Nucléaire – Hiro Tefaarere pourrait passer la main à la tête de Moruroa e tatou

Le président de Moruroa e tatou est candidat à sa propre succession, avec le soutien du représentant Tavini Mitema Tapati. Mais il déclare rester ouvert au débat et n'écarte pas l'idée de passer le flambeau à un militant plus jeune. (Photo archives La Dépêche)
Le président de Moruroa e tatou est candidat à sa propre succession, avec le soutien du représentant Tavini Mitema Tapati. Mais il déclare rester ouvert au débat et n'écarte pas l'idée de passer le flambeau à un militant plus jeune. (Photo archives La Dépêche)
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Le conseil d’administration de l’association Moruroa e tatou (MET) est convoqué le samedi 19 août dans les locaux de l’Eglise protestante maohi (EPM), dans l’optique d’un renouvellement du bureau de l’association.

Contacté par téléphone à Huahine, le président de Moruroa e tatou depuis 2019, Hirohiti Tefaarere, confirme que des discussions existent actuellement au sein de l’association ainsi qu’au sein de l’Eglise. Il se déclare prêt à poursuivre sa mission avec le concours du pasteur Mitema Tapati (devenu représentant Tavini à l’assemblée) et donc candidat à sa propre succession. Mais il se déclare ouvert aux débats et pourrait soutenir la candidature de Hannah Teamotuaitau, qui travaille au sein de la direction de l’Église protestante maohi et qui a manifesté sa volonté de “reprendre le flambeau”.

L’association Moruroa e tatou est le “département anti-nucléaire” de l’Eglise protestante maohi. (Archives La Dépêche)

Selon Hiro Tefaarere, la présidence de l’EPM souhaiterait proposer d’autres jeunes, avec pour conséquence “quelques frictions internes à l’Eglise”. La réunion du CA de Moruroa e tatou sera également l’occasion de dresser un bilan au niveau local et régional.

“Nous souhaitons proposer de nouvelles missions, afin de mieux répondre à notre volonté d’obtenir des indemnisations pour les victimes de la bombe française” explique Hiro Tefaarere qui entend rappeler que “toute la Polynésie a été contaminée”, avec un bilan humain estimé à “plusieurs dizaines de milliers de morts”. Selon lui, le ministre de la Santé, Jacques Raynal, aurait même reconnu le chiffre de “30 000 décès”.

Obtenir de Paris “les registres de cancer gardés par l’Etat”

Le président de MET insiste sur la nécessité de se pencher sur la question de la transmission inter-générationnelle des maladies radio-induites, sur la volonté de l’association d’obtenir de Paris “les registres de cancer gardés par l’Etat” mais aussi d’aboutir à un dispositif de “forfaitisation” des indemnisations des victimes du nucléaire.

Hiro Tefaarere considère que la sénatrice Tapura Lana Tetuanui a été “manipulée par Paris” et demande en conséquence l’annulation du seuil de un millisievert, cette condition contestée d’exposition aux rayons ionisants ouvrant à indemnisation dans le cadre de la loi Morin.

Hiro Tefaarere préconise que l’enseignement du fait nucléaire s’appuie sur les travaux de Bruno Barillot. (Archives La Dépêche)

“L’important, c’est surtout la conscientisation du peuple maohi, et à ce titre je suis content que la nouvelle majorité Tavini ait décidé que l’enseignement du fait nucléaire serait une réalité dès la prochaine rentrée scolaire” déclare le président de MET.

Hiro Tefaarere s’inquiète aussi de l’avenir géomécanique de Moruroa, dont les failles en zone nord sont surveillées par le système Telsite-2. Selon lui, ce n’est pas seulement une loupe de corail qui risque de glisser dans l’océan avec un risque associé de tsunami pour les atolls voisins de Reao ou Tureia par exemple.

“C’est tout l’atoll qui risque de s’effondrer”

Selon lui, “c’est tout l’atoll qui risque de s’effondrer, et dans ce cas le désastre est d’une autre ampleur, avec une vague de tsunami estimée entre 11m et 20m à Tautira” affirme encore Hiro Tefaarere. Il estime que c’est la raison pour laquelle la France a financé le coûteux système de surveillance géomécanique (plus de 12 milliards de francs), installé des sirènes d’alerte au tsunami et programmé la construction de nombreux abris dans les îles.

Se déclarant “à jamais fidèle à ses convictions”, Hiro Tefaarere salue la mémoire des premiers opposants au Centre d’expérimentation du Pacifique (CEP), tels Henri Hiro ou Oscar Temaru à une époque où les anti-nucléaire “n’étaient même pas une quinzaine dans les rues” et étaient accusés d’être “des agents de l’étranger”.

Il évoque enfin le travail réalisé par Moruroa e tatou à l’époque de Roland Oldham, John Doom ou encore Bruno Barillot, tous décédés aujourd’hui.

L’association a longtemps été présidée par Roland Oldham, un ancien d’A Tia i mua qui était la centrale syndicale la mieux représentée sur les sites atomiques. (Archives La Dépêche)