Justice – Une tentative de parricide clôture les assises

Un homme de 34 ans comparait pour tentative de meurtre d'un ascendant face à la cour d'assises les 19 et 20 juin 2023. (Photo YP)
(Photo : Archives LDT)
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Un homme de 34 ans comparait pour tentative de meurtre d’un ascendant face à la cour d’assises les 19 et 20 juin 2023. Reconnu schizophrène en 2006, l’homme dont la famille peine à gérer les crises, avait donné plusieurs coups de couteau à son père après s’en être pris à un adolescent du quartier, en mai 2021. La cour va devoir décider si son discernement au moment des faits était aboli ou altéré, ou bien si son état psychologique lui permet d’être ordinairement jugé.

L’accusé est connu dans le quartier pour être un peu dérangé, avoir souvent son short porté trop bas, mais il n’a globalement pas la réputation d’un homme dangereux ou incontrôlable. Ses crises sont pourtant fréquentes selon ses parents. Il se gifle ou se mutile, parle tout seul ou pousse parfois des cris contre des personnes imaginaires, victime d’hallucinations visuelles et auditives.

Il est diagnostiqué schizophrène à tendance paranoïde en 2006, puis est placé sous tutelle en 2011. Lorsqu’il est en crise, son père ne cache qu’il en vient parfois aux mains pour le stopper ou le maîtriser. Il avoue également brandir parfois la menace de l’hospitalisation pour que l’accusé se calme. Une méthode “à la dure” qui ne semble pas porter ses fruits.

C’est la deuxième fois que ce père de 58 ans, infirmier, est victime de coup de couteau par son fils. Le jeune homme a aussi déjà menacé de découper sa mère. Il a connu quatre hospitalisations psychiatriques et a été légèrement condamné à deux reprises. Il a changé de traitement autant de fois que de médecin, mais les crises sont toujours là.

Une cousine de 15 ans intervient

L’accusé provoque donc un jeune de 14 ans, le copain d’une jeune cousine voisine venu lui rendre visite. Il l’interpelle pour “le test” et l’invite à se battre dans le chemin. Alors que la jeune fille lui dit de ne pas faire attention à ce “tonton”, l’accusé s’approche et envoie un soudain coup de poing dans la bouche de l’adolescent qui se relève et part en courant. L’accusé le poursuit, mais croise alors sa mère qui rentre au domicile en voiture.

Le père, alerté par une autre petite cousine, arrive et tente de calmer son garçon malade. Cela semble être le cas, mais lorsque le père demande à la mère d’appeler les gendarmes, l’accusé part en courant, il revient avec le couteau et un assaut désordonné commence.

C’est alors la nièce de 15 ans qui attrape d’abord l’accusé par le cou, d’autres proches la rejoignent et ils réussissent à plaquer l’accusé au sol, un genou sur le cou, un autre sur le bras qui tient encore le couteau. Face à la maladie de l’accusé, les gendarmes demandent rapidement l’avis d’un médecin psychiatre pour savoir si son état de santé est compatible avec une garde à vue et un placement en détention.

C’est le cas, selon le médecin. Les gendarmes ne notent aucun trouble visible de la pensée ou du comportement de l’accusé lors de son arrestation. Ensuite, il ne dit rien ou presque lors des auditions. On n’en sait pas plus sur les raisons de sa colère après son passage devant le magistrat instructeur. “Il ne dit rien. J’ai quelqu’un d’absent en face de moi”, dit le gendarme qui l’interroge.

Des yeux écarquillés

C’est le symptôme qui fait dire à tous ceux qui le connaissent qu’il était en crise. “Il était possédé” dit la mère. “Un regard de psychopathe” selon la jeune cousine, qui défend tout de même celui qu’elle présente comme le gentil fou du quartier, dont certains jeunes se moquent parfois c’est vrai, car on voit souvent ses fesses lorsque le short qu’il tient tout le temps à la main, tombe.

Mais au moment où il frappe son petit ami, elle a compris qu’il n’était plus lui-même. Elle le sait, elle l’a vu dans ses yeux. Dans ces moments-là, dit-elle, ils ne clignent plus et restent grands ouverts. Elle précise : “Même quand on le tapait pour le maîtriser il fermait pas les yeux”. Le père dit lui aussi qu’il a demandé à sa femme d’appeler les gendarmes lorsqu’il a justement vu la même noirceur dans les yeux de son fils, il sait ce que cela veut dire.

La cour va donc devoir décider si cet homme, qui s’exprime comme un enfant, est apte à être jugé, lui qui a passé toute l’audience la tête entre les genoux, le corps plié en deux vers le sol. Sa famille a déjà fait savoir que son souhait était de s’occuper à nouveau de lui après son procès ou sa peine de prison. Le père espère que la médecine pourra lui rendre un enfant “stabilisé”. La mère déclare en larmes : “Sans lui, le foyer est incomplet“, elle qui doit aussi gérer un aîné tétraplégique après un terrible accident de surf. Il avait lourdement chuté sur le spot de Pipeline à Hawaii en 2015.

Ce mardi, deux experts psychiatres doivent témoigner pour aider la cour à évaluer la nuance entre un discernement de l’accusé possiblement altéré, ou totalement aboli. Avait-il l’intention de tuer ou était-il en crise, irresponsable de ses actes ? Une tâche ardue, puisque à cette interrogation deux experts ont déjà rendu des avis différents pendant l’instruction.

Compte-rendu d’audience Y.P