Cannabis thérapeutique – Le Cesec dit oui à l’import de médicaments et à une production locale contrôlée

L'homme explique que le plus gros de son stock, il le donne à une association qui fait la promotion du cannabis thérapeutique : huiles, baumes, mono'i ou encore suppositoires à base de cannabis.
En séance plénière, ce jeudi 1er février, le Cesec a émis un avis favorable aux dispositions relatives au cannabis thérapeutique permettant l’importation de médicaments à base de cannabis et à terme, la production locale officielle et contrôlée de tels médicaments. (Photo Shutterstock)
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L’assemblée du Conseil économique, social, environnemental et culturel de la Polynésie française (Cesec) s’est réunie, ce jeudi 1er février, au cours d’une réunion plénière évoquant le sujet du cannabis thérapeutique. Les membres ont étudié le projet d’avis sur le projet de loi du Pays (n°2023-5 du 5 janvier 2023) règlementant certaines activités relatives au cannabis dépourvu de propriétés stupéfiantes et les médicaments contenant du cannabis ou des cannabinoïdes.

L’association THC milite depuis des années pour que la législation s’adapte et permette aux malades de se soigner avec des produits dépourvus de substances psychotropes. (Photos DG/LDT)

Pour rappel, ce dossier a été transmis par le ministre de la Santé, Cédric Mercadal, à la commission santé et solidarités du Cesec le 29 décembre dernier. Lu à haute voix durant la séance par Marguerite Laï et Patrice Pohue, le projet vise à réglementer certaines activités relatives au cannabis dépourvu de propriétés stupéfiantes (ou cannabidiol), d’encadrer la culture du cannabis dépourvu de propriétés stupéfiantes, de l’importation des semences jusqu’à leur commercialisation et d’autoriser les médicaments contenant du cannabis.

Les grandes lignes du projet

Le projet de loi du Pays prévoit “l’autorisation des produits dont le taux de delta 9-tétrahydrocannabidiol (THC) est inférieur à une certaine teneur, notamment ceux à base de cannabidiol (CBD)“, peut-on lire sur le document. En France et en Europe, le taux maximum fixé est de 0,3%. Le gouvernement, via un arrêté en conseil des ministres, précisera les produits concernés et le taux maximal de THC autorisé au fenua. En ce sens, le texte prévoit également “la culture du cannabis dépourvu de propriétés stupéfiantes“, dont fait partie le CBD. Le projet de texte encadre notamment “les conditions d’importation et de cession de semences, les conditions de culture et les variétés de cannabis autorisées“.

Au niveau de la santé, “les médicaments contenant du cannabis ou des cannabinoïdes provenant de l’Union Européenne mais également au-delà de la zone européenne” sont autorisés. Ainsi, les professionnels de santé pourront établir des prescriptions médicales à base de cannabis et les pharmaciens seront autorisés à préparer et à dispenser ces médicaments aux patients. Ces conditions devront, par ailleurs, respecter la règlementation pharmaceutique.

Pour le Pays, ce projet de loi sous-entend une avancée considérable sur la question de l’usage du cannabis thérapeutique au fenua, bien qu’elle soit légalisée en Métropole. Outre autoriser le cannabidiol (Ndlr : CBD, substance non stupéfiante du cannabis), il s’agit également de mètre en place une filière de culture du chanvre (CBD) afin de produire localement cette substance. Aussi, le Pays veut encadrer le cannabis thérapeutique “afin que les malades polynésiens puissent se voir prescrire des traitements à base de cannabis“, précise le document.

“Prévenir le méusage des produits au CBD”

Concernant les dispositions portant sur les activités relatives au cannabis “dépourvu de propriétés stupéfiantes“, le Cesec estime que les produits qui en contiennent doivent être “exemptés de l’interdiction générale concernant les stupéfiants, quelle que soit leur présentation“. Toutefois, le Conseil considère que “compte tenu du risque pour la santé publique, ces produits doivent respecter certaines conditions notamment lorsqu’ils sont ingérés ou absorbés par l’homme“. De plus, elle recommande au Pays de “suivre et contrôler le respect de ces dispositions afin de prévenir le méusage des produits au CBD dans le champ du bien-être“. Cela a conduit le Cesec à révéler que “du fait de l’influence de notre climat sur la teneur en THC de la plante de cannabis, il n’est pas garanti que le taux maximal de 0,3 % de THC soit respecté“. Néanmoins, l’institution rappelle que “le CBD n’est pas inerte pharmacologiquement” et recommande ainsi “que d’importantes précautions d’ordre sanitaire soient prises en matière notamment d’étiquetage, de doses journalières recommandées et de contrôle de qualité des produit.”.

“Création d’une véritable filière du chanvre”

Au sujet de la culture du cannabis “dépourvu de propriétés stupéfiantes“, le Cesec est favorable à “la création d’une véritable filière du chanvre pour permettre notamment une traçabilité et la qualité de la production locale.” Toutefois, l’institution considère qu’en l’état, “cet encadrement de la culture de ce cannabis soulève des interrogations quant au risque de dérives et milite pour que les garanties nécessaires soient apportées quant au bon suivi et aux contrôles stricts, en particulier en termes de moyens humains et techniques.

Concernant les dispositions réglementant les médicaments contenant du cannabis ou des cannabinoïdes, le Cesec “réitère le caractère urgent de la prise de dispositions visant à réglementer, encadrer et sécuriser au mieux le recours au cannabis à usage thérapeutique et apporter ainsi une réponse à la forte attente des patients atteints de pathologies qui peuvent trouver un recours dans les dérivés du cannabis.” Néanmoins, l’institution préconise que “les contours exacts de l’usage médical du cannabis soient précisés afin de distinguer le cannabis thérapeutique des autres finalités d’usage telles que le bien-être et le récréatif“. Il considère que “le recours au cannabis thérapeutique exige une sécurisation des patients au travers d’un réel accompagnement, de la formation de l’ensemble des personnels médicaux mais également de la garantie de remboursement de ces produits.” Selon le Conseil, l’Institut Louis Malardé (ILM), qui est “équipé pour ce type d’opération“, doit être identifié comme étant “le seul organisme de référence en la matière.

Ainsi, au cours d’une heure d’étude et de discussion, le Cesec a émis un avis favorable aux “dispositions relatives au cannabis thérapeutique permettant l’importation de médicaments à base de cannabis et à terme, la production locale officielle et contrôlée de tels médicaments.”

En revanche, le Conseil est défavorable aux “dispositions réglementant certaines activités relatives au cannabis dépourvu de propriétés stupéfiantes et à celles concernant la culture du cannabis dépourvu de propriétés stupéfiantes, en l’état.”

Lexique : 

Cannabinoïdes : l’ensemble des cannabinoïdes naturels du cannabis, ainsi que les cannabinoïdes de synthèse possédant une action analogue à celle des cannabinoïdes naturels.