Football – Kiani et Kialei Wong voient loin

Kiani et Kialei Wong partage la même passion du football, transmise par la famille. L'une, actuellement au RC Lens, est partie en métropole pour faire carrière il y a 7 ans. La petite soeur vient de s'envoler pour intégrer un club de Bordeaux. (Photo : SG/LDT)
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Dans la famille Wong, il y a Kiani, au RC Lens depuis deux ans, mais il y aussi Kialei, sa petite sœur de 9 ans, partie en métropole il y a quelques jours pour percer dans le football. Kialei est accompagnée de sa maman, une ancienne joueuse de foot, de son grand frère, Kealoha, âgé de 12 ans, gardien de but. Ils sont attendus à Bordeaux par le grand frère Keali’i, 24 ans, coach au club de SAM à Mérignac ! 

Autant dire que le foot est une religion dans la famille. La passion du ballon rond s’est transmis de père en fils, de mère en filles mais si on y regarde de plus près, les tantes, les oncles, les neveux et nièces ne sont pas en reste, ils sont eux aussi de grands adeptes des crampons.

Comme leurs grands frères respectifs, Kiani et Kialei ont commencé à jouer au football dés qu’elles ont su marcher. L’idée de poursuivre une carrière en métropole leur est donc apparue, à elles et à leurs parents, logique et naturelle pour progresser dans ce sport passion qu’elles pratiquent depuis toujours.

La passion et quelques concessions

Kiani, 22 ans, a commencé à l’AS central avec son papa, a poursuivi un temps à l’AS Dragon avant d’intégrer l’AS Tefana en U9. “Quand j’ai commencé le football, il y avait peu de filles, je jouais avec les garçons, ce n’était pas un problème pour moi, au contraire, mais je ne pouvais pas aller au-delà des U15 pour jouer des matchs, c’est pour cela que je suis partie en France” explique t-elle. 

A 15 ans et demi, elle débarque donc dans l’Hexagone avec la bénédiction de sa famille. “Au début, c’était un peu difficile mais les résultats ont été positifs.” Acceptée au pole espoirs de Strasbourg, elle a joué durant trois années à Vendenheim, le club de Stéphanie Spielmann, puis à Cardiff en Angleterre ; elle a fait un saut en Allemagne avant de signer au RC Lens il y a deux ans en Division 2. “Ces expériences ont été très positives et même en dehors du foot, j’ai appris à me débrouiller seule” dit-elle. 

Au poste de défenseur central, Kiani s’épanouit dans son club – poussé par une équipe de garçons, deuxième en ligue 1 – et rempile pour une nouvelle saison. Son équipe, 5e au classement général en D2, entrainée par la joueuse internationale Sarah M’Barek, vise évidemment la D1. “Nous bénéficions de bonnes infrastructures, je me sens bien, j’ai trouvé mon rythme” dit-elle. 

La passion toutefois ne va pas sans quelques concessions. Kiani reconnaît que concilier le travail et le football est “fatigant”. Tous les jours, à l’exception du lundi, elle enchaîne son travail dans un magasin d’électroménager avec les entraînements, samedi compris avant les matchs le dimanche. “Je fais attention à mon sommeil, si tu n’es pas au niveau, tu ne peux pas jouer (…) J’ai toujours dit que ma priorité, c’est le football alors je me donne à fond à chaque entrainement même si c’est compliqué” affirme t-elle. Kiani s’autorise quelques rares petites sorties avec ses colocatrices, joueuses de foot également. 

En vacances au fenua, la jeune fille est ravie de retrouver sa famille et l’AS Tefana : “Je joue avec mes amis, mon papa, mon petit frère, ma petite sœur, ça fait du bien”. 

Dans le viseur également de l’athlète, les Jeux du Pacifique aux îles Salomon en novembre. Kiani, présélectionnée parmi une trentaine de joueuses, espère bien faire partie de l’aventure pour “la fierté de jouer pour mon pays” et “ramener quelque chose pour le fenua.”

“Une nouvelle vie”

Kialei, quant à elle, la petite dernière de la famille, âgée de 9 ans, est prometteuse, “une bonne dribbleuse” avec une “bonne vista” selon les coachs. “Je suis gauchère, je suis au poste d’ailier gauche c’est-à-dire que tu es dans un couloir, on te passe la balle, tu la remets et tu centres” précise la jeune athlète. 

“Nous avons pris la décision de partir car Kialei a commencé plus tôt le foot que les autres filles avec lesquelles elle joue ici et elle ne progresse pas suffisamment. Il n’y a pas vraiment d’opposition, d’agressivité ; Et il n’y a pas de championnats, ce sont juste des plateaux” souligne sa maman.

La petite fille revient de Clairefontaine ou elle a eu l’occasion d’affronter d’autres équipes d’Outre-mer. Une expérience enrichissante pour s’évaluer et se projeter. Kialei est plus que jamais ravie de poursuivre son parcours de footballeuse à Bordeaux et d’entamer “une nouvelle vie”. 

Bernard Crolas, sélectionneur de l’équipe féminine séniors pour les Jeux du Pacifique 2023

“Allier expérience et jeunesse”

J’ai vu jouer Kiani très jeune et, à l’époque, elle jouait avec les garçons et elle s’exprimait très bien sur le terrain. Kialei, on la voit évoluer depuis qu’elle est toute petite, elle est passionnée, gauchère, dribbleuse, elle aime le but, elle a une bonne vista” commente Bernard Crolas, parrain de Kialei et secrétaire général de l’AS Tefana. 

Bernard Crolas vient aussi d’être choisi par la Fédération tahitienne de football (FTF) pour sélectionner et entraîner l’équipe de filles qui partira aux Jeux du Pacifique aux Salomon au mois de novembre.

“C’est une bonne surprise, une belle opportunité pour moi après 15 à 20 années d’expérience dans le coaching, je n’ai jamais entraîné des filles donc ce sera une découverte. Il va falloir allier expérience et jeunesse.”  Une trentaine de joueuses ont déjà été présélectionnées, parmi lesquelles Kiani. 19 pourront partir aux îles Salomon.

Bernard Crolas, comme tout son entourage, va suivre avec attention la Coupe du monde féminine qui démarre en Nouvelle-Zélande et en Australie. 

Pascal Vahirua, footballer international, entraîneur à l’AS Tefana

“Une fierté”

“Quand je vois évoluer les filles en métropole, c’est une fierté car c’est aussi l’aboutissement d’un travail qui a aussi été fait ici. Elles ont démontré qu’elles sont capables (…) Et puis, le football fait voyager. Je l’ai vécu, j’ai fait le tour du monde grâce au football.” 

“Entraîner des filles est un plaisir. Elles suivent davantage les conseils tactiques que les garçons (…) Le football, c’est occuper le terrain, tout le monde doit avancer ensemble, il n’y a pas de place à laisser à l’adversaire”.

Avec 22 sélections en équipe de France, Pascal Vahirua reste la référence inégalée du football venue de Tahiti. Lorsqu’on demande à Kiani d’évoquer ses meilleurs souvenirs, la jeune femme parle de sa dernière saison à Tahiti en U15 avec ce coach charismatique.