Israël a annoncé mardi avoir repris en partie le contrôle de sa frontière avec la bande de Gaza, placée en état de siège, après quatre jours d’une guerre contre le mouvement islamiste palestinien Hamas qui a déjà fait des milliers de morts.
“Ce n’est que le début, nous allons vaincre (le Hamas) avec de la force, énormément de force”, a promis le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu.
L’offensive massive lancée samedi par le Hamas contre Israël a suscité de multiples condamnations internationales ainsi que des inquiétudes face à l’éventualité, de plus en plus vraisemblable, d’un assaut terrestre sur Gaza.
Israël, qui a annoncé l’évacuation des zones frontalières et multiplie les frappes sur la bande de Gaza, y a imposé un “siège total” et ordonné la “coupure immédiate” de l’approvisionnement en eau de l’enclave palestinienne, après la suspension des livraisons d’électricité et de nourriture.
Le Hamas, qui contrôle depuis 2007 ce petit territoire, menace de son côté d’exécuter des otages enlevés en Israël, environ 150 personnes dont des enfants, des femmes, des personnes âgées ainsi que des jeunes capturés pendant un festival de musique.
Cent morts dans un kibboutz
Les combattants qui ont fait irruption samedi dans ce festival y ont massacré 250 personnes, et ont tué aussi “plus de 100 personnes” dans le seul kibboutz de Beeri, selon l’ONG Zaka, qui a participé à la collecte des corps.
“Ils tiraient sur tout le monde”, “ils ont assassiné de sang-froid des enfants, des bébés, des gens âgés, tout le monde”, a témoigné Moti Bukjin, le porte-parole de l’ONG.
Samedi à l’aube, après avoir franchi la barrière frontalière qu’Israël considérait imprenable, des centaines de combattants du Hamas s’étaient engouffrés dans des localités du sud du pays, allant de maison en maison, abattant des citoyens ou les enlevant.
Lors de cette offensive terrestre, aérienne et maritime d’une ampleur sans précédent depuis la création de l’Etat d’Israël en 1948, menée en plein Shabbat, le repos juif hebdomadaire, et au dernier jour des fêtes de Souccot, le Hamas a tiré des milliers de roquettes.
L’attaque a provoqué la sidération en Israël où elle est comparée aux attentats du 11 septembre 2001.
Depuis, l’armée israélienne pilonne Gaza, une bande de terre pauvre et exiguë, enclavée le long de la Méditerranée, où s’entassent 2,3 millions d’habitants. Israël a mobilisé 300.000 réservistes et déployé des dizaines de milliers de soldats autour de Gaza ainsi qu’à sa frontière nord avec le Liban.
Une “scène terrifiante”
Plus de 900 personnes, dont des étrangers, ont été tuées et plus de 2.600 blessées en Israël depuis samedi. L’armée israélienne a annoncé en outre mardi avoir récupéré les corps de 1.500 combattants du Hamas dans les zones voisines de Gaza.
L’armée, qui avait jusque-là évoqué un millier de combattants palestiniens infiltrés, a “plus ou moins repris le contrôle de la clôture à la frontière” avec Gaza, “mais des infiltrations peuvent encore arriver”, a déclaré son porte-parole, le lieutenant-colonel Richard Hecht.
Du côté palestinien, 765 personnes ont été tuées et 4.000 blessées, selon les autorités locales. Quatre journalistes palestiniens ont été tués mardi par des frappes israéliennes dans la bande de Gaza.
Un habitant de l’enclave âgé de 70 ans, Muhammad Najib, a raconté qu’il avait fui sa maison lundi. De retour mardi dans son quartier, Al-Rimal, il a découvert une “scène terrifiante”.
“Le secteur entier était dévasté, de nombreuses maisons ont été complètement détruites”, a-t-il témoigné. “Etait-ce la faute des enfants et des femmes?”
A Gaza, une ville très densément peuplée, des images aériennes tournées par l’AFP montrent l’étendue des destructions, avec des immeubles entiers réduits à l’état de ruines.
Dans les hôpitaux, la situation est “catastrophique”. L’hôpital al-Shifa de Gaza déborde de blessés. “Certains meurent bien avant” d’avoir pu être soignés, raconte un médecin.
A Khan Yunis, dans le sud de la bande de Gaza, un homme désemparé portait mardi le corps drapé de blanc d’un enfant, tandis que des dépouilles étaient entassées à l’arrière d’un pick-up.
