En colère, il met le feu au terrain de sa voisine, 18 mois de prison 

La question de l'irresponsabilité de ce schizophrène a été de tous les instants, particulièrement lors de la deuxième journée de procès durant laquelle les experts psychologues et psychiatres se sont succédé à la barre, pas toujours d'accord. (Photo archives LDT)
(Photo archives LDT)
Temps de lecture : 3 min.


Un artisan du pandanus de Bora Bora au casier chargé a été condamné à 18 mois de prison ferme, en comparution immédiate différée, le 14 octobre 2023 à Papeete. L’homme de 59 ans, sous traitement pour réussir à gérer ses coups de colère, avait mis le feu au terrain de sa voisine pour une histoire de filet de pêche qu’il croyait volé. 4 000 mètres carrés de brousse étaient partis en fumée. 

“Quand il prend ses médicaments ça va”

Sous traitement neuroleptique lourd, l’homme dit parfois entendre des voix, mais a déjà été inséré dans la société. “Quand il prend ses médicaments ça va“, dit sa compagne lors de son audition. En couple depuis trois ans, l’homme, soudeur de formation, ne réussit pas à trouver du travail dans son secteur professionnel sur l’île de Bora Bora. Il peine à gagner 10 000 francs par semaine en tressant le pandanus pour les toitures des hôtels de l’île. C’est donc presque Noël lorsque sa compagne achète un filet de pêche tout neuf, à 28 000 francs, qu’il va rapidement lancer dans le lagon. Seulement quelques heures plus tard, le filet a disparu. La crise de colère est instantanée. 

“J’ai fait des bras d’honneur à tout Bora” 


Errant en bord de mer à la recherche de son filet, le quinquagénaire grisonnant qui a grandi à Nouméa commence par insulter les touristes qui passent dans les nombreux bateaux des prestataires de Bora Bora. Il va même jusqu’à baisser son short pour leur montrer ses perles du Pacifique. “J’ai fait des bras d’honneur à tout Bora !” dit-il. Après le spectacle, il décide d’allumer un feu près de la maison de sa voisine avec qui il dit avoir un conflit foncier. Il explique avoir rapidement voulu l’éteindre, mais le vent a attisé les flammes, au point que ce sont 4 000 mètres carrés de terrain qui partent en fumée. Les pompiers réussiront à stopper les flammes à 30 mètres seulement de la maison de la victime .

Il a entendu une voix qui lui a dit de mettre le feu

Si l’homme reconnaît les faits et dit regretter son geste, ses explications sont systématiquement accompagnées de digressions confuses. Dans le désordre : Il dénonce les mensonges de la victime, mais aussi ceux des gendarmes de Nouméa. Il dit que la justice ne fait rien à propos d’une attaque de chiens à Raiatea. Il a entendu une voix qui lui a dit de mettre le feu. Il ne trouve pas de travail parce qu’il boite. “On va se concentrer sur le dossier” lui dit, patient, le président du tribunal. 

Déjà interné et incarcéré 


L’image du gentil fou à la fois nerveux mais rigolo, disparaît quand on évoque son parcours judiciaire qui débute, en 2001 par l’agression sexuelle de sa fille de moins de 15 ans. Après quelques condamnations pour dégradations et violences, il commet deux autres agressions sexuelles sur mineurs en 2015 et 2016. “J’ai une maladie sexuelle Monsieur le juge“, avoue le prévenu, passé de colérique à timide en quelques minutes. Il a déjà été interné deux fois, incarcéré à trois reprises. Le rapport psychiatrique décrit un homme antisocial, irritable, vulgaire et agressif. Il souffre de troubles de la personnalité qui, selon le psychiatre, rendent le risque de récidive quasi inévitable. 

Les dégâts auraient pu être beaucoup plus graves


La proximité des flammes de la maison de la victime, une trentaine de mètres, fait dire au procureur que les dégâts auraient pu être beaucoup plus graves, pour un filet qui n’a jamais été volé, explique-t-il, puisque retrouvé au fond du lagon. Il rappelle le risque de récidive élevé évalué par le psychiatre, le casier du prévenu, et requiert une peine de trois ans dont deux avec sursis.

Le prévenu, de son côté, invoque le seigneur, à qui il a promis de ne plus mentir. “Quand ?” lui demande le président. “Hier“, répond le prévenu. On ne peut pas vraiment lui faire confiance sur des dates ni même la notion du temps. En effet, quelques instants plus tôt, il a hésité entre 3 ans et 25 ans, quand on lui a demandé depuis combien de temps il était en couple avec celle qui le loge à Bora Bora. Il écope d’une peine de 18 mois de prison, avec maintien en détention.

YP