Le Biovator de Nicolas Bono passe à la vitesse supérieure

"Tout le monde voit des déchets. Moi, je vois une richesse qui n’est pas utilisée", confie Nicolas Bono, qui souhaite solutionner la question des déchets d'origine animale (Photos : ACL/LDT).
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Implanté à Mataiea, côté montagne, à l’entrée d’Atimaono, le Biovator attiste la curiosité des passants. Ce gigantesque tube en acier inoxydable est un composteur cylindrique. Exploitant et revendeur d’unités de toutes tailles, Nicolas Bono a commencé par importer des aliments pour animaux ; une reconversion professionnelle en adéquation avec ses convictions.

Réduire le temps de compostage

Il nous explique le fonctionnement aussi simple que surprenant de cet outil. “Il y a une entrée et une sortie. On charge, et il y a des pales qui font avancer et tourner la masse de déchets comme une hélice sans fin. Ça tourne 4 à 7 fois par jour pendant 20 minutes selon la matière, ce qui en fait une machine très peu énergivore. Il faut 6 mois pour produire du compost traditionnel en andains. Nous, ça nous prend 10 jours”, précise le gérant fondateur de la société TNB, quant au gain de temps associé à l’utilisation de ce digesteur de conception canadienne.

“C’est un système de compostage aérobique avec une montée en température naturelle jusqu’à 75°C grâce aux bactéries. Ça permet de tuer tous les germes pathogènes. On a fait de nombreux tests et analyses avec un suivi de la DAG (Direction de l’Agriculture, ndlr) et mensuellement du Cairap, pour s’assurer de ne pas diffuser des Escherichia coli, des salmonelles ou des Entérocoques via notre compost. Il y a aussi très peu d’odeurs, grâce à ce système et à l’ajout de broyat de végétaux issus d’opérations de nettoyage ou de chantiers”. Des précisions importantes, car Nicolas Bono souhaite s’attaquer aux déchets d’origine animale, autrement dit : ceux dont personne ne veut, qu’on enterre ou qu’on jette à la mer.

Valoriser les déchets animaux, en commençant par le poisson

Lutter contre le gaspillage et la pollution, voire les risques sanitaires, c’est l’objectif de cette machine. “Depuis trois ans, on a fait énormément de tests sur les fientes, les cadavres de porcs, le lisier ou encore les déchets de cantine et de restauration, parce qu’on cherche à valoriser différents types de déchets. Pour le poisson, on traitait jusqu’à maintenant 250 kg par jour. À partir de la semaine prochaine, on va commencer à traiter 1 à 1,7 tonne de déchets du port de pêche de Papeete par jour, sur les 5 tonnes produites quotidiennement. On pourra monter à 3 tonnes par jour quand on aura la deuxième machine, à partir de mars 2024”, annonce Nicolas Bono. Pour cette seconde machine, il s’est orienté vers une fabrication locale, moyennant un investissement de 20 millions de francs.

À la clé, après transformation : un fertilisant de qualité, contenant de l’azote, du phosphore et du potassium, utilisable en agriculture biologique. Il est vendu à 2.050 francs hors taxes le sac de 10 kg dans plusieurs grandes surfaces et enseignes spécialisées. “On a de très bons résultats en culture maraîchère et vanille”, remarque l’exploitant, qui ne s’est pas installé à Teva i Uta par hasard. La terre domaniale sur laquelle est implanté le Biovator se situe en pleine zone rurale, à proximité des agriculteurs et dans une commune qui promeut une alimentation saine et locale dans ses écoles.

“Un système gagnant-gagnant”

“Tout le monde voit des déchets. Moi, je vois une richesse qui n’est pas utilisée. C’est un système gagnant-gagnant, car on débarrasse gratuitement les entreprises de leurs déchets. On est en train de créer une filière, car on est les seuls à traiter des déchets organiques de cette façon”, conclut-il au sujet de cette démarche en faveur de l’économie circulaire et de l’autonomie alimentaire.

Actuellement, l’entreprise emploie trois salariés : un ingénieur et deux ouvriers, qui assurent le transport et le chargement des déchets, ainsi que le bon fonctionnement de la machine. Une inauguration officielle est prévue le 7 novembre prochain.