L’ONU a affirmé que le siège total de la bande de Gaza était “interdit” par le droit international humanitaire, et que la guerre avait déjà déplacé plus de 187.500 personnes à l’intérieur du territoire.
L’Organisation mondiale de la santé a demandé mardi l’ouverture d’un couloir humanitaire vers la bande de Gaza.
“Le Hamas, c’est l’EI”
M. Netanyahu a comparé le massacre à grande échelle de civils israéliens aux atrocités commises par le groupe Etat islamique (EI) lorsqu’il contrôlait de vastes territoires en Syrie et en Irak: “Les terroristes du Hamas ont ligoté, brûlé et exécuté des enfants (…). Ce sont des sauvages. Le Hamas, c’est l’EI”.
Face à l’offensive, dans un pays marqué par de profondes fractures, le Premier ministre a appelé lundi “les dirigeants de l’opposition à former immédiatement un gouvernement d’union nationale”.
Dans les grandes villes israéliennes, la vie semble à l’arrêt. Tables et chaises restent vides dans plusieurs restaurants d’un marché de Tel-Aviv. Jérusalem “est une ville fantôme”, résume Mary Bahba, une quadragénaire palestinienne.
L’offensive du Hamas a été lancée 50 ans et un jour après la guerre israélo-arabe de 1973 qui avait pris Israël par surprise et fait 2.600 morts côté israélien en trois semaines.
Les Brigades Al-Qassam, la branche militaire du Hamas, ont annoncé avoir déclenché cette offensive majeure pour “mettre fin aux crimes de l’occupation”, en référence à l’occupation israélienne des territoires palestiniens.
Israël avait retiré ses troupes et évacué les colons de la bande de Gaza en 2005 après avoir occupé ce territoire depuis 1967.
Mais il a gardé le contrôle de l’espace aérien et des eaux territoriales et imposé un blocus depuis 2007, contrôlant strictement le passage des biens et des personnes entre Israël et l’enclave.
Mardi, trois salves de roquettes ont été tirées depuis le sud du Liban vers le nord d’Israël, qui a répondu par des bombardements. Ces échanges de tirs interviennent au lendemain de la mort de trois militants du Hezbollah pro-iranien, allié du Hamas, dans un bombardement israélien près de la frontière.
L’Union européenne et le Conseil de coopération du Golfe ont plaidé mardi pour “un soutien financier durable” aux Palestiniens. “Il serait totalement erroné” de suspendre l’aide humanitaire aux Palestiniens, a affirmé la ministre des Affaires étrangères allemande Annalena Baerbock, avant une réunion d’urgence des diplomaties européennes.
bur-sg/vl © Agence France-Presse
8 Français tués, 20 disparus selon un nouveau bilan
Le bilan des Français victimes des attaques en Israël est désormais de 8 morts et 20 disparus dont certains “ont très probablement été enlevés”, a annoncé mardi la ministre des Affaires étrangères Catherine Colonna, prévenant que ce bilan risquait de s’alourdir.
“Malheureusement, au fur et à mesure que les autorités israéliennes procèdent aux vérifications, à l’identification, le bilan des victimes s’accroit”, a-t-elle déclaré en amont d’une audition devant l’Assemblée nationale.
“J’ai ainsi la grande tristesse de devoir vous informer qu’à cette heure, nous déplorons le décès de huit compatriotes dans ces attaques terroristes et nous sommes sans nouvelles de 20 disparus”, a-t-elle ajouté.
Elle a précisé que certains d’entre eux avaient “très probablement” été enlevés, dont “au moins un enfant et peut-être plusieurs”.
La ministre a aussi annoncé “la mise en place d’un vol spécial par Air France ce jeudi dans le cadre d’une opération coordonnée par le centre de crise” du Quai d’Orsay pour rapatrier des Français qui n’ont pas pu rentrer.
Catherine Colonna a souligné la mobilisation de son ministère “pour clarifier la situation” des Français et “tout faire pour les retrouver, (…) pour les libérer quand ils sont otages”.
La cheffe de la diplomatie a également répété qu’il n’y avait “aucune justification possible au terrorisme” et dénoncé des “actes de terreurs perpétrés contre des civils et des soldats”.
Les prises d’otages “sont des actes abjects qui démontrent la nature terroriste du Hamas et nous demandons la libération sans conditions” de ces otages.
Avant ses propos, les députés ont observé une minute de silence.