Du fa’a’apu au verre chez Roina et Éric Coppenrath

Fa'a'apu et jus Hitia'a Eric et Roina Coppenrath
Le couple et une employée sur son point de vente à domicile, à Hitia'a (Photos : ACL/LDT).
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Au PK 34,500 côté montagne, à Hitia’a, c’est une oasis où l’on peut faire le plein de vitamines sur la route de Papeete ou de Taravao. Roina et Éric Coppenrath, 42 et 40 ans, ont construit leur stand de jus de fruits frais en 2020, en complément des deux autres enseignes familiales implantées à Pirae et Papeete.

Comme son père, Éric Coppenrath mise sur l’agrotransformation pour valoriser ses productions agricoles qui s’épanouissent sur le plateau voisin. “Je cultive des noix de coco, des ananas, des bananes, des citrons, des pamplemousses, des fruits de la passion, des papayes, que des fruits locaux, car le souci sur Hitia’a, c’est que nous avons une forte pluviométrie, donc faire du maraîchage, c’est compliqué”, explique-t-il.

Connue dans le domaine de l’élevage porcin, la famille a su se diversifier et mettre à profit ses multiples savoir-faire. “Les effluents des cochons sont valorisés par mon père et mon frère. Ils font de l’engrais sous forme de compost avec de la bourre de coco broyée pour enrichir les sols”, poursuit Éric Coppenrath. Chaque lundi et jeudi, c’est jour de cueillette avec les sept salariés de l’exploitation et ce sont des bacs garnis de fruits à maturité qui arrivent au bar à jus.

Roina à la transformation

En dehors de l’eau de coco vendue en magasin, l’essentiel de la production est valorisé sur place. “On propose différents jus de fruits et de la citronnade aux fruits de la passion. On a de bons retours. Ça fait plaisir et ça nous motive à continuer !”, confie Roina Tautu-Coppenrath, assistée de neuf employés, dont Teurihei sur le stand de Hitia’a.

Produire et transformer, toute la famille y croit. Si le père d’Éric Coppenrath a ouvert la voie, sa sœur est aussi dans le métier, spécialisée dans la production de taota à base de manioc. “C’est une valeur ajoutée par rapport au produit brut, qui nous permet d’avoir un gain supplémentaire, de développer l’activité et de créer des emplois. À Hitia’a, on passe 300 à 400 kilos de fruits par semaine, et à Pirae, c’est 4 à 5 tonnes, vu qu’il y a plus de passage. Mais on tient à conserver ce petit stand chez nous, où il n’y a pas beaucoup de commerces”, remarque-t-il. Travailler les produits locaux suppose également de s’adapter au rythme des saisons.

D’autres points de vente en projet

“Aux stands ou à la foire agricole, depuis mes débuts en 2008, la demande en jus de fruits frais a toujours été forte”, se souvient Éric Coppenrath. L’agriculteur jongle donc entre prêts bancaires et aides du Pays pour développer son activité, qui nécessite d’investir dans des équipements coûteux.

L’an dernier, le couple a acquis deux roulottes tractées dans l’ambition de monter d’autres points de vente à Papeari et à Papara. “Notre chance, au départ, ce sont les terres et l’activité démarrée par mon père. Le message qu’on aimerait adresser au Pays et au nouveau gouvernement, ce serait de faciliter l’accès à la terre et aux terrains domaniaux pour l’installation des jeunes agriculteurs. Je leur conseille d’aller vers l’agrotransformation, parce que c’est une rentrée d’argent supplémentaire, et aussi d’essayer d’atteindre le client final directement, sans intermédiaire”, suggère Éric Coppenrath.

Pour y parvenir, l’agriculteur et chef d’entreprise peut compter sur ses capacités en matière de gestion acquises au cours de ses études. La transmission reste une valeur familiale forte, des six enfants du couple jusqu’aux stagiaires qui sont régulièrement accueillis en production agricole ou en transformation. Un bel exemple de réussite qui donne envie de consommer toujours plus local pour soutenir les entrepreneurs du Fenua.

De père en fils

Fa'a'apu et jus Hitia'a Eric et Roina Coppenrath
« Mon papa, c’est le plus grand bosseur que je connais ».

Éleveur et agriculteur, Brice Coppenrath est une figure emblématique de Hitia’a O Te Ra. À 66 ans, la retraite ne semble pas d’actualité. “Je fais ce métier depuis 1977. Le fait de ne pas réussir à vendre toute ma production, c’est ce qui m’a motivé à passer à la transformation. Je me suis spécialisé dans le pomelo, un des rares agrumes qui n’est pas sensible aux maladies, qui est facile d’entretien et résistant au vent. Aujourd’hui, on produit environ 1.000 bouteilles de pomelade par semaine. On ne devient pas millionnaire comme ça, mais je ne regrette pas : la satisfaction, c’est surtout de faire vivre du monde dans une bonne entente”, confie-t-il.

Croisé ce matin-là, Brice Coppenrath revenait d’une exploitation agricole de Taravao, qu’il soutient bénévolement, pour rejoindre sa pelle mécanique en vue de planter des taro à la faveur de la pleine lune. S’il a transmis à ses enfants ses talents de producteur, il leur a aussi inculqué le sens du commerce. “Je les ai habitués à vendre des fruits en bord de route et dans les foires agricoles pour être à l’aise devant les clients. Dans le métier, on s’entraide, mais chacun doit tracer sa route !”, considère-t-il. Une source d’inspiration inépuisable pour Éric Coppenrath, qui ne cache pas son admiration. “Mon papa, c’est le plus grand bosseur que je connais. Tant qu’il y a un rayon de soleil, il peut travailler”.