
Elle est à la fois ingénieure, chercheuse et chargée d’étude à l’Université de la Polynésie française. Margaux Crusot, spécialisée en aquaculture et en environnement, travaille actuellement sur le développement de pratiques aquacoles durables. Le mercredi 11 octobre, elle recevra le prix Jeunes Talents L’Oréal-UNESCO pour les femmes et la science. Rencontre avec une doctorante, passionnée par l’univers marin depuis l’âge de 9 ans.
L’envie de percer les secrets du monde aquatique
C’est à partir de 2016 que Margaux Crusot s’installe au fenua afin d’intégrer l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer) en tant qu’ingénieure en aquaculture et en environnement : “j’ai travaillé sur le paraha peue, notamment au sujet des mortalités pour trouver des solutions écologiques et prophylactiques“, explique-t-elle. Cet intérêt pour l’océan et ses richesses est né lors de son voyage aux Vanuatu, sur l’île d’Efate où elle y séjourne pendant cinq ans avec sa famille. La température tropicale, la beauté de la biodiversité, le décor paradisiaque, tout est réuni pour susciter en une jeune fille de 9 ans, l’envie de percer les secrets du monde aquatique.
Pratiques aquacoles durables
Après l’obtention de son baccalauréat scientifique, Margaux poursuit son parcours éducatif en BTS aquaculture, avant d’obtenir son diplôme d’ingénieur agronome alimentaire à Lyon, ville dont elle est originaire. Aujourd’hui, à 30 ans, elle consacre tout son temps en faveur de l’environnement. “Je travaille actuellement sur le développement de pratiques aquacoles durables“, souligne-t-elle. Ses recherches portent sur la réduction des déchets plastiques associés à l’activité perlicole. Le mercredi 4 octobre dernier, la jeune doctorante a présenté une thèse à ce sujet à l’Université de la Polynésie française (UPF).
Caractériser et quantifier les déchets plastiques

“Aucune étude sur les pratiques qui génèrent le plus de déchets et dans quelle quantité, n’a encore été menée“, souligne Margaux. C’est cette faille qu’elle a choisi d’exploiter. Pour ce faire, la jeune femme a mené des enquêtes sur le terrain, avec l’aide de la Direction des ressources marines (DRM), à Takapoto, à Arutua et à Mangareva : “nous nous sommes intéressés aux pratiques des perliculteurs et c’était très intéressant d’avoir leur retour. À partir des comportements, via des calculs et des expériences, nous avons pu estimer les flux de déchets plastiques qui étaient potentiellement générés par ce secteur“, explique-t-elle. Cette quantité, selon Margaux, correspond à “1600 tonnes de déchets plastiques” produits par an. Un résultat “modéré“, selon la scientifique, mais qui risque de mettre le fenua en péril si la production de déchets n’est pas régulée. En ce sens, la DRM “travaille sur la mise en place d’une charte de bonnes pratiques pour valoriser ceux qui auraient une bonne attitude en faveur de l’environnement“, dit-t-elle.
Trouver des solutions et des outils novateurs
De plus, “le second axe des recherches consiste à déterminer les solutions possibles. Dans ce contexte, nous avons remarqué que les collecteurs utilisés en support des naissains d’huîtres perlières (collectage naturel, NDLR) sont très polluants car ils sont associés à la production de micro-plastiques. Leur composition chimique a été contrôlée en laboratoire et les recherches ont démontré que le collecteur était toxique pour une vitre perlière et pour les écosystèmes lagonaires”, nous explique Margaux. En effet, “pour un petit territoire comme la Polynésie, il n’y a pas énormément de moyen de gestion de déchets. C’est également cela que je mets en évidence. S’il y a 22% de réutilisation, tout le reste, pour faute de moyen, subiront une gestion inadéquate : ils seront soit brûlés ou immergés. Au travers des recherches, nous voulons proposer des outils innovateurs et plus écologiques afin de sensibiliser le gouvernement à ce sujet et changer les choses“, détaille-t-elle.
Nouveau biomatériau
En collaboration avec l’institut de recherche néo-zélandaise Science et l’équipe Manufacturing Materials in Engineering, Margaux a élaboré un nouveau biomatériau biodégradable, capable de résister les douze mois de collectage de perle. Cet outil fait actuellement l’objet d’un brevet, en attente d’être validé. Spoiler alert, “une partie des matériaux utilisés sont locaux“.
Récompensée par L’Oréal, l’UNESCO et l’Académie des sciences

Mercredi 11 octobre, Margaux, recevra le prix Jeunes Talents L’Oréal-UNESCO pour les femmes et la science, à Paris. La fondation L’Oréal, l’UNESCO et l’Académie des sciences souhaitent soutenir les recherches des femmes scientifiques en récompensant 35 d’entre elles, issues de Métropole et d’Outre-mer.
“Je suis très fière, c’est une super reconnaissance de mon travail. En tant que chercheuse, c’est très important d’avoir ce soutien car ce prix te donne les moyens de favoriser ta carrière et ta poursuite dans la recherche. Par exemple, il est possible d’assister à des congrès, d’agrandir ton réseau et utiliser la dotation qui vient avec le prix en ce sens. Personnellement, j’ai prévu d’obtenir un diplôme de plongée professionnelle valide à l’international“, confie-t-elle. Pour l’instant, la jeune chercheuse est attachée temporaire d’enseignement de Recherche au sein de l’université : “je gère initialement les projets associés aux recherches sur les biomatériaux. À côté, j’enseigne également l’écologie générale et la zoologie aux élèves de deuxième et troisième année de licence Sciences de la Vie. Très prochainement, je deviendrai docteure en écologie et biologie des populations, donc en écologie marine“, conclut-elle.
Réseau :
LinkedIn : Margaux Crusot