
L’Institut d’émission d’outre-mer (IEOM), qui assure le rôle de banque centrale en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles de Wallis-et-Futuna, vient de publier son rapport économique 2022 relatif à la Polynésie française.

trésorerie” (Photo archives LDT)
“Après avoir été la collectivité française d’outre-mer la plus affectée par les conséquences économiques de la crise de la Covid-19 avec une perte du produit intérieur brut de 7,0 % en 2020, la Polynésie française devrait enregistrer au cours de l’année 2022 un rebond de son économie plus élevé que celui de l’année précédente qui avait enregistré +2,4 %” explique notamment Fabrice Dufresne, le directeur de l’IEOM à Papeete, qui se félicite que l’indicateur du climat des affaires (ICA) se soit maintenu au-dessus de sa moyenne de longue période tout au long de l’année “malgré de fortes tensions inflationnistes, les prix à la consommation s’affichant en progression de +6,4 % en moyenne sur l’année contre +0,5 % en 2021.”

“La reprise économique a été notamment perceptible sur le marché du travail” souligne également le patron de l’institut. “L’indice de l’emploi salarié du secteur marchand a enregistré en décembre une progression annuelle de 5,6 %. Si la grande majorité des secteurs d’activité avait retrouvé son niveau d’emploi d’avant crise dès septembre 2021, l’hôtellerie-restauration n’a retrouvé son niveau qu’en septembre 2022.“
Pour l’ensemble des entreprises qui participent à l’enquête de conjoncture, l’IEOM note que l’exercice 2022 s’est caractérisé par “une orientation globalement favorable de l’activité et une reprise des recrutements, à laquelle s’ajoute une hausse de leurs prix afin de maintenir l’équilibre de leur
trésorerie”. Le maintien de la confiance arborée par les entrepreneurs s’est reflété dans leurs
intentions d’investissement à un an.
Un marché du travail dynamique
Les effectifs déclarés à la CPS, qui ont connu un accroissement annuel moyen de l’ordre de 2 % sur les années pré-Covid-19 (2017-2019), ont augmenté de 5,1 % (+2,7 % en 2021). Ainsi que l’illustre l’évolution de l’indice salarié marchand, c’est le secteur de l’hôtellerie- restauration qui a affiché la plus forte reprise, +13,7 % sur l’année, suivi de l’industrie (+4,0 %) et du commerce (+3,8 %). Le BTP, pour sa part, moins affecté par les restrictions pendant la crise sanitaire, n’a enregistré qu’une augmentation de 1,0 %.

Après plusieurs années de modération, l’indice des prix à la consommation s’est accru de 6,4 % en moyenne annuelle en 2022. Cette tendance, esquissée dès le second semestre 2021, “trouve son origine dans les pressions exercées par les tensions internationales et la désorganisation des chaînes de production et de transport sur le coût des produits importés” selon l’IEOM.
Les importations de biens de consommation courante ont enregistré une progression de 11,3 % en valeur en 2022 (+15,6 % en 2021), pour atteindre 35,8 milliards de francs (32,1 milliards en 2021), tandis que leur volume a été stable sur un an, “reflétant le maintien de la bonne tenue de la consommation des ménages”.
Les commerçants interrogés trimestriellement par l’IEOM ont en majorité estimé avoir bénéficié d’un courant d’affaires porteur, répercutant les hausses de leurs coûts d’approvisionnement sur leurs prix de vente. Leur chiffre d’affaires a atteint 437 milliards de francs sur l’exercice 2022, en hausse de 10,9 % par rapport à 2021 (394 milliards).
Sans pour autant atteindre les niveaux observés avant la crise de la Covid-19, la production de crédits bancaires à la consommation a rebondi, à +14,9 % en glissement annuel en 2022 après -7 % en 2021 (48,9 milliards de francs contre 42,6 milliards en 2021). Quant aux
immatriculations de véhicules neufs, elles ont augmenté de 25 % sur les neuf premiers mois de
l’année.
Les entreprises ont continué d’investir
Encouragées par le retour durable de la croissance, les entreprises se sont montrées enclines à monter des programmes d’investissement en 2022. La production de crédits d’équipement s’est établie à 36,8 milliards de francs contre 23,1 milliards en 2021, soit +59,3 %, portée par quelques projets d’envergure (énergie, transports, hôtellerie…). “Les particuliers, en revanche, ont plutôt restreint leurs investissements immobiliers, freinés par l’inflation sur les coûts de construction et la perspective de remontée des taux d’intérêt” remarque l’IEOM.

