La guerre entre Israël et le Hamas a déjà fait près d’un millier de morts

Sous le couvert d'un déluge de roquettes tirées sur Israël, les combattants du Hamas, à bord de véhicules, de bateaux et même de parapentes motorisés, se sont joués samedi de l'imposante barrière autour de Gaza. (Photo AFP)
Sous le couvert d'un déluge de roquettes tirées sur Israël, les combattants du Hamas, à bord de véhicules, de bateaux et même de parapentes motorisés, se sont joués samedi de l'imposante barrière autour de Gaza. (Photo AFP)
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Le conflit entre Israël et le Hamas a fait près d’un millier de morts au total en moins de 48 heures, selon de nouveaux bilans officiels publiés dimanche, le Premier ministre Benjamin Netanyahu mettant en garde contre une guerre “longue”.

Plus de 600 personnes ont été tuées en Israël, indiquent des données sur le compte Facebook du Bureau de presse du gouvernement (GPO), et sur les 2.000 blessés recensés dans le pays, 200 sont “dans un état critique”, a déclaré un responsable du GPO à l’AFP.

Dans la bande de Gaza sous le contrôle du Hamas depuis 2007, 370 Palestiniens ont été tués, ont annoncé les autorités locales, et près de 2.000 blessés.

L’armée israélienne a déployé des dizaines de milliers de soldats pour reprendre le contrôle total des régions désertiques du sud, près de la bande Gaza, dans le but de sauver les otages israéliens qui s’y trouveraient encore et d’évacuer l’ensemble des habitants de la région d’ici à lundi matin afin de passer la zone au peigne fin. Le Hamas a fait “plus de 100 prisonniers”, a indiqué dimanche le GPO.

Dans la bande de Gaza sous le contrôle du Hamas depuis 2007, 370 Palestiniens ont été tués, ont annoncé les autorités locales, et près de 2.000 blessés. (Photo AFP)

Cherchant à reprendre la main après l’offensive surprise lancée samedi à l’aube en plein Shabbat, le repos hebdomadaire juif, les forces israéliennes ont continué de traquer dimanche les éléments du Hamas infiltrés dans le sud d’Israël et ont poursuivi leurs frappes aériennes contre des cibles à Gaza, où de nouveaux bâtiments ont été détruits.

“Tuer chaque terroriste”

“Nous allons (…) tuer chaque terroriste présent en Israël”, a déclaré le porte-parole de l’armée, le général Daniel Hagari. Les forces israéliennes ont indiqué avoir repris le commissariat de police à Sdérot, après avoir “neutralisé 10 terroristes qui s’y trouvaient“. Une journaliste de l’AFP a constaté que le bâtiment était totalement éventré.

“La première phase est en train de s’achever (…) par l’élimination de la grande majorité des forces ennemies qui se sont infiltrées sur notre territoire”, a déclaré M. Netanyahu en avertissant que “la guerre serait longue et difficile”.

Une Israélienne de 37 ans s’est dit horrifiée de voir plusieurs membres de sa famille enlevés, sur des vidéos en provenance de Gaza, notamment sa cousine et les enfants de celle-ci, âgés de neuf mois et trois ans. “C’est la seule confirmation que nous ayons”, a déclaré à l’AFP par téléphone Yifat Zailer, la voix brisée, ajoutant n’avoir aucune information sur le mari de sa cousine et ses parents âgés.

Sous le couvert d’un déluge de roquettes tirées sur Israël, les combattants du Hamas, à bord de véhicules, de bateaux et même de parapentes motorisés, se sont joués samedi de l’imposante barrière autour de Gaza, attaquant des positions militaires et des civils en pleine rue.

Un ancien soldat israélien a déclaré que la guerre israélo-arabe de 1973, qui reste un traumatisme national en Israël, était “peu de chose” comparée au raid du Hamas de samedi, ajoutant qu’il s’agit d’un “très grave échec”.

“Beaucoup de corps”

Israël a été en outre attaqué à sa frontière nord avec le Liban. Le Hezbollah libanais, un allié du Hamas et de l’Iran, a tiré des obus sur un secteur contesté à la frontière, entraînant une frappe de drone israélienne sur une cible du Hezbollah dans le sud du Liban. Mais le front est ensuite resté calme.

En Egypte, deux touristes israéliens ont été tués par un policier qui a tiré sur eux à Alexandrie, selon un média.

Le Hamas et le Jihad islamique, autre groupe armé palestinien, ont affirmé avoir capturé de “nombreux soldats”. “Ce qui s’est passé est sans précédent en Israël”, a reconnu M. Netanyahu.

Face à la contre-offensive israélienne, “nous craignons la destruction et la fin de la société civile dans la bande de Gaza (…). Nous entrons dans une phase de destruction”, a déclaré Chadi al-Assi, un habitant de Gaza de 29 ans.

Réunion du Conseil de sécurité

L’offensive du Hamas a été lancée 50 ans et un jour après la guerre israélo-arabe de 1973 qui avait pris Israël totalement par surprise, entraînant la mort de 2.600 Israéliens en trois semaines de combats.

Les Brigades Al-Qassam, branche militaire du Hamas, ont annoncé avoir déclenché samedi l’opération “déluge d’Al-Aqsa” contre Israël et avoir tiré plus de “5.000 roquettes” pour “mettre fin aux crimes de l’occupation”. Israël occupe depuis 1967 la Cisjordanie, un territoire palestinien, et la partie orientale de Jérusalem, et impose un blocus à Gaza depuis plus de 15 ans.

Un ancien soldat israélien a déclaré que la guerre israélo-arabe de 1973 était “peu de chose” comparée au raid du Hamas de samedi. (Photo AFP)

L’armée israélienne, qui a compté plus de 3.000 tirs palestiniens, a déclenché l’opération “Sabres de fer”, détruisant des bâtiments présentés comme des “centres de commandement” du Hamas à Gaza.

