Mado, polynésienne fière d’être voilière

Elle répare des voiles gigantesques dans son atelier de la Baie Phaëton, à Taravao, suite à un changement de cap professionnel (Photos : ACL/LDT).
Temps de lecture : 2 min.

Du côté de la marina de la baie Phaëton, à Taravao, son atelier détonne avec ses voiles tendues au plafond, sa plante verte et sa lampe de sel : on s’y sent comme à la maison. Il faut dire que Madeleine Peckett, alias Mado, y passe beaucoup de temps. Native de Faaone, la jeune femme de 32 ans exerce le métier atypique de voilière.

L’art de la réparation des voiles

Elle est spécialisée dans la conception de tauds et dans la réparation de voiles abîmées par les rafales de vent et les intempéries, ou tout simplement par le soleil et l’usure du temps. “Chaque voile est adaptée à son bateau, selon sa taille et son usage, de plaisance ou de compétition par exemple. Il y a plusieurs types de voiles : les génois, les grandes voiles et les voiles d’avant. La surface varie. Mon record, c’est une voile de plus de 120 m2 pour un bateau de 70 pieds”, explique-t-elle avec des termes parfois très techniques.

Elle n’a pourtant pas le pied marin. “J’ai même le mal de mer !”, avoue-t-elle. “J’ai découvert l’univers de la voile après, pour le fun et aussi pour comprendre les enjeux techniques des réparations”. Espaces verts et garde d’enfants, Mado a commencé sa carrière professionnelle en tant que prestataire de services. Ce qui l’a conduite à rencontrer celui qui l’a initiée à la voilerie, il y a cinq ans. “C’était l’occasion de tourner une page de ma vie. De fil en aiguille, on m’a proposé de me former, alors que je n’avais jamais fait de couture de ma vie ! Trois mois plus tard, l’entreprise était créée et j’ai pris la suite après le Covid”.

Trois machines à coudre et un plancher de 40 m2

Avec ses rouleaux de tissu anti-UV et de toile PVC en provenance de France ou de Nouvelle-Zélande, ses trois machines à coudre spécialisées et son plancher de 40 m2, Mado s’adapte à chaque situation, maîtrisant à la fois le point droit et le triple point zigzag. “En moyenne, chaque réparation nécessite deux jours de travail, mais ça varie selon l’ampleur des dégâts. Je commence par un check complet de la voile, puis il y a beaucoup de préparation pour remplacer et découper avant de passer à la couture, qui est vraiment la phase finale”, précise-t-elle.

Ce jour-là, elle intervenait sur une grande voile de 11 mètres de long confiée par le propriétaire d’un monocoque de 43 pieds. Parmi ses projets les plus marquants, elle est intervenue en urgence pour une société de Yacht Services, réparant en quatre jours un génois très abimé. “C’est un de mes plus gros challenges, et j’en suis très fière !”, confie-t-elle. Une fierté qui s’applique aussi au choix de ce métier peu répandu en Polynésie. “J’ai un collègue à Faa’a, mais je pense être la seule à la Presqu’île. C’est un métier plutôt rare, technique et physique, mais aussi généralement masculin”, remarque Mado.

“Il y a du boulot”

Idéalement située, elle est principalement sollicitée par une clientèle internationale de plaisanciers. “Il y a du boulot : je ne vais pas chercher les clients, ils viennent vers moi”, assure-t-elle. Pour cette fin d’année, Mado garde son cap : elle s’est fixé comme objectif de finir les commandes en cours avant de partir “sur un gros projet” pour le chantier naval voisin.