Grève chez Air Tahiti Nui – Le président du Pays prend le manche

Ce mercredi matin, des PNC grévistes occupaient le piquet de grève devant le siège d'Air Tahiti Nui. (Ph. Damien Grivois)
Ce mercredi matin, des PNC grévistes occupaient le piquet de grève devant le siège d'Air Tahiti Nui. (Ph. Damien Grivois)
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Aujourd’hui, mercredi 12 juillet, La Dépêche a rencontré deux employés du personnel navigant
commercial (PNC) d’Air Tahiti Nui en grève, afin de comprendre les mécanismes qui ont conduit le personnel à durcir sa position avec un arrêt d’activité qui fera date dans les annales de la compagnie au tiaré.

Les deux employés ont déclaré qu’ils ont 16 et 18 ans d’ancienneté, occupent toujours la même fonction et qu’ils ne se plaignent pas de cette situation, car conscients que les ouvertures de postes à responsabilité, comme chef de cabine, sont limitées.

Ils déclarent aussi que le mouvement de grève a été initié suite à des problèmes d’intendance, transport (attente dans le froid notamment à Seattle) et d’hébergement (trop d’attente pour récupérer les clés des chambres à l’arrivée dans des hôtels). Ils soulignent qu’ils ont signalé le problème à plusieurs reprises à la réunion mensuelle de délégués du personnel et à la direction des opérations aériennes (DOA) à qui revient la gestion de ce type de problème. Hélas, selon eux, les doléances n’ont jamais été satisfaites.

Fiche de paie d’un PNC avec 16 ans d’expérience.

Ils expliquent, en outre, que 10 PNC, y compris les chefs de cabine, gèrent un vol dit normal. Selon la réglementation de l’aviation civile, un PNC doit effectuer 67 heures, c’est la base horaire du travail. Le maximum d’heures autorisé est de 95 heures. A partir de la 68e heure, les heures complémentaires puis supplémentaires sont déclenchées.

Le salaire moyen d’un PNC avec une ancienneté de 16 ans est de 227 687 F (voir fiche de paie) sans le “perdiem”, l’indemnité journalière que les PNC touchent lorsqu’ils sont à l’étranger. C’est une somme forfaitaire de l’ordre de 11 000 F par voyage (voir relevé d’activité).

Exemple de relevé des “perdiem”.

En moyenne, un PNC touche environ 80 000 F de perdiem par mois. Cette indemnité fait l’objet d’un relevé d’activité mensuel, à part. Il ne figure pas sur la fiche de paie, selon une convention du personnel naviguant.

“Avec l’âge, nous pensons maintenant à la retraite”

Les deux employés font le constat assez simple que les salaires déclarés sont bas, et la retraite CPS risque de n’être pas suffisante pour les vieux jours, malgré la caisse de retraite du personnel naviguant CRPN à laquelle ils cotisent.

Ils demandent une réévaluation de la grille salariale tous les deux ans, ce qui représente une somme de 5 000 F. Ils insistent sur le fait que depuis 2008, l’indice a été gelé. Ils réclament à la direction une augmentation de 50 000 F qui rattrape les retards enregistrés. Ils expliquent que cette augmentation se traduit concrètement, pour un PNC débutant, par une revalorisation du salaire de l’ordre de 4 000F sur sa fiche de paie et de 50 000F pour un PNC qui a 20 ans de carrière.

Ils sont 132 PNC à bénéficier de cette augmentation, si elle a lieu, sur 181 PNC (flight attendant F.A).
La négociation avec la direction a permis de débloquer une enveloppe de 510 millions de francs, qui se
compose ainsi : 4% Indice du coût de la vie (ICV) et 5% de rattrapage de baisse de salaire suite à la crise Covid. Ce dernier point, insistent-ils, n’était pas revendiqué mais ils remercient la direction de l’avoir accordé.

Concrètement, depuis 8 jours de grève, les délégués syndicaux ont pu négocier 9% de revalorisation
de salaire, ce qui représente une somme de 20 000 F (ICV 4% et rattrapage de salaire 5%), outre la
somme de 29 000 F brut que la direction, par la voix du président du Pays, a pu concéder.

Mais les deux délégués estiment que le compte n’y est pas. Ils réclament toujours 50 000 F net d’augmentation, nonobstant la somme de 20 000 F qu’ils considèrent comme un acquis.

Devant la difficulté à répartir l’enveloppe entre le salaire net et le salaire brut, et la complexité des chiffres, voulant sans doute sortir de cette impasse, le président du Pays a proposé à la délégation de grévistes le recours à un cabinet de gestion privé pour formuler des propositions dans le cadre de l’enveloppe globale de 510 millions de francs.

Les délégués syndicaux se déclarent surpris par cette proposition qu’ils “ne comprennent pas” : pourquoi Moetai Brotherson ferait-il appel à un organisme privé ? D’autant plus, estiment-ils, que la ressource existe au sein de la compagnie et au sein de l’administration du Pays.

Les négociations ont repris ce mercredi à 14h à la Présidence. Selon les confidences des syndicalistes, le chef de l’exécutif a déclaré qu’il souhaite clore le problème aujourd’hui même.