
“En comparaison par rapport au montant consacré à un habitant des îles du Vent, le montant total des aides au bénéfice d’un habitant des îles Sous-le-Vent est supérieur de 33%, 102% aux Australes, 172% aux Marquises et 173% aux Tuamotu-Gambier. Les archipels éloignés, faiblement habités, sont donc proportionnellement bien dotés même si des disparités demeurent.”
Pour la première fois, la chambre territoriale des comptes (CTC) a examiné la “territorialisation des aides du Pays” par archipel sur la période 2017-2021 avec mention des tendances observables pour 2022. Le champ du contrôle porte à la fois sur les aides du Pays qui transitent par des donneurs d’ordre publics dans les archipels (les communes) et celles pour lesquelles le Pays est maître d’ouvrage quand il réalise des programmes pour l’équipement structurant des archipels ou soutient par des dispositifs spécifiques certains secteurs.

“Le contrôle a pour objet de dresser le panorama des financements et aides en faveur des archipels éloignés de Tahiti ainsi que leur poids financier. Il a également porté sur la gouvernance mise en place par le Pays pour l’administration et le développement des archipels ainsi que sur les questions des outils et procédures de suivi et d’évaluation des aides accordées” explique la juridiction, qui souligne à quel point les aides versées sont diverses, en fonctionnement comme en investissement, et souvent mises en place dans le cadre d’un partenariat Etat-Pays.
“Améliorer la traçabilité”
Ce travail de recensement a ainsi “été d’autant plus complexe que le Pays ne dispose pas de base de données retraçant les flux financiers en faveur des territoires“. La Chambre “recommande vivement” au Pays de s’engager dans la voie de l’amélioration de la traçabilité des dépenses mobilisées au profit des archipels.

Selon la CTC, une première approche couvrant le champ le plus large possible aboutit à un périmètre financier valorisé à un peu plus de 282,40 milliards (Mds) de francs sur 5 exercices.
Il se décompose en 140,37 Mds en investissements directs du Pays au titre de ses différents programmes, en 53,33 Mds en fonctionnement au titre de dispositifs spécifiques, auxquels s’ajoutent le montant global des crédits du Fonds Intercommunal de Péréquation (FIP) qui s’établissent à 88,70 Mds de francs.
Selon la CTC, ce sont près de 668 000 F qui ont été consacrés sur cette période à un habitant des Iles du Vent, 891 000 F à celui des Iles Sous-le-Vent, 1,352 million de francs pour un habitant des Australes, 1,813 million de francs pour celui des Marquises et enfin 1, 826 milllion pour un habitant des Tuamotu-Gambier.
Le soutien financier les investissements du Pays au bénéfice des archipels éloignés “est significatif” et s’oriente principalement vers la réalisation des équipements structurants : routes, ports, aéroports, voies de communications numériques. Toutefois, “ce niveau d’engagement marque cependant un retard constaté dans les équipements de base, indispensables au désenclavement des îles et à leur développement” estiment les magistrats.


Les magistrats formulent cinq recommandations
Améliorer, dès à présent, la disponibilité des données financières relatives aux dépenses réalisées dans les archipels.
(Pays) : Favoriser, dès 2024, le portage interministériel des aides en faveur des archipels.
(Pays) : Participer, dès à présent, au renforcement de l’accompagnement des communes dans la réalisation de leurs projets d’investissement.
(Pays) : Identifier, dès 2024, des indicateurs de résultats afin de mesurer les effets des actions entreprises en matière d’offre de soins pour les publics des îles éloignées.
(Pays) : Renforcer, en 2024, les outils destinés à l’évaluation et au suivi des aides.
7,4 milliards de francs pour les communes sur 5 ans
Le concours financier direct du Pays aux investissements communaux s’élève sur la période 2017-2021 à 7,4 Mds de francs dont une part significative aux Tuamotu-Gambier (36%).
Le soutien à la filière coprah sur la même période s’élève à 8,4 Mds, tandis que la prise en charge du coût du fret maritime de certains produits de Tahiti vers les archipels éloignés s’élève à 5 milliards. Enfin, la prise en charge des évacuations sanitaires inter-îles, urgentes ou programmées, s’élève sur la période 2017-2021 à 10 milliards, soit la même somme que celle consacrée à l’emploi et aux mesures de soutien
La chambre territoriale des comptes estime que le Pays doit “sensiblement améliorer le suivi et l’évaluation des aides dans l’objectif d’une meilleure “efficience et efficacité des dispositifs existants.” Le système polynésien de déconcentration administrative, “pourtant nécessaire aux vues de l’éloignement géographique des services centraux et du défaut d’égalité numérique des territoires” n’est pas jugé performant par la juridiction.
Enfin, la Chambre “constate que l’irrésistible mouvement d’attraction de la population des archipels éloignés vers Tahiti est toujours à l’œuvre en dépit des dispositifs variés déployés et financés par le Pays.”