l’enfermement et la contrainte, fait ensuite un chantage au suicide qui semble tristement sincère en s’adressant à la Présidente de la cour qu’il tutoie une dernière fois : “Si tu me donnes 12 ans, je suis obligé d’aller sur la corde“. Un détenu qu’il faudra incontestablement surveiller, puisqu’il est condamné à 15 ans de réclusion.
Compte-rendu d’audience Y.P