Les routes de Tahiti n’ont jamais été aussi engorgées aux heures de pointe et la solution pour améliorer le quotidien des usagers peine à émerger. Malgré des initiatives en faveur du développement d’activités économiques locales, comme à Faratea avec de nouveaux hangars et la future zone biomarine, ainsi que des services publics davantage représentés à Taravao, la zone urbaine concentre toujours l’essentiel des emplois.
Trouver l’équilibre financier
En 2022, l’annonce de la perspective d’une desserte maritime inédite entre Taravao et Papeete avait fait grand bruit, avec son lot de contraintes, mais aussi d’avantages. À l’origine du projet, le groupe Degage avait lancé en 2023 un sondage en ligne pour affiner sa démarche. “On a obtenu quasiment 1.000 réponses. Il y a eu un gros engouement autour de ce sondage, qui a démontré qu’il y a un vrai intérêt pour cette ligne et un vrai besoin”, confie le directeur général, Samuel Matton.
Mais relier Tahiti Nui à Tahiti Iti par l’océan n’est pas chose aisée d’un point de vue économique. “Le sondage a montré que le tarif espéré par les futurs usagers du service est relativement bas, c’est-à-dire moins cher que ce qui est fait sur Moorea, en sachant que la rentabilité de Moorea n’est déjà pas évidente et que Taiarapu est trois fois plus loin de Papeete que Moorea. Il faudrait donc facturer trois fois plus, ce qui est impossible. C’est toute la complexité de ce dossier au niveau du seuil de rentabilité, car ce type de ligne demande beaucoup de carburant. Et si on veut consommer moins, il faut aller moins vite, ce qui n’est pas attractif pour les usagers. L’idéal, ce serait de proposer une durée de trajet d’une heure et quinze minutes. Ce sont tous ces curseurs qu’on est en train d’analyser pour voir ce qu’on pourrait faire, si possible sans dépendre des subventions du Pays. Pour l’instant, on n’a pas encore trouvé cet équilibre financier”.
Une autre question difficile à évaluer reste en suspens : quel serait le volume de passagers à transporter en dehors de l’aller du matin et du retour du soir ? Vu l’investissement, le navire affrété à cette desserte ne pourra pas se contenter d’une rotation par jour.
Vers un navire plus économique et zéro émission ?
À l’arrêt dans la rade de Papeete depuis juillet dernier, l’Aremiti 5, qui reliait Tahiti à Moorea, ne fait plus partie de l’équation. “On regrette un peu, mais il serait trop coûteux à l’exploitation vers la Presqu’île”, confie Samuel Matton quant à cette reconversion désormais mise de côté. Si cette ligne vers le sud est effectivement mise en œuvre, ce pourrait donc être avec un bateau sur-mesure. “On se renseigne avec notre chantier pour savoir si on peut sortir un navire qui serait très économique en carburant, et si possible zéro émission. Si c’est faisable, on retournera voir les maires et le Pays avec un nouveau business plan pour voir comment ils pourraient nous aider, au niveau des infrastructures au sol, par exemple”.
Samuel Matton reste prudent, rappelant que ce projet est encore suspendu à plusieurs interrogations. Dans le meilleur des cas, le “Taiarapu Express” ne serait pas opérationnel avant trois ans, c’est-à-dire à l’horizon 2027. “Ce n’est pas certain qu’on y arrive et on ne veut pas donner de faux espoirs. On sait qu’il y a une vraie souffrance sur ce trajet-là, et on pense qu’il y a quelque chose à faire par la mer. (…) Il faut aussi penser les synergies avec les autres moyens de transport une fois les passagers débarqués. C’est en travaillant ensemble qu’on arrivera à avancer sur ces soucis de mobilité à Tahiti, et pas chacun de notre côté, comme aujourd’hui”, conclut le directeur général du groupe Degage.
L’accueil de véhicules à bord serait une source de revenus supplémentaire pour l’entreprise, mais ce surcoût semble pour l’heure difficile à assumer par les passagers dans le cadre d’une utilisation quotidienne.
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