Bientôt livré, le pôle de santé mentale, pourrait-il ne pas ouvrir ?

Le bâtiment devant accueillir le pôle de santé mentale, baptisé Pu Ati’a sera livré d’ici quelques mois. (Photo: Jennifer Rofes)
Le bâtiment devant accueillir le pôle de santé mentale, baptisé Pu Ati’a sera livré d’ici quelques mois. (Photo: Jennifer Rofes)
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Le bâtiment devant accueillir le pôle de santé mentale, baptisé Pu Ati’a sera livré d’ici quelques mois. Mais alors que des milliards de francs ont été investis tant par le Pays que par l’Agence française de développement (AFD), son ouverture pourrait être ajournée. En cause, un coût de fonctionnement dont le gouvernement ne semble plus vouloir, et ce malgré l’urgence d’une telle structure pour le pays.

Construit derrière l’hôpital de Taaone, le nouveau bâtiment devant accueillir le pôle de santé mentale, baptisé Pu Ati’a, va-t-il devenir un bâtiment fantôme… Malgré les millions investis par le Pays pour les études préalables et les 3,7 milliards de francs octroyé pour sa construction par l’AFD ?

Voilà une question que la population serait en droit de se poser, au vu de la tournure que prend ce dossier. En effet, selon plusieurs sources gouvernementales, cela fait plus de 6 mois que le projet de financement de fonctionnement de l’établissement, présenté en conseil des ministres par le ministre de la Santé lui-même, est rejeté. Et le dernier conseil en date, ce 13 décembre, n’a pas failli à la règle en bottant à nouveau en touche. Mais les justifications ont évolué.

Aujourd’hui il est demandé à ce que ce futur établissement fasse au préalable des démarches pour obtenir le statut d’EPS (établissement public de santé), des démarches juridiques et administratives lourdes qui repousseraient d’au moins 1 an l’ouverture de la structure qui sera pourtant livrée d’ici quelques mois. Or après vérification, aucun autre établissement de santé du territoire, pas même le CHPF n’a le statut d’EPS. L’hôpital de Taaone est un EPA, un établissement public administratif.

De là donc à y voir un moyen détourné de reporter le financement de fonctionnement de l’établissement, prévu normalement dès la fin des travaux par le Pays, il n’y a qu’un pas.

Un axe prioritaire

Et Pourtant depuis 2010, l’élaboration d’un plan de santé mentale ainsi que la création d’un pôle de santé mentale font partis des axes prioritaires des deux derniers schémas d’organisation sanitaires, adoptés par l’Assemblée de la Polynésie.

Et pour cause, une enquête sur la santé mentale en population générale, menée par l’association SOS suicide, sous l’égide de l’OMS, en 2015, montrait que 42% de la population polynésienne était concernée par des troubles d’ordre psychique. L’enquête dévoilait également un certain nombre d’indicateurs très préoccupants pouvant conduire à des traumatismes et dysfonctionnements d’ordre psychiatrique chez les jeunes, comme l’augmentation des violences intrafamiliales, l’augmentation des addictions et un taux de suicide trois fois plus élevé qu’en métropole.
C’est donc face à l’urgence de santé publique, dressée par ce constat, et dans le but de répondre à l’absence de structure psychiatrique entièrement dédiée aux mineurs, adolescents et jeunes adultes que la création de Pu Ati’a, regroupant l’ensemble des professionnels du secteur, est devenue une priorité.

Protéger les mineurs

Et au vu du récent drame qui a conduit au suicide d’un jeune adolescent de 15 ans, qui malgré des troubles psychiques avérés, a été placé en détention à Nuutania alors que sa place, selon son avocat maître Millet, et l’un des psychiatres l’ayant expertisé, était dans une structure de soins, montre que l’ouverture du pôle de santé mentale est d’autant plus d’actualité.
Le futur bâtiment comporte en effet une unité d’hospitalisation de sevrage et post sevrage en addictologie, ainsi qu’une unité d’hospitalisation fermée dédiée aux mineurs et une unité d’hospitalisation ouverte pour les adolescents et jeunes adultes. Et pour inscrire un parcours de soin personnalisé et adapté à chaque enfant, en prenant en compte également le milieu social et familial, tous les professionnels qui travaillent auprès de ce jeune public désœuvré psychologiquement, qu’il s’agisse du Fare Tama Hau, du service addictologie de la direction de la santé ou du service de pédopsychiatrie de l’hôpital, seront réunis au sein de Pu Ati’a. Et comme la santé mentale ne concerne pas uniquement les habitants de Papeete, une antenne à Taravao et des référents spécialisés en santé mentale dans les îles font aussi partis du programme.

Alors un tel projet, initié depuis 2017 et quasiment finalisé aboutira-t-il ? Ou pour des questions de budget, sera-t-il relayé à un hypothétique plus tard… ?

Ce qui est sûr c’est que le nouveau schéma d’organisation sanitaire, présenté ce jeudi à l’Assemblée, n’en fait plus état…