Israël, qui soumet la bande de Gaza à un strict blocus depuis 2007, a suspendu les livraisons d’électricité, de nourriture et de biens vers le territoire palestinien.

Les écoles sont restées fermées dimanche, début de la semaine en Israël.

L’attaque du Hamas a été condamnée par les Occidentaux, les Etats-Unis vont “probablement” donner dès dimanche les détails d’une nouvelle aide militaire à Israël, a indiqué le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken.

Le Conseil de sécurité de l’ONU doit tenir dimanche une réunion d’urgence sur la situation.

Cette offensive a été lancée alors que des négociations entre Israël et l’Arabie saoudite sous l’égide des Etats-Unis, semblaient s’accélérer en vue d’une normalisation, un rapprochement majeur condamné par le Hamas et son allié iranien. “L’Iran soutient la légitime défense de la nation palestinienne”, a déclaré dimanche le président iranien Ebrahim Raïssi.

Au Vatican, le pape François a demandé que “les attaques cessent” en Israël, disant que “le terrorisme et la guerre ne conduisent à aucune solution”.

AFP

Israël-Gaza: la communauté juive en France
entre sidération et peur du “dérapage”

“C’est un drame, une deuxième (guerre du) Kippour, mais encore plus grave”: au lendemain d’une offensive spectaculaire du Hamas palestinien sur Israël, des membres de la communauté juive en France, la plus importante d’Europe, craignent pour leurs proches et amis en Israël et redoutent des répercussions du conflit dans l’Hexagone.

Près d’une synagogue du 11e arrondissement à Paris, Elie Benchetrit, un retraité de 76 ans venu en France pour voir une partie de sa famille, enchaîne les coups de fil sur son téléphone portable, l’air abattu. “C’est un deuxième Kippour, mais encore plus grave. Je n’ai jamais vu ça”, dit le retraité –qui réside en Israël– en référence à la Guerre de 1973.

“Tout le monde est abasourdi”, déclare Hervé Rehby, médecin et co-président du centre culturel Yavné à Bordeaux, très ému. “On s’appelle les uns les autres pour prendre des nouvelles. Tout le monde a de la famille, des amis, en Israël”.

“C’est comme s’il y avait eu trois +11 septembre+ pour l’Etat d’Israël quand on regarde la taille de la population et le nombre de morts”, relève, stupéfait, Tom Cohen, rabbin de la synagogue Kehilat Gesher, dans le 17e arrondissement de Paris.

“On est tous bouleversés. J’ai des proches sur place. C’est la première fois que je n’ai pas de mots”, dit à l’AFP Ady Walter, 40 ans, à la sortie d’une synagogue près de la place des Vosges (centre de Paris), en ce jour de fête religieuse pour les juifs, Simhat Torah. Des véhicules de police sont postés devant les entrées de l’édifice, comme devant de nombreuses institutions juives en France.

Enlever la kippa

Il évoque “une sidération”, liée en partie aux réseaux sociaux. “On n’a jamais vu autant d’images aussi répandues, sans filtre, avec autant d’horreurs. On accède à des choses épouvantables, sans les chercher, les images circulent”, dit-il la voix nouée.

Sa plus grande crainte, “c’est que ça se propage, qu’il y ait un embrasement dans la région mais aussi que les juifs de France soient visés par ricochet”. “Tout à l’heure, mon fils a mis sa kippa dans la rue et je lui ai demandé de l’enlever. Quand on traverse le boulevard, on ne sait pas qui est dans les voitures”.

Devant la grande synagogue de Marseille, Pierre Adjedj, 82 ans, redoute que cela “dérape en France, avec de la méchanceté et des risques accrus d’attentats”.

“L’histoire nous a prouvé qu’à chaque fois qu’il y avait des violences au Proche-Orient, qu’Israël était la cible du Hamas, il y a des répliques en France”, déclare à l’AFP Yonathan Arfi, le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif).

M. Arfi pointe “une corrélation très claire entre l’embrasement au Proche-Orient et les actes antisémites en France”. De plus, “les actes terroristes” dans l’Hexagone (par exemple les assassinats de trois enfants et un adulte perpétrés dans une école juive de Toulouse par Mohamed Merah en mars 2012) sont “justifiés, par leurs auteurs, par le sort des enfants palestiniens”.

Le président du Crif –qui appelle à un rassemblement lundi soir à Paris– redoute un passage à l’acte par “des cellules dormantes ou des individus isolés”, qui “penseraient ainsi prendre part au combat contre Israël, via une identification dévoyée à la cause palestinienne”.

Rentrer vite chez soi

Devant la synagogue du Blanc-Mesnil, en région parisienne, son vice-président, Gérard Nathan, raconte qu’en ce jour de fête, les fidèles “font leurs prières et puis s’en vont le plus vite possible”. “Il y a toujours une minorité qui veut profiter de problèmes à des milliers de kilomètres pour les importer en France”.

Gérald Darmanin a tnu dimanche matin “une réunion de sécurité avec tous les services du ministère de l’Intérieur, pour protéger nos compatriotes juifs contre toute menace”, a écrit le ministre sur X (anciennement Twitter).

Mickaël, 47 ans, chef d’entreprise à Marseille, espère une réponse “la plus ferme possible aux attaques sanglantes” du Hamas, d’autres, comme Benjamin Levy, interrogé dans le 11e arrondissement de Paris, craignent la réaction d’Israël.

“Si Israël décide d’envoyer des milliers de missiles sur le Hamas, ça a des répercussions dans le monde entier. Et nous, en France, on prend cher”. (AFP)