Pacifique – Une convention des entreprises pour le climat “avant fin 2023”

La Fresque du Climat, c’est d’abord un atelier mobilisant la collaboration et l’intelligence collective.
La Fresque du Climat, c’est d’abord un atelier mobilisant la collaboration et l’intelligence collective. (Photo TC)
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“Je crois que nous ne sommes pas encore conscients de la situation d’extrême urgence dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui. Chaque action, chaque dixième de degré comptent” insiste Karine Le Flanchec. (Photo KLF)

Et si l’on vous disait que les enjeux climatiques, c’est d’abord l’affaire de tous, et pas seulement celle des experts ? La fresque du Climat, association créée en 2018 par Cédric Ringenbach a en effet pour objectif de sensibiliser le plus grand nombre aux enjeux climatiques et surtout de créer le déclic pour sortir du “triangle de l’inaction”. Karine Le Flanchec, référente Polynésie de la Fresque du climat, porte également depuis plusieurs mois la préparation de la première Convention des entreprises pour le climat Pacifique, organisée “avant la fin de l’année.”

Référente Polynésie de la Fresque du climat, Karine Le Flanchec anime depuis bientôt un an les ateliers du même nom chaque premier mercredi du mois. Mais son ambition pour le fenua est plus grande. Il s’agit en effet d’accompagner les entreprises à rédiger leur feuille de route pour passer d’un “Business as usual” à un “Business regenerative” car selon elle “la transformation de notre modèle de société passera par la transformation des organisations”.

La consultante en management et autrice de “Et si on redevenait humain” compte bien organiser la première Convention des Entreprises pour le Climat Pacifique avant la fin de l’année. La Fresque du Climat, c’est d’abord un atelier mobilisant la collaboration et l’intelligence collective. Durant 3 heures, les participants sont invités à réfléchir ensemble, à interagir, discuter et à se familiariser avec les enjeux climatiques au moyen d’un jeu de 42 cartes illustrées.

Le format de cet “outil pédagogique, collaboratif et surtout scientifique” insiste Karine est en fait une déclinaison vulgarisée et synthétisée des rapports scientifiques du GIEC qui se déclinent en plusieurs milliers de pages. L’outil permet donc un accès aux informations essentiels en quelques heures.

Son auteur, et fondateur de l’association éponyme, Cédric Ringenbach, constatant l’efficacité du format d’abord éprouvé avec ses élèves sur les problématiques énergie-climat dès 2015 décide alors de partager le dispositif au grand public. Il ne s’agit plus seulement, pour les non-experts, de se former mais de devenir de véritables ambassadeurs à leur tour sur la question du dérèglement climatique. Le 5 avril dernier, La Fresque du Climat passait le cap symbolique de 1 million de participants aux ateliers de par le monde.

Chaque petite action compte

Karine qui anime les ateliers à Tahiti depuis mi-2022 et intervient à la demande au sein des entreprises, aimerait également organiser à l’instar de ce qui se fait en France les “Rentrées climat” en Polynésie française. A chaque rentrée universitaire, les bénévoles se mobilisent pour sensibiliser tous les étudiants aux enjeux climatiques. “Notre démarche est d’essaimer mais nous ne sommes pas assez en Polynésie, l’outil n’est pas connu ici. Nous ne sommes guère que deux animatrices régulières et quelques intervenants ponctuels. Le prochain objectif, c’est d’atteindre 1 millions d’animateurs dans un délai de 3 ans.”

Durant 3 heures, les participants sont invités à réfléchir ensemble, à interagir, discuter et à se familiariser avec les enjeux climatiques au moyen d’un jeu de 42 cartes illustrées. (Photo KLF)

En tant qu’animatrice, Karine veut rassurer : “On n’est pas scientifiques, on n’est pas des experts, mais on connait le sujet pour être capable de mener l’atelier. On a une posture d’animateurs, de facilitateurs autour d’un jeu d’intelligence collective. Les gens sont tout à fait capables de comprendre les causes et les conséquences, d’avoir une vision globale et systémique des enjeux. Si l’on veut qu’ils passent à l’action, il faut qu’ils comprennent ce qui se joue. C’est l’effet colibri : chaque petite action compte.”

