Les élèves de bac pro aquaculture présentent leur bilan de stage à l’oral

Bac pro aquaculture lycée agricole Taravao
Temauiarii Tauraa a passé l'épreuve, tandis que Marie-Jeanne Tchou Fouc poursuit son stage (Photos : ACL/LDT).
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Bac pro aquaculture lycée agricole Taravao
Oral face à un jury de deux enseignants et un professionnel.

L’ambiance était particulièrement studieuse, ce mercredi 14 juin 2023, au lycée d’enseignement agricole protestant John Doom de Taravao. Sur la centaine d’élèves de l’établissement, en cette fin d’année scolaire, ils sont une vingtaine à plancher sur les épreuves du baccalauréat professionnel des deux filières au choix : bio-industries de transformation et conduite de productions aquacoles.

Outre les épreuves écrites, les élèves de terminale spécialisés en aquaculture ont également été entendus à l’oral par un jury composé de deux professeurs de France et des Marquises, et d’un professionnel du secteur. Dix minutes de présentation sont consacrées à une synthèse en lien avec plusieurs semaines de stage en entreprise effectuées en classes de première et de terminale. Des questions complètent l’épreuve pour approfondir le sujet.

Temauiarii Tauraa : « Une épreuve stressante »

Bac pro aquaculture lycée agricole Taravao
Temauiarii Tauraa s’est intéressé au paraha peue.

Soulagé en sortant de la salle d’examen avec son ordinateur et son rapport de stage en main, Temauiarii Tauraa, élève de terminale originaire de Papeari, s’est confié sur son parcours et ses ambitions. « J’ai fait une seconde bac pro bâtiment au lycée polyvalent de Taravao, mais ça ne me plaisait pas, donc j’ai préféré me réorienter en aquaculture. J’aime la mer, peut-être parce que mon père est pêcheur ? Je rame aussi depuis que je suis petit : le week-end dernier, j’ai participé à la course Te Aito en catégorie junior », précise le jeune homme de 18 ans, monté sur le podium.

Une façon de se préparer mentalement aux épreuves du bac. « À l’écrit, l’épreuve d’aquaculture était difficile : il fallait faire des calculs de rationnement d’aliment et de densité de poissons dans les cages. L’oral était assez stressant, mais j’ai réussi à répondre aux questions du jury. J’ai présenté mon lieu de stage, Tahiti Fish Aquaculture, un élevage de paraha peue où j’ai passé trois mois entre la première et la terminale. J’attends les résultats avec impatience ! Plus tard, j’aimerais me lancer dans ce type d’élevage : c’est un beau poisson et il y a de la demande. Je vais commencer par postuler avant de peut-être créer mon entreprise à la Presqu’île, si possible avec des aides parce que ce sont de gros investissements », espère-t-il, déterminé à entrer dans la vie active.

Marie-Jeanne Tchou Fouc : « Gagner en compétences »

Bac pro aquaculture lycée agricole Taravao
Marie-Jeanne Tchou Fouc se projette dans la crevetticulture.

À un an de l’échéance du baccalauréat, Marie-Jeanne Tchou Fouc poursuit un stage qui la passionne à l’écloserie de Vairao. « J’étais en seconde générale, mais je ne me sentais pas dans mon élément. Un professeur m’a parlé du lycée agricole, que je ne connaissais pas. Ça m’a tout de suite plu, parce qu’on fait beaucoup de pratique. J’ai la chance de faire mon stage en écloserie de crevettes. Le matin, je nourris les géniteurs. Je prépare les aliments : ce sont des moules et des calamars qu’on doit découper et peser. On prélève des échantillons dans les bassins pour adapter le nourrissage selon le poids des crevettes. Quand on produit des larves, on remplit les bassins. Il faut s’assurer de travailler très proprement et d’être bien organisé. J’apprends toujours de nouvelles choses ! C’est inquiétant de voir ce qui se passe en ce moment par rapport à la crevette, mais c’est intéressant d’observer ce qui est mis en œuvre pour tenter de résoudre le problème. Ça me prépare pour plus tard », confie l’élève de première de 17 ans, qui prend régulièrement des notes pour son futur rapport de stage.

Résidente de Faaone, elle est issue d’une famille d’éleveurs porcins, mais c’est bien côté mer qu’elle envisage son avenir. « Je pense continuer mes études en BTS aquacole en France, même si j’aimerais bien pouvoir le faire en Polynésie. Ça me permettrait de gagner en compétences, et donc en responsabilités pour avoir un meilleur salaire », explique-t-elle. La jeune femme raccrochera son épuisette le vendredi 23 juin, le temps des grandes vacances. Elle a déjà hâte de poursuivre son stage, l’an prochain.

Jean-Pierre Sartore-Devasse, chef d’établissement :

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« On prévoit d’ouvrir un BTS aquaculture dans les années à venir »

Comment préparez-vous vos élèves à cette épreuve orale ?

« Ce n’est pas forcément l’épreuve la plus difficile, mais c’est la plus redoutée par les élèves parce qu’ils doivent se présenter seuls face à un jury d’inconnus. Ce n’est pas évident ! C’est une épreuve en trois étapes : la rédaction du rapport de stage d’une trentaine de pages envoyé fin mai au jury, la préparation écrite de leur oral avec une synthèse sur PowerPoint et la préparation à l’oral. Notre équipe de 12 professeurs les entraînent tout au long de leur cursus, car la communication orale n’est pas le fort de nos jeunes. On essaie de mettre en place des outils, comme le théâtre ou des présentations lors des journées portes ouvertes, pour qu’ils puissent prendre confiance en eux ».

Selon l’issue des résultats, quels choix d’orientation s’offrent à vos bacheliers ?

« 80 % de nos élèves de terminale ont fait une demande de poursuite d’études en BTS. Trois élèves vont partir en France suivre un BTS aquaculture, à Saint-Pée-sur-Nivelle, au Pays Basque. On va recevoir les familles pour les accompagner dans leur adaptation, qui peut être difficile. Beaucoup d’élèves n’ont jamais pris l’avion ! On prévoit d’ouvrir un BTS aquaculture, vu que ça n’existe pas encore sur le territoire. Nous sommes un jeune lycée, c’est notre troisième promotion, mais c’est en projet dans les années à venir. D’autres élèves iront en BTS au lycée agricole de Moorea ou à Papara. Certains veulent travailler directement dans l’entreprise familiale ou en tant que demandeur d’emploi. À la fin de la terminale, ce sont des techniciens avec des compétences pratiques : ils ont les réflexes et ils sont opérationnels ».

Thomas Launay, professeur en aquaculture :

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« On a la chance d’être entouré de professionnels qui ont à cœur de former les jeunes Polynésiens »

« Dans la formation des élèves, il y a une partie théorique avec les bases de la compréhension des écosystèmes, de l’environnement marin et terrestre, qui sont liés, des calculs de la production, etc. On axe aussi beaucoup sur la pratique. Au lycée, on a une petite plate-forme avec un système d’aquaponie en circuit fermé pour voir les bases. On développe aussi des partenariats avec les professionnels aux alentours, car le lycée est bien placé à la Presqu’île avec toutes les fermes, l’écloserie territoriale, la DRM et l’Ifremer. Cette année, on a beaucoup travaillé avec Tahiti Marine Products sur l’élevage de rori : chaque mercredi matin, on était sur site avec l’équipe pour suivre le processus de production des holothuries. L’aquaculture s’apprend beaucoup sur du concret. On a la chance d’être entouré de professionnels qui ont à cœur de former les jeunes Polynésiens ».