La production de crédits à l’habitat s’est ainsi repliée de 3,0 % en 2022 (34,8 milliards de francs contre 35,9 milliards l’année précédente). L’investissement public, stimulé par le plan de relance 2021-2023 du Pays, s’est concrétisé par une hausse de 10,7 % des dépenses liquidées par la direction de l’équipement (11,7 milliards de francs en 2021 contre 10,5 milliards en 2021).
Le tourisme se porte bien

En dépit de liaisons aériennes encore restreintes, l’année 2022 s’est révélée très porteuse pour le tourisme. La Polynésie française a accueilli près de 219 000 touristes étrangers, principalement en provenance des États-Unis (43 %) et de France (33 %). Les hôtels polynésiens, lourdement affectés par deux années de pandémie, ont restauré leur rentabilité, doublant leur revenu moyen par chambre disponible (41 000 F contre 23 000 F en 2021). Sur l’exercice 2022, le chiffre d’affaires global de l’hôtellerie a atteint 59 milliards de francs contre 30 milliards en 2021.
Croissance des recettes à l’export du secteur primaire
Les exportations de produits du secteur primaire ont progressé de près de 30 % en 2022.
Celles de perles brutes ont rapporté 6 milliards de F CFP contre 4,8 milliards en 2021, mais pour
un volume bien moindre (8,7 tonnes contre 16,7 tonnes).
Celles de poisson ont augmenté de 35,2 % en valeur, tirant profit d’un dollar américain
fort, devise de règlement des principaux clients de la pêche polynésienne, et des labels de qualité
de certains de ses produits (thon et prochainement espadon).
• Une hausse des coûts dans le secteur secondaire
La croissance du chiffre d’affaires du BTP a ralenti en 2022 pour atteindre seulement +1,8 % après +12,7 % en 2021. Les chefs d’entreprises du secteur, interrogés lors des enquêtes de l’IEOM, font cependant part d’une activité globalement plane, et de la fragilité de leur situation de trésorerie, en dépit des revalorisations de leurs prix de vente. Les industriels, de leur côté, ont apparemment bénéficié d’un contexte plus porteur, illustré par un chiffre d’affaires en hausse de 8,6 % en 2022 (+2,2 % en 2021). Ils ont également été confrontés à des problèmes de trésorerie les obligeant à adapter leurs prix de vente en conséquence.
• Une activité bancaire bien orientée
L’affermissement de la croissance économique s’est traduit pour les banques polynésiennes par une vive progression de leur activité de crédit et une collecte de dépôts moindre mais encore significative. L’exercice 2022 s’est néanmoins achevé sur une position extérieure nette toujours prêteuse inférieure néanmoins à celle de 2021. La normalisation des politiques monétaires enclenchée au second semestre a contribué à la consolidation des marges nettes d’intérêt des banques.
• Une collecte de dépôts portée par les ménages
La collecte de dépôts a été soutenue en 2022 par les ménages (+18 milliards de francs), la tendance haussière des taux les incitant à souscrire des produits d’épargne offrant un meilleur rendement. Les dépôts à terme (+8,4 milliards de francs, soit +15,9 %) et les contrats d’assurance-vie (+6,0 milliards de francs, soit +9,3 %) en ont été les premiers bénéficiaires. Les dépôts des entreprises, en revanche, ont reflué de 1,6 %, impactés principalement par le reclassement des activités financières de l’OPT par Marara Paiement.
• Une activité de crédit toujours dynamique
Le rythme de progression de l’encours sain des crédits octroyés par les établissements de crédit de la place s’est accéléré en 2022, +6,5 %, après +4,0 % en 2021. Leur production de crédit a atteint 135 milliards de F CFP, en hausse de 22,0 % par rapport à 2021 (111 milliards de francs), tirée à titre principal par celle des crédits à l’équipement (+20 milliards de francs).