La famille Marere vit au rythme des mape au Fenua ‘Aihere

Mape Tautira
Les sacs de mape sont acheminés par bateau à la marina de Tautira (Photos : ACL/LDT).
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D’avril à septembre, certaines vallées de Tahiti regorgent de mape. Avec sa nature préservée, le Fenua ‘Aihere de Tautira est réputé pour sa production. Une dizaine de familles s’adonnent à la collecte de cette châtaigne locale, dont le savoir-faire se transmet de génération en génération. C’est le cas de Ahuura Marere et de ses filles, Mereana et Laina. « Quand on va aux mape, on essaie d’en ramasser le plus possible. La règle, c’est premier arrivé, premier servi ! », explique l’une des deux filles. « On commence à ramasser le mardi et on livre le mercredi et le jeudi par bateau », tandis que les hommes de la famille privilégient la pêche.

254 kg ramassés et découpés

Ce jeudi-là, rendez-vous avait été donné à l’acheteur à la marina de Tautira. Les huit sacs ont été pesés sur place pour un total de 254 kilos. Longtemps affiché à 300 francs le kilo, le mape est aussi victime de l’inflation, et plus largement de l’évolution du coût de la vie : il est désormais vendu à 350 francs le kilo. « Tout a augmenté », remarquent les deux sœurs, qui aimeraient être rémunérées à leur juste valeur. « Pour cette commande, ça nous a mis deux jours pour découper les mape et une semaine pour les ramasser, parce qu’il faut aller à différents endroits, là où il y a les bons arbres. On porte nous-mêmes les sacs sur notre dos sur plusieurs kilomètres. Ils peuvent faire jusqu’à 40 kg », expliquent-elles. Leur record : 600 kg collectés en trois jours.

Une demande croissante

Vendu en sachet ou à la marmite aux alentours de 300 francs le lot de sept mape cuits, ce fruit bouilli emblématique ne connaît pas la crise. « La demande augmente », assure la famille Marere, qui n’arrive pas à satisfaire tout le monde. « On refuse des clients. On n’en a plus qu’un qui nous prend tout ». Les habitudes familiales ont aussi évolué. « Certaines familles de Tautira cuisent elles-mêmes les mape qu’elles ramassent pour les vendre au marché de Papeete le dimanche. On le faisait avant, mais plus maintenant, comme certains d’entre nous travaillent. On n’a plus autant de temps à consacrer aux mape », reconnaissent les jeunes femmes de la fratrie.

Entre plaisir et courage

Les mape ont pourtant bercé leur enfance. « On allait aux mape pendant les vacances quand on était petites », se souviennent-elles. « C’est un plaisir d’être dans la vallée, en connexion avec la nature. C’est apaisant ! Quand je ne travaille pas et que c’est la saison, ça me permet de souffler un peu. Mais on ne veut pas spécialement que nos enfants le fassent, sauf pour le plaisir, parce que c’est un travail vraiment dur. Ça rapporte, mais ça demande aussi beaucoup de courage », analysent-elles. Savourons d’autant plus les mape qui nous sont servis sur un plateau, de la vallée à la marmite.

Teaonui, client et revendeur :

« On est venu exprès de Papeete »

Mape Tautira

« On est venu exprès de Papeete pour récupérer les mape pour un tonton. Ça doit faire dix ans qu’il se fournit à Tautira. Je me suis aussi lancé il y a un an pour avoir une source de revenu, vu que je n’ai pas de travail. Je suis situé au Tahara’a, à Mahina. Je vends des mape en marmite en bord de route. Je cherche mon propre fournisseur pour pouvoir ouvrir un deuxième point de vente, car c’est un produit qui se vend bien quand la recette sucrée-salée est au point. Le souci, c’est que ce n’est pas évident de trouver des mape : les stocks ne sont pas suffisants ».