Une convention des Entreprises pour le Climat Pacifique fin 2023

La Fresque du Climat, c’est en fait la première étape d’un processus de transformation profonde. “J’ai un projet plus grand”, livre Karine Le Flanchec. “La transformation de notre modèle de société passe par une transformation des organisations, des entreprises. Avec l’écriture de mon livre, je porte depuis plusieurs mois la préparation de la première Convention des Entreprises pour le Climat Pacifique. On souhaite lancer le programme en octobre 2023. C’est pour bientôt. Le principe est de rassembler les dirigeants d’entreprises qui souhaitent engager une transformation de leur organisation.”

Pour ce faire, l’ambassadrice climatique monte un collectif avec des volontaires de tout bord. Le principe est d’accompagner les entreprises au travers d’un parcours qui leur permettra au terme de 8 à 9 mois de rédiger une feuille de route à l’horizon 2030 qui intègre les limites planétaires. “Passer du business as usual au business regenerative consistera pour ces entreprises à veiller à ce que toutes leurs actions mises en œuvre respectent les 9 limites planétaires, parmi celles-là le dérèglement climatique. Concrètement le processus comprendra 6 ateliers de deux jours planifiés toutes les 6 semaines où l’on va les aider à cheminer, définir le cap, mettre en place les indicateurs financiers…” 

La Convention des Entreprises pour le Climat est une initiative nationale fondée par Eric Duverger initiée en septembre 2021. La Convention avait réuni 150 dirigeants d’entreprises françaises de tous horizons, tous secteurs, de toutes tailles. Beaucoup de ces feuilles de routes sont aujourd’hui partagées et permettent une démultiplication des actions. Karine prépare ainsi depuis 1 an l’édition Pacifique Calédonie/ Polynésie où elle souhaite répliquer “ce modèle incroyablement puissant (…).Ce sont les entreprises qui changent le monde, rassemblons-les autour d’une table.”

Taina Calissi

• Pour devenir animateur Fresque du Climat :
– Faire un atelier en tant que citoyen ( A Tahiti tous les premier mercredi du mois, brasserie Hoa)
– Formation en ligne, ou en présentiel, de 3 heures
– Commencer à animer en tant que “Néo animateur”, ceinture blanche.

Le climat absent des discours politiques ?

Au départ, rien ne prédestinait Karine à se pencher sur la question climatique. On l’a connue sur des sujets tels que la solidarité, la condition féminine… La bascule s’est opérée petit à petit chez cette consultante en management, de formation initiale en communication. “Je me suis rendu compte que le climat était un sujet totalement occulté par les politiques, en dehors des grands discours (…). L’état de notre planère, les risques de l’humanité… ça m’est apparu comme l’enjeu ultime”.

Si elle rappelle qu’elle n’est pas experte, Karine s‘est alors demandé comment contribuer “avec ce que je sais, et ce que je suis ?” “C’est passé par l’écriture d’un bouquin. Mon métier c’est d’accompagner les entreprises et je me suis demandé quel impact je pouvais avoir si j’intégrais la question du climat à mon propos”.

En faisant converger les thématiques du leadership avec les enjeux du climat, l’auteure pose la question suivante : quelles sont les qualités humaines qu’un dirigeant doit développer pour mener à bien une transformation responsable, juste, équitable de son organisation qui intègre le respect du vivant ?

Elle part alors en campagne pour deux ans et interviewe une dizaine de chefs d’entreprises en France dont le cœur de métier n’a rien à voir avec le climat. Il s’agit surtout de comprendre et de modéliser le leadership de ces dirigeants qui, d’abord dans une dynamique de business, décident un jour de transformer leurs activités en faveur du vivant. C’est ainsi que Karine découvre un large éventail d’outils au service de la cause, dont la Fresque du Climat. “J’ai passé des mois à me rouler par terre de colère contre l’humanité. Ça m’a tellement secouée… c’est comme ça que je me suis mise en route.”
Alors que la course électorale bat son plein, pour Karine, le climat “devrait être un sujet de préoccupation majeure, d’autant plus parce qu’on est en Polynésie française et on est directement impactés.” Elle lance un appel aux futurs élus de l’Assemblée de la Polynésie et du gouvernement afin qu’ ils se forment aux enjeux du climat.