Goutte : le taote Pascart insiste sur le facteur génétique en Polynésie

Taote Pascart, de retour au Fenua pour présenter les résultats de son enquête sur la goutte en Polynésie française. (Photo : TP)
Taote Pascart, de retour au Fenua pour présenter les résultats de son enquête sur la goutte en Polynésie française. (Photo : TP)
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Tristan Pascart, médecin/professeur spécialisé en rhumatologie au sein du groupement des hôpitaux de l’institut catholique de Lille est de retour au Fenua. Il présentera aux professionnels de santé, ce mercredi 19 avril à 18h30 à l’amphithéâtre du CHPF, les résultats de l’enquête réalisée en 2021 avec son équipe, en collaboration avec le ministère de la Santé et la direction de la santé, sur la goutte en Polynésie.

L’objectif de l’étude, réalisée sur un panel d’environ 1000 personnes sur tous les archipels, est de récolter un maximum de données sur la maladie en Polynésie française afin d’établir une épidémiologie précise avec comme point d’orgue, une meilleure prévention et prise en charge des malades.

Autre point important étudié dans l’enquête, soulève le docteur Pascart : le poids de la génétique et de l’hérédité sur la goutte. Dans le Pacifique, la tendance est en effet à davantage de cas de goutte et de variations génétiques, avec pour conséquence que les gens éliminent moins bien l’acide urique. Pour étudier cela, en plus des différentes informations récoltées comme le poids, la taille…, des prises de sang pour mesurer l’acide urique mais aussi analyser la génétique ont été réalisées.

En France, 0,9 % des personnes sont touchées par la goutte. Aux États-Unis, 3 à 4 % de la population. Chez les Maoris en Nouvelle-Zélande, 7 à 8 %, informe le rhumatologue.

En Polynésie française, l’étude révèle que 26 % des personnes sont atteintes par la goutte. 39 % d’hommes, 13 % de femmes. Alors que de la goutte est généralement détectée sur des sujets âgés de 50 ans, en Polynésie française, 15 % des 20-30 ans sont touchés, ce qui est malheureusement exceptionnel nous indique le professeur.

L’étude révèle aussi une association métabolique avec le diabète. Un goutteux sur cinq est diabétique. Chez les femmes le ratio est impressionnant, une sur deux. La prévalence du diabète est de 17 %.

A noter que dans l’étude, la moitié des personnes s’ignoraient diabétiques.

Autre enseignement important de l’étude sur le point biologique, la fréquence de l’hyperuricémie (trouble sanguin défini par une trop grande concentration d’acide urique dans la circulation).

D’habitude on est a 10%. Aux États-Unis à 20%. En Polynésie française on est a 71% ! Et il est très fréquent de retrouver cela chez des sujets âgés seulement de 30 ans, surtout chez les hommes révèle l’étude.

“La goutte est une maladie culpabilisante. La réputation des personnes touchées par la goutte est réduite à leur alimentation

Le docteur Pascart explique que oui, alcools forts, bière, contribuent à faire monter l’acide urique, ainsi que les sodas et certains aliments. Mais l’alimentation est surtout un déclencheur de crise mais pas un “créateur” de goutte.

“On a fait faire des régimes drastiques à des porteurs de goutte. Ils ne gagnaient même pas 25 % de ce qu’il faudrait gagner en terme d’amélioration sur l’acide urique” mentionne le médecin avant d’ajouter : “la goutte est une maladie culpabilisante, maladie réputée pour être auto infligée. La réputation des personnes est réduite à leur alimentation.”

Le facteur génétique est le plus important rapporte le spécialiste : “La génétique a 400 fois plus de poids que tout cela réuni pour expliquer l’élévation de l’acide urique.” En Polynésie, les chiffres ne sont pas encore disponibles mais la proportion sera plus forte encore, rapporte le taote.

Les solutions : l’information, la prévention et la curation. En effet, il existe un traitement depuis 1965 pour traiter les personnes atteintes de goutte : l’Allopurinol. Ce médicament, permet de faire baisser l’acide urique. L’étude révèle que sur ceux qui se savent atteints de la goutte, moins de la moitié suit ce traitement. Celui-ci, qui doit se suivre à vie une fois la goutte détectée, permet de ne plus créer les cristaux et de les faire disparaître ainsi que de faire disparaitre les crises. A ce jour, ce traitement n’est pas encore prescrit en préventif aux personnes dites asymptomatiques indique le docteur Pascart. En Polynésie française, 50 % des personnes ont trop d’acide urique dans le sang mais pas encore déclaré comme ” goutteux “.

Docteur Pascart : ” six fois plus de risque de mourir du cœur et d’inflammations chroniques pour un porteur de goutte “

“La goutte correspond à un surplus d’acide urique dans le sang. Cet acide urique liquide, si trop concentrée, devient solide. Il y a alors une saturation du sang, ça cristallise et cela se dépose dans les articulations et tissus de l’organisme. Ces petits cristaux vont stimuler le système immunitaire et vont déclencher les crises de goutte. Ces crises, si elles se répètent peuvent entraîner d’autres complications au niveau rénale ou cardiovasculaire. Il y a six fois plus de risque de mourir du cœur et d’inflammations chroniques pour un porteur de goutte .”