Conflit avec Cowan : le Port autonome se dit “suffisamment équipé avec 6 grues”

Le Port autonome de Papeete a accordé à la Société Cowan l’autorisation d’exploiter sa nouvelle grue "à condition qu’elle vienne en remplacement d’une de ses anciennes grues." (Photo : Damien Grivois)
Le Port autonome de Papeete a accordé à la Société Cowan l’autorisation d’exploiter sa nouvelle grue "à condition qu’elle vienne en remplacement d’une de ses anciennes grues." (Photo : Damien Grivois)
Temps de lecture : 4 min.

La grue Liebherr bloquée se trouve à l’extrême-droite. “il y a aujourd’hui 6 grues en activité sur le TCI et les statistiques sur les 2 années passées montrent que chaque grue n’est exploitée qu’à hauteur de 10 à 15% de sa capacité” assure le Port autonome.

Le directeur du Port autonome de Papeete, Jean-Paul Le Caill, a adressé un droit de réponse à la Dépêche de Tahiti à la suite de l’article “Grue bloquée : Cowan dénonce un abus de pouvoir du Port autonome.” Pour mémoire, depuis le début de l’année, la direction du Port autonome refuse de délivrer son agrément à la nouvelle grue Liebherr 550 de J.A Cowan, au motif que l’acconier devait d’abord démonter une ancienne grue en panne, mais qui a été réparée depuis.

Le Port autonome s’était déjà exprimé dans La Dépêche par la voix d’un adjoint de Jean-Paul Le Caill chargé du développement et des études prospectives, Sébastien Lejeune. Lequel avait justifié le refus du port par une question de place en zone sous douane, mais également une question “d’équité” entre sociétés d’acconage. Deux arguments vivement contestés par le patron de Cowan, Quito Braun-Ortega, qui avait reproché au directeur du Port une “rancœur personnelle”.

Si le concept “d’équité” disparait totalement dans le courrier de Jean-Paul Le Caill, ce dernier maintient en revanche fermement le reste de ses arguments : l’obtention de l’agrément pour une nouvelle grue était conditionné au démontage de l’ancienne grue (fusse-t-elle réparée) et “le port de Papeete est suffisamment équipé avec 6 grues en exploitation”, lesquelles ne seraient exploitées selon lui qu’à hauteur de 10 à 15% de leur capacité.

“Il appartenait à la société Cowan de s’assurer que sa grue pouvait être réparée avant d’en commander une nouvelle” justifie le Port autonome qui estime que la société d’acconage “ne peut aujourd’hui utilement tenter de faire reposer sur le Port autonome de Papeete les conséquences de choix qu’elle a opérés seule et qui ont pu se révéler prématurés.” (DG)

Jean-Paul Le Caill : “la mise en service d’une grue supplémentaire n’est manifestement pas nécessaire”

Jean-Paul Le Caill, le directeur général du Port autonome de Papeete. (Photo : présidence)

A la suite du dernier article paru dans votre journal intitulé “Grue bloquée : Cowan dénonce un abus de pouvoir du Port autonome”, lequel met en cause l’Établissement public que je dirige, je souhaite apporter les précisions suivantes :

La société Cowan a acquis en début d’année 2022 une nouvelle grue portuaire pour laquelle elle a demandé une autorisation d’exploitation au Port autonome de Papeete.

Avant de la délivrer, il appartenait à mon Etablissement public de s’assurer que cette mise en exploitation était conforme aux obligations et objectifs imposés aux acconiers par la réglementation en vigueur. A ce titre, il est notamment fait obligation aux acconiers de s’équiper de moyens matériels “qui permettent de s’adapter aux évolutions du trafic maritime” et ils ont pour objectif d’”avoir une gestion optimisée des moyens matériels et humains”.

Ce sont là des conditions dont le respect est extrêmement important car les dernières études réalisées annoncent une saturation de la capacité du terminal de commerce international (TCI) dans les 5 à 10 années à venir. Autrement dit, nous allons manquer de place. Il convient donc d’avoir une gestion efficiente de l’espace restant.

Or, l’exploitation d’une 7ème grue par l’entreprise Cowan ne répond pas à cet impératif. En effet, il y a aujourd’hui 6 grues en activité sur le TCI et les statistiques sur les 2 années passées montrent que chaque grue n’est exploitée qu’à hauteur de 10 à 15% de sa capacité. A titre de comparaison, le port de Nouvelle-Calédonie qui voit transiter 25% de conteneurs de plus par an que nous, fonctionne avec 5 grues.

Le port de Papeete est donc suffisamment équipé avec 6 grues en exploitation. D’autant plus qu’au besoin, les acconiers ont la possibilité de se louer, entre eux, leurs grues portuaires, ce qu’ils font d’ailleurs régulièrement.

En conséquence, parce que la mise en service d’une grue supplémentaire n’est manifestement pas nécessaire, alors qu’à l’inverse il est essentiel de rationnaliser l’utilisation des espaces du TCI, le Port autonome de Papeete a accordé à la Société Cowan l’autorisation d’exploiter sa nouvelle grue à condition qu’elle vienne en remplacement d’une de ses anciennes grues.

Il faut d’ailleurs rappeler qu’à l’origine, c’est exactement en ces termes que la société Cowan a présenté sa demande au Port autonome de Papeete (exploiter une nouvelle grue en remplacement d’une ancienne qui était tombée en panne) et ce n’est qu’environ 6 mois plus tard, après avoir appris que son ancienne grue pouvait en réalité être réparée, que la société a changé d’avis et informé le Port que, finalement, elle souhaitait exploiter la nouvelle grue en complément des 2 anciennes et non plus en remplacement de l’une d’elles.

Il sera tout d’abord souligné qu’il appartenait à la société Cowan de s’assurer que sa grue pouvait être réparée avant d’en commander une nouvelle et qu’elle ne peut aujourd’hui utilement tenter de faire reposer sur le Port autonome de Papeete les conséquences de choix qu’elle a opérés seule et qui ont pu se révéler prématurés.

Il sera ensuite relevé la constance de mon Établissement dans son analyse : si la mise en exploitation d’une grue en remplacement d’une autre a été autorisée, en revanche, la mise en exploitation d’une grue supplémentaire a toujours été refusée pour les raisons évoquées plus haut.

Il ressort de ce qui précède qu’il n’y a ici aucun “règlement de compte”, du moins pour ce qui concerne le Port autonome de Papeete : la décision querellée n’étant pas motivée par des considérations personnelles mais se justifiant objectivement. En ce sens, je condamne fermement les propos de la société Cowan qui sous-entendent ou allèguent expressément le contraire.

La société Cowan a porté l’affaire devant les tribunaux. Ce dossier est toujours en cours d’instruction. Il convient donc d’attendre la décision des juges.”