L’arrivée en Polynésie française de Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur et des Outre-Mer, ce mercredi 16 août, aura été l’occasion d’un long entretien entre le numéro trois du gouvernement Macron et le président du Pays, Moetai Brotherson. A la sortie, ce dernier est revenu sur les points abordés durant la rencontre protocolaire avec le locataire de l’hôtel Beauvau.
Après une première rencontre le 6 juin dernier à Paris, c’est au tour du président du Pays d’accueillir Gérald Darmanin à la présidence à Papeete ce mercredi 16 août. Après le traditionnel dépôt de gerbe au Monument aux morts, les deux hommes se sont entretenus de longues minutes.
Au coeur des discussions, entre autres : l’aéroport de Tahiti-Faa’a, le projet d’aéroport aux Marquises, la pêche, l’indemnité temporaire de retraite (ITR), les questions de sécurité du Pays. Moetai Brotherson est également revenu, a sa sortie d’entrevue, sur la question du nucléaire ou sur la présence de la France, en octobre prochain, aux Nations-Unies à New-York.
Lancement d’une étude pour un aéroport d’envergure aux îles Marquises
Concernant le sujet aéroportuaire, le président du Pays annonce un cahier des charges, pour le nouvel appel d’offres de l’État en vue de la concession de l’aéroport de Tahiti-Faa’a, ainsi que le lancement futur d’une étude conjointe entre le Pays et l’État sur la faisabilité d’un aéroport d’envergure international aux îles Marquises. Projet qui inclura la population de la “Terre des Hommes”, précise Moetai Brotherson.
L’ancien député à l’Assemblée nationale informe aussi du projet commun de tripler les capacités de pêche du territoire d’ici dix ans. Pour cela, “l’accompagnement de l’État sera nécessaire“, explique Moetai Brotherson, car le Pays “a une capacité de construction des navires et de formations des équipages qui n’est pas calibré par rapport à cet objectif.“
Indemnité temporaire de retraite et établissement public d’incendie et de sécurité
Concernant la question de l’ITR, qui est un complément de pension accordé aux fonctionnaires d’État, soumis à conditions de résidence dans certains territoires ultra-marins, dont la Polynésie française, et qui doit normalement être supprimée en 2027, le président du Pays indique que des annonces seront faites prochainement par Philippe Vigier, ministre délégué chargé des Outre-mer.
Pour rappel, le 19 juillet dernier, s’était tenue une réunion avec les syndicats des fonctionnaires d’État en Polynésie française. Ces derniers en étaient sortis insatisfaits. Les annonces à venir doivent justement apporter des améliorations.
Sur la sécurité dans le Pays, le président précise que des choses doivent évoluer en ce qui concerne la sécurité civile/sécurité incendie : “on a aujourd’hui des casernes de pompiers dans les communes avec des situations différentes, un centre de traitement des appels qui est à bout de souffle.”
Solution possible : la mise en place d’un établissement public d’incendie et de sécurité, qui existe partout dans la République excepté sur le territoire : “Je suis favorable sur le principe d’une mutualisation des moyens, d’un dispositif qui permet une meilleure coordination ; c’est un sujet qu’il faut avant tout aborder avec les tavana.“
La question du nucléaire et de la dette CPS
“Il y a des dossiers sur lesquels rien ne sert de communiquer tant que nous n’avons pas d’éléments concrets de changements à exposer”. Pour le président du Pays, rien ne sert de courir, il faut partir à point… mais rien n’empêche de donner son avis. Sur la question, le président est ferme : “ce qui me satisferait, c’est que l’État assume pleinement ses responsabilités. Qu’on lève certains obstacles qui n’ont plus lieu d’être, qu’on puisse se mettre d’accord sur le statut des victimes, qu’on puisse se mettre d’accord sur les modalités d’indemnisations.”
Toutefois, Moetai Brotherson reste ouvert aux discussions et souhaite clarifier, en collaboration directe avec l’État, la dette nucléaire due à la CPS. “Il faudra aboutir à une étude commune pour arriver à des chiffres sur lesquels on peut s’entendre. Chacun campe sur ses positions, certainement de bon droit, mais maintenant c’est ce qu’on appelle un dialogue de sourds. Si on reste dans cette position-là, on ne va pas avancer. Ce que je propose, c’est qu’on refasse les calculs ensemble et qu’on arrive sur un chiffre sur lequel on puisse s’entendre.”
“La parole du président de la République est une chose importante”
Concernant la présence de la France aux Nations-Unies en octobre prochain, le président du Pays informe qu’Emmanuel Macron lui a assuré, à deux reprises, que la position de la France serait modifiée lors de la quatrième commission en octobre. “La parole du président de la République, c’est quand même quelque chose d’important ( …) J’ai envie de faire confiance au président de la république.”
Il est important, pour Moetai Brotherson, d’entamer le dialogue sur la question de l’autodétermination avec la France. “Après on ne sera certainement pas d’accord, il y aura des discussions tendues, chacun va négocier son petit bout de la ficelle, mais au moins qu’on puisse entamer le dialogue.“
Interrogé sur les conviction du gouvernement : “La conviction est toujours là. La volonté d’indépendance et d’autodétermination est intacte. C’est peut-être la méthode qui a changé. Mais la détermination n’a pas varié (…) L’État l’entend depuis le début. On a eu des discussions très franches la-dessus ; ils savent très bien que leur interlocuteur est indépendantiste, et ne va pas demain matin se transformer en autonomiste ou départementaliste